Tunis | Ce mardi 27 janvier 2015, la Tunisie fête le premier anniversaire de l’adoption de la constitution tunisienne. Adoptée à la majorité écrasante des voix, soit 200 votes positifs contre 4 abstentions et 12 votes négatifs, le 27 janvier 2014 au Bardo, à l’Assemblée Nationale Constituante, la nouvelle constitution de la Tunisie a été la résultante de consensus, de concertations et de beaucoup de pressions de différentes composantes politiques et de la société civile.
Chacun son exégèse de la Constitution tunisienne
Composée de 149 articles, répartis en une dizaine de livres, la constitution de ce qu’on appelle « la deuxième République » met les bases des droits et des libertés, de l’organisation des pouvoirs et des instances républicaines.
Suite à son adoption, les analystes et chercheurs du monde entier ont estimé, à l’unanimité, le progrès constitutionnel fulgurant de la Tunisie. En outre, cette constitution, a été le fruit de 217 députés des 24 gouvernorats de la Tunisie, suivis attentivement par l’association Al Bawsala, et de la société civile en général. Par ailleurs, quel organisme permet de vérifier et juger du respect de cette constitution, maintenant ?
A la première épreuve, le politique s’en est mêlé. Au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle du 23 novembre 2014, Moncef Marzouki, président sortant, a demandé à Béji Caid Essebsi, chef du parti majoritaire à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), de former un nouveau gouvernement.
Pour M. Marzouki et son équipe d’avocats, il resterait « légitime » jusqu’au second tour de la présidentielle. Par contre, ses rivaux, notamment Nidaa Tounes et leur chef Béji Caid Essebsi, estimaient que le président a vu sa mission s’achever avec les élections législatives du 26 octobre, avis partagé avec le quartet du Dialogue national. Ainsi, chacun apportait son exégèse de la Constitution tunisienne.
Mise en place d’une instance provisoire aux pouvoirs limités
D’après la juge Raoudha Karafi, il faudra attendre au moins un an le temps que la Cour constitutionnelle, supposée avoir une fonction d’ « arbitrage », soit mise en place.
Selon la juge, également présidente de la prestigieuse Association des Magistrats Tunisiens, dans le projet de Constitution du 1er juin 2014, il revenait au Tribunal administratif de contrôler la constitutionnalité. Mais ce contrôle lui a été ôté comme il a été ôté à tous les tribunaux. Car dans les dispositions transitoires de la constitution, les tribunaux de l’ordre judiciaire et le Tribunal administratif ont été interdits de contrôler la constitutionnalité.
Ensuite, il y a eu la mise en place d’une instance provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des projets de lois, mais avec des pouvoirs limités (Cf. art. 148 – alinéa 7 – Dispositions transitoires de la Constitution).
[pull_quote_center]Dans la situation actuelle, nous n’avons pour ainsi dire aucun contrôle sur la constitutionnalité des lois. Il y a un vide institutionnel. [/pull_quote_center]
Pour qu’il y ait Cour constitutionnelle, il faut d’abord un « CSM » !
La mise en place de la Cour constitutionnelle (Cf. Constitution, art. 118-124) dépend de la mise en place de ce qu’on appelle « Conseil supérieur de la magistrature » (CSM), qui doit être installé six mois après les élections législatives, soit au cours du mois d’avril 2015.
Ainsi, il faudra attendre encore six autres mois le temps que cette Cour constitutionnelle puisse être mise en place, soit un an après les élections législatives.