Ce 26 juin où la vie s’est brutalement arrêtée pour 38 personnes sur une plage de Sousse, sous le feu de la Kalachnikov de Seifeddine Rezgui, le bilan déjà dramatique, aurait pu être beaucoup plus lourd, n’eut été le courage de jeunes tunisiens que rien n’avait préparé à cela, pourtant.
En quittant le Marhaba après le massacre, Rezgui se dirigeait vers l’hôtel voisin, son arme à la main pour faire d’autres victimes mais il a eu la surprise de trouver face à lui une chaîne humaine formée par les employés de l’hôtel, bien décidés à ne pas le laisser passer.
Un des animateurs de l’hôtel décrit cet incroyable moment où de concert, neuf hommes se sont mis en ligne et ont fait face au tireur:
«Tu sais que c’est ton destin, le fait d’être tué ou pas ne t’appartient pas. Nous avons érigé une barricade avec nos corps en lui criant qu’il ne passerait pas. Je me suis dit qu’il n’allait pas tirer sur autant de Tunisiens»
Rezgui, sans insister, a fait tranquillement demi-tour et est reparti vers la plage. Ces héros anonymes ont probablement sauvé la vie à plus de 70 personnes.
John Yeoman, passait ses vacances dans l’hôtel voisin du Marhaba Impérial et était présent au moment de l’attaque. Il a été témoin de l’héroïsme de ces civils et il a tenu à ce que la Grande-Bretagne en entier le sache.
Le Daily Mirror, quotidien britannique a interviewé ces hommes, qui, un terrible matin de juin, se sont transformés en boucliers humains.
Jihed travaille à la base nautique depuis 16 ans. Le jour de l’attaque, il se reposait à l’ombre d’un parasol, il faisait chaud et c’était Ramadan. Soudain, des coups de feu déchirent le calme de ce jour d’été et le sable vole sous les balles autour de lui. Sans comprendre mais réalisant le danger, Jihed rampe jusqu’à l’hôtel voisin situé à une cinquantaine de mètres.
«J’entendais le bruit des balles et les cris des gens. Au bout de dix minutes il est sorti du Marhaba et s’est dirigé vers nous. On a décidé de s’interposer. Ces clients, nous les connaissons depuis des années, ils sont devenus des amis et on ne laisse pas mourir ses amis. Quand il s’est approché je lui ai demandé pourquoi il faisait ça et je l’ai supplié d’arrêter. Mais il n’a eu aucune réaction. Il avait l’air drogué. Arrivé à 15-20 mètres de nous, il a fait demi-tour. Pendant ce temps, les touristes derrière nous avaient eu le temps de fuir la plage pour aller se mettre à l’abri»
Le long des terrifiantes 45 minutes, pendant lesquelles le terroriste a tiré sans relâche, l’équipe des sports nautiques a mis à l’abri des dizaines de personnes à l’intérieur de l’hôtel voisin.Ces hommes qui n’ont rien de soldats se sont mis en travers d’un homme armé, ont guidé des dizaines de personnes vers les abris alors même que les tirs continuaient, ont assisté les ambulanciers et porté secours aux blessés. Leur courage a été salué par l’ambassadeur britannique et par le gouvernement tunisien.
Jihed a vu 16 corps sur la plage. Il est sous le choc, depuis. Il n’arrive pas à effacer ces images de sa rétine.
«Je suis musulman et pour les musulmans, la vie est sacrée. Seul Dieu a le droit d’ôter la vie. Cet homme qui a pris la vie de 38 personnes et blessé beaucoup d’autres n’est pas musulman. Ceci n’est pas l’Islam ».