Hier, Ă l’occasion de l’examen de deux projets d’emprunts extĂ©rieurs par la commission des finances, de la planification et du dĂ©veloppement relevant de l’AssemblĂ©e constituante, les dĂ©putĂ©s ont Ă©voquĂ© la situation confuse dans laquelle se trouve l’Institut national des statistiques (INS) depuis la mise Ă l’écart de son directeur gĂ©nĂ©ral, Slaheddine SaĂŻdi. Ce dernier a Ă©tĂ© contactĂ© au dĂ©but de cette semaine par le directeur de cabinet du ministre du dĂ©veloppement rĂ©gional et de la Planification qui lui a signifiĂ© verbalement son limogeage sans lui expliquer les motifs de la dĂ©cision. La manière avec laquelle la dĂ©cision a Ă©tĂ© prise a suscitĂ© des interrogations et des extrapolations qui ont trouvĂ© Ă©cho dans la presse Ă©crite nationale. En rĂ©action Ă cette mĂ©diatisation, le chef du cabinet a prĂ©cisé qu’il n’a rien donnĂ© par Ă©crit, mais il n’a pas dĂ©menti l’information. Nous avons contacté le directeur gĂ©nĂ©ral de l’INS et d’autres personnes concernĂ©es par ce dossier pour en savoir plus.
5,7 % de taux d’inflation ne plaĂ®t pas Ă l’autorité ?
Parmi les interprétations avancées par lesdites personnes, se dégage le constat suivant : depuis la révolution du 14 janvier et sur instructions de la tutelle, l’Institut publie des communiqués sans les soumettre à l’approbation du ministère. On y trouve des chiffres et des données qui semblent déranger. Le dernier communiqué fait état d’un taux d’inflation de 5,7 %. Ces données sont de nature à rejaillir sur la crédibilité du gouvernement, surtout à l’approche des échéances électorales.
Toutefois, la mĂ©sentente entre le ministère de tutelle et la direction gĂ©nĂ©rale de l’Institut qui remonte Ă l’annĂ©e dernière, bien avant la dĂ©signation de l’actuel ministre, serait l’origine de tous les maux.
En octobre 2011, un conflit social s’est déclenché comme dans la plupart des grandes entreprises, des établissements publics et des départements ministériels au sujet de la situation précaire des intérimaires et de leur statut juridique. Un accord a été conclu entre les partenaires sociaux pour régulariser leur situation. Malgré cet accord, le syndicat de base a maintenu la pression. Par la suite, le syndicat a reproché au directeur général de procéder à des nominations sans le consulter, ce qui a entraîné un nouveau conflit dans l’Institut. L’ancien ministre, Abdelhamid Triki, a demandé à Slaheddine Saïdi de calmer le jeu.
L’INS serait un des obstacles pour l’obtention des lignes de crĂ©dits extĂ©rieures !
Après la nomination du nouveau ministre, le directeur gĂ©nĂ©ral de l’Institut l’a sollicitĂ© Ă plusieurs reprises pour une entrevue afin de lui expliquer la situation qui se prĂ©sente et lui faire part de ses propositions. Il a Ă©tĂ© reçu une première fois par le ministre qui l’a rassurĂ© quant au soutien qu’il lui apporterait. Puis il a Ă©tĂ© convoquĂ© une seconde fois non pas pour l’écouter et Ă©changer avec lui sur la manière de rĂ©soudre les problèmes, mais pour lui reprocher, sans lui donner l’occasion de s’expliquer, des dĂ©faillances qui auraient bloquĂ© l’accès Ă une ligne de crĂ©dit auprès de la Banque Mondiale.
Depuis, le torchon brûle entre le ministre et son chef de cabinet d’une part et le directeur général de l’autre. Ce dernier n’a pas été autorisé à  participer aux travaux de la Commission de statistique des Nations Unies, tenus au mois de février 2012. Et ce, malgré l’invitation qui lui a été faite par l’ONU pour présenter une intervention au nom de la Tunisie sur les statistiques et le Printemps arabe. Le ministre lui a suggéré de déléguer sa place à  un jeune comme s’il s’agissait de participer à un banal séminaire de formation.
De mĂŞme, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de reporter sine die une journĂ©e de communication prĂ©vue le 4 avril 2012 sur le thème de la nouvelle approche en matière de statistiques, le nouveau logo et le programme de modernisation de l’Institut. Le ministre conviĂ© Ă cette journĂ©e pour prononcer une allocution inaugurale n’a pas donnĂ© suite Ă l’invitation.
Du cĂ´tĂ© du ministère rien n’a filtrĂ© au sujet de ces conflits Ă part une confĂ©rence de presse prĂ©vue le lundi Ă venir. Selon certains, le ministre annoncerait au cours de cette confĂ©rence la fusion entre l’INS et l’Institut tunisien de la compĂ©titivitĂ© et des Ă©tudes quantitatives. Au cas oĂą elle serait prise, cette dĂ©cision sera une manière Ă©lĂ©gante d’officialiser le limogeage du directeur gĂ©nĂ©ral.