Une peine incommensurable s’est emparée des cœurs et des consciences face à la cruelle équation qui taraude le Moyen-Orient. Voici le point de vue d’un simple individu.
Je suis un simple individu. Je n’ai jamais cessé de répéter que j’étais un simple individu, sans aucune importance collective. Je ne représente personne, je ne parle au nom de personne et ne prétends nullement dire ou écrire autre chose que mon ressenti propre.
Je lis beaucoup les philosophes stoïciens et il m’arrive d’écrire de brefs poèmes méditatifs. J’entends la clameur du monde et ne vacille pas dans mes convictions. La philosophie m’a appris à douter de ce qui peut paraître évident.
Dans cet esprit, Aldous Huxley nous apprend que « la propagande, au contraire, nous enseigne à accepter pour évident ce dont il serait raisonnable de douter ».
En ce moment, je relis mes brefs poèmes de « Suite Soufie » parce que j’ai la faiblesse de me réfugier dans la poésie quand montent les clameurs guerrières et pullulent les arlequins mortifères.
Je n’ai pas manifesté. Je n’ai pas argumenté. Je n’ai pas avancé de nuances inaudibles ni d’analyses savantes. Le plus important à mes yeux, consisterait à sortir de ces impasses sanglantes qui meurtrissent notre humanité.
J’ai donc continué à écrire. Sans céder à des haines grégaires ou des compassions circonstancielles. J’ai simplement continué à écrire alors que flottaient autour de ma conscience, les relents de milliers de cadavres.
Écrire pour exprimer le désarroi qui s’est emparé de moi, simple individu aux prises avec l’emballement des colères, simple individu qui refuse de se laisser enfermer dans l’identité qui lui est assignée, simple individu aux prises avec les schèmes réducteurs puisque le temps n’est pas aux nuances mais aux alignements martiaux.
Ces milliers de victimes me taraudent, me tuent littéralement. Peut-on se taire lorsque se déchaînent les barbaries et sonnent les glas de la paix ? Doit-on s’aligner lorsqu’on sait que les deux belligérants ont à la fois tort et raison, confinés dans des dénis réciproques et la dérisoire dialectique de l’œuf qui précédait la poule ? Ne doit-on pas plutôt espérer, parier, oser, plaider, défendre la paix ?
Je suis très peiné. Comme peut l’être un simple humain qui voit se fracasser une aspiration à la paix et les horizons s’assombrir. Je suis également atterré par les amalgames réducteurs et les haros belliqueux qui préfigurent de macabres comptabilités.
Dans ces carrousels du mourir-ensemble, la tentation est grande de se réfugier dans la prière, le silence, la lecture et l’écriture.