La 6ème édition du Festival du Film d’El Gouna (GFF), qui s’est déroulée exceptionnellement du 14 au 21 décembre 2023, a été marquée par un panel très intéressant intitulé « Pleins feux sur la nouvelle génération ».
Les intervenants, dont la réalisatrice égyptienne Kawtar Younes, le directeur de la photographie Mostafa Sheshtawy, la réalisatrice libano-américaine Jude Shehab, et la scénariste égyptienne Farida Zahran, ont partagé leurs expériences devant une salle pleine de jeunes passionnés.
Ce panel se situe en plein dans l’objectif du Festival du Film d’El Gouna, qui va au-delà de la simple célébration du cinéma, visant à favoriser les rencontres entre jeunes talents et professionnels établis. Ces échanges enrichissants créent des liens professionnels fructueux, permettant aux nouveaux arrivants de bénéficier de la sagesse des vétérans.
Les panélistes ont commencé par des présentations personnelles, offrant un aperçu de leur parcours dans l’industrie cinématographique. Thuraya Ismail, modératrice et experte en développement humain, a dirigé la discussion en posant des questions pertinentes aux panelistes.
Présentation des panélistes :
Thuraya Ismail
Mentor Arabia est une filiale de Mentor et a pour but de prévenir les enfants de tout acte dangereux ou addiction, et à travers des films, nous arrivons à faire parvenir notre voix aux enfants.
Farida Zahran
Je suis une artiste… j’espère. Je suis scénariste et réalisatrice et je suis surtout une femme.
Kawthar Younis
Réalisatrice depuis 14 ans en tant qu’assistante et ensuite j’ai fait mon premier film qui a eu un énorme succès et a changé ma vie. J’avais 22 ans et je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. J’ai continué pendant de nombreuses années à être assistante parce que mon plus gros problème est que je ne trouvais pas de producteur. C’est pour cela que j’ai alors décidé de travailler comme productrice, j’ai travaillé avec Netflix. J’étais devenue donc une productrice professionnelle et j’ai aimé cela parce que ma permit de travailler dans le cinéma selon plusieurs angles. Et c’est ce qui permet d’apprendre encore plus.
Mostafa Sheshtawy
Directeur photographie, j’ai commencé en tant que scénariste et réalisateur. Lorsque j’ai fait mon premier court métrage, j’ai compris que ce n’était pas ce que j’aimais, je suis devenu donc directeur de la photographe et c’est ce que j’aime. Je voulais aussi devenir un enseignant et je le suis devenu.
Jude Chehab
J’ai travaillé en tant que directeur de la photographie, mais j’ai ensuite réalisé mon premier court.
Réponses aux questions posées par Thuraya Ismail
Farida Zahran, en tant qu’égyptienne résidente aux USA, qui est ton public?
En fait, j’ai été élevée au Qatar, et je me suis souvent posée cette question. Je pense que l’identité est la même peu importe où l’on soit. Étant à New York, il est vrai que je serais vue par un certain public, et ils attendent sûrement quelque chose. Moi je veux raconter mes histoires et les histoires de mon peuple et peu importe comment on me voit. J’essaye de prendre les distances parfois.
Mostafa Sheshtawy, comment es-tu devenu directeur de la photographie ?
Dans ma vie, j’ai eu plusieurs mentors. Lorsque j’étais jeune, une Égyptienne m’avait dit que mes photos étaient cinématographiques alors qu’à l’époque j’étais photographe reporter. Elle a d’ailleurs été celle qui m’a amené mon premier emploi comme photographe cinéma. D’autres personnes m’ont aidé pendant toute ma vie, je suis chanceux.
Kawthar Younis, quelle est la personne qui vous a le plus influencée ?
Mon père est la personne qui m’a le plus influencée, il m’a appris à ressentir, et c’est la plus chose importante et qui m’a servi dans mon métier. Je suis membre d’une association féminine, et nous aidons beaucoup des gens et parrainons de nouveaux talents.
Jude Shehab, tu as beaucoup collaboré avec des ONG humanitaires. Quelle est la différence avec les films que tu fais ?
Toutes ces expériences apprennent des choses. J’ai appris à regarder les histoires d’un certain angle, plus humanitaire je pense.
Farida Zahran, le feuilleton Rami a été un énorme succès. Pourquoi as-tu fait ce feuilleton et comment expliquer le succès?
Je ne vais pas pas m’attibuer beaucoup de mérite, le succès de ce feuilleton revient surtout à l’acteur Ramy lui-même. Je pense que c’est juste que je me suis trouvée au bon endroit et au bon moment. J’ai fait la connaissance d’une personne qui a parlé de moi à Ramy et qui m’a demandé de lui envoyer mon court. Ils devaient faire la saison 2, ils m’ont demandé. Mais les discussions ont duré deux ans, et je n’ai commencé à travailler sur ce feuilleton qu’à partir de la saison 3.
Mostafa Sheshtawy, tu as travaillé sur le film Courrier Certifié (2019) qui parle de la dépression post-partum. Comment as-tu eu cette idée?
J’ai travaillé sur ce film dès le début. Je suis le photographe. Hisham Saqr, le scénariste et réalisateur est un homme qui a fait beaucoup de recherches sur ce sujet. Il voulait que toute l’équipe comprenne ce problème et que nous puissions faire arriver ce sentiment au public.
Kawthar Younis, ton film Sahbety/Mon amie (2022) a été sélectionné au Festival de Venise et a gagné plein de prix dans plusieurs autres festivals, pourquoi ?
Mes films qui ont précédé étaient des films qui racontaient des expériences personnelles, le premier par exemple parlait de mon père. J’étais donc à chaque fois dans le film, et cela était très fatigant émotionnellement, le processus étant très difficile parce que ces films étaient très personnels. Ensuite j’ai décidé de faire un film qui ne me concerne pas du tout. J’ai fait donc un film qui raconte une histoire de gens que je ne connais pas et j’étais contente de ne pas être concernée par cette histoire. Pendant le confinement j’ai l’idée de Sahbety. Je me suis posée la question: comment est-ce qu’un jeune homme pourrait aller voir son amie chez elle sans que ses parents s’en aperçoivent?
Je n’aurais jamais cru que Sahbety irait à Venise. J’ai d’ailleurs produit le film moi-même parce que je ne pensais pas que des gens pourraient financer un tel film. C’est le monteur qui a proposé d’envoyer le film à Venise, je n’y croyais pas du tout. Lorsqu’il a été sélectionné, j’ai pensé qu’il ne serait pas en compétition. Ensuite j’ai d’ailleurs épousé ce monteur qui dit que la fille du film me ressemble et qu’elle est moi.
Jude Shehab, ton film Q (2023) est personnel et raconte ton histoire familiale.
C’est un documentaire sur ma mère et ma grand-mère et leur relation avec un groupe islamiste. J’ai toujours ressenti que faire ce film est une responsabilité. Chez les musulmans, il y a des groupes qui veulent interpréter la religion comme ils l’entendent et imposer cette interprétation sur les autres. C’est une histoire personnelle donc je pense que de cette manière il y a eu plus d’émotions. Mais je voulais partager cette expérience, même si à ce jour, nous subissons encore les conséquences.
Farida Zahran, ton film à propos du harcèlement sexuel Banat Ekher Zaman (2019) a été jusqu’aux Oscars.
Non, il a été uniquement qualifié pour les Oscars. C’était la première fois que je tournais en Égypte et je ne connaissais personne, je me demandais quelle histoire simple je pourrais raconter et qui raconterait ma relation avec la ville.
Mostafa Sheshtawy, à quel point l’objectif d’un photographe peut faire parvenir une émotion et une image?
Je pense que ce qui me fait bouger est l’histoire avant l’image. Nos films sont de plus en plus réalistes. Parfois les fictions deviennent presque des documentaires. La nouvelle génération s’est habituée au fait que l’image actuelle est très réaliste. Pour nous, un film comme Marvel est du cinéma irréel.
Kawthar Younis, Un cadeau du passé (2016) a été ton premier film. Raconte-nous.
C’est l’histoire de mon père, auquel j’ai offert une bague pour qu’il puisse l’offrir à la femme qu’il aimait. Nous en avons fait un film, qui a été sélectionné dans plusieurs festivals, qui a eu du succès au cinéma et c’est ce qui a changé ma vie.
Exploration enrichissante de la créativité cinématographique contemporaine
La diversité des expériences, des genres de films, et des thèmes abordés par les panélistes a rendu ce panel « Pleins feux sur : la nouvelle génération » une exploration enrichissante de la créativité cinématographique contemporaine. Ces talents émergents et confirmés ont non seulement partagé leurs histoires inspirantes mais ont également offert des aperçus précieux sur l’évolution de l’industrie cinématographique.
En somme, le panel a offert une immersion captivante dans les esprits créatifs qui façonnent l’avenir du cinéma. Des histoires personnelles aux succès éclatants, chaque intervenant a apporté une nuance unique à la discussion, offrant un regard riche sur la diversité et la créativité florissante de la nouvelle génération du cinéma. L’interaction entre les générations a créé une dynamique inspirante, ouvrant des horizons pour les futurs conteurs d’histoires cinématographiques. L’événement a brillamment capturé la passion, la persévérance, et l’innovation qui définissent l’industrie cinématographique contemporaine.
Neïla Driss
La 6ème édition du Festival du Film d’El Gouna (GFF), qui s’est déroulée exceptionnellement du 14 au 21 décembre 2023, a été marquée par un panel très intéressant intitulé « Pleins feux sur la nouvelle génération ».
Les intervenants, dont la réalisatrice égyptienne Kawtar Younes, le directeur de la photographie Mostafa Sheshtawy, la réalisatrice libano-américaine Jude Shehab, et la scénariste égyptienne Farida Zahran, ont partagé leurs expériences devant une salle pleine de jeunes passionnés.
Ce panel se situe en plein dans l’objectif du Festival du Film d’El Gouna, qui va au-delà de la simple célébration du cinéma, visant à favoriser les rencontres entre jeunes talents et professionnels établis. Ces échanges enrichissants créent des liens professionnels fructueux, permettant aux nouveaux arrivants de bénéficier de la sagesse des vétérans.
Les panélistes ont commencé par des présentations personnelles, offrant un aperçu de leur parcours dans l’industrie cinématographique. Thuraya Ismail, modératrice et experte en développement humain, a dirigé la discussion en posant des questions pertinentes aux panelistes.
Présentation des panélistes :
Thuraya Ismail
Mentor Arabia est une filiale de Mentor et a pour but de prévenir les enfants de tout acte dangereux ou addiction, et à travers des films, nous arrivons à faire parvenir notre voix aux enfants.
Farida Zahran
Je suis une artiste… j’espère. Je suis scénariste et réalisatrice et je suis surtout une femme.
Kawthar Younis
Réalisatrice depuis 14 ans en tant qu’assistante et ensuite j’ai fait mon premier film qui a eu un énorme succès et a changé ma vie. J’avais 22 ans et je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. J’ai continué pendant de nombreuses années à être assistante parce que mon plus gros problème est que je ne trouvais pas de producteur. C’est pour cela que j’ai alors décidé de travailler comme productrice, j’ai travaillé avec Netflix. J’étais devenue donc une productrice professionnelle et j’ai aimé cela parce que ma permit de travailler dans le cinéma selon plusieurs angles. Et c’est ce qui permet d’apprendre encore plus.
Mostafa Sheshtawy
Directeur photographie, j’ai commencé en tant que scénariste et réalisateur. Lorsque j’ai fait mon premier court métrage, j’ai compris que ce n’était pas ce que j’aimais, je suis devenu donc directeur de la photographe et c’est ce que j’aime. Je voulais aussi devenir un enseignant et je le suis devenu.
Jude Chehab
J’ai travaillé en tant que directeur de la photographie, mais j’ai ensuite réalisé mon premier court.
Réponses aux questions posées par Thuraya Ismail
Farida Zahran, en tant qu’égyptienne résidente aux USA, qui est ton public?
En fait, j’ai été élevée au Qatar, et je me suis souvent posée cette question. Je pense que l’identité est la même peu importe où l’on soit. Étant à New York, il est vrai que je serais vue par un certain public, et ils attendent sûrement quelque chose. Moi je veux raconter mes histoires et les histoires de mon peuple et peu importe comment on me voit. J’essaye de prendre les distances parfois.
Mostafa Sheshtawy, comment es-tu devenu directeur de la photographie ?
Dans ma vie, j’ai eu plusieurs mentors. Lorsque j’étais jeune, une Égyptienne m’avait dit que mes photos étaient cinématographiques alors qu’à l’époque j’étais photographe reporter. Elle a d’ailleurs été celle qui m’a amené mon premier emploi comme photographe cinéma. D’autres personnes m’ont aidé pendant toute ma vie, je suis chanceux.
Kawthar Younis, quelle est la personne qui vous a le plus influencée ?
Mon père est la personne qui m’a le plus influencée, il m’a appris à ressentir, et c’est la plus chose importante et qui m’a servi dans mon métier. Je suis membre d’une association féminine, et nous aidons beaucoup des gens et parrainons de nouveaux talents.
Jude Shehab, tu as beaucoup collaboré avec des ONG humanitaires. Quelle est la différence avec les films que tu fais ?
Toutes ces expériences apprennent des choses. J’ai appris à regarder les histoires d’un certain angle, plus humanitaire je pense.
Farida Zahran, le feuilleton Rami a été un énorme succès. Pourquoi as-tu fait ce feuilleton et comment expliquer le succès?
Je ne vais pas pas m’attibuer beaucoup de mérite, le succès de ce feuilleton revient surtout à l’acteur Ramy lui-même. Je pense que c’est juste que je me suis trouvée au bon endroit et au bon moment. J’ai fait la connaissance d’une personne qui a parlé de moi à Ramy et qui m’a demandé de lui envoyer mon court. Ils devaient faire la saison 2, ils m’ont demandé. Mais les discussions ont duré deux ans, et je n’ai commencé à travailler sur ce feuilleton qu’à partir de la saison 3.
Mostafa Sheshtawy, tu as travaillé sur le film Courrier Certifié (2019) qui parle de la dépression post-partum. Comment as-tu eu cette idée?
J’ai travaillé sur ce film dès le début. Je suis le photographe. Hisham Saqr, le scénariste et réalisateur est un homme qui a fait beaucoup de recherches sur ce sujet. Il voulait que toute l’équipe comprenne ce problème et que nous puissions faire arriver ce sentiment au public.
Kawthar Younis, ton film Sahbety/Mon amie (2022) a été sélectionné au Festival de Venise et a gagné plein de prix dans plusieurs autres festivals, pourquoi ?
Mes films qui ont précédé étaient des films qui racontaient des expériences personnelles, le premier par exemple parlait de mon père. J’étais donc à chaque fois dans le film, et cela était très fatigant émotionnellement, le processus étant très difficile parce que ces films étaient très personnels. Ensuite j’ai décidé de faire un film qui ne me concerne pas du tout. J’ai fait donc un film qui raconte une histoire de gens que je ne connais pas et j’étais contente de ne pas être concernée par cette histoire. Pendant le confinement j’ai l’idée de Sahbety. Je me suis posée la question: comment est-ce qu’un jeune homme pourrait aller voir son amie chez elle sans que ses parents s’en aperçoivent?
Je n’aurais jamais cru que Sahbety irait à Venise. J’ai d’ailleurs produit le film moi-même parce que je ne pensais pas que des gens pourraient financer un tel film. C’est le monteur qui a proposé d’envoyer le film à Venise, je n’y croyais pas du tout. Lorsqu’il a été sélectionné, j’ai pensé qu’il ne serait pas en compétition. Ensuite j’ai d’ailleurs épousé ce monteur qui dit que la fille du film me ressemble et qu’elle est moi.
Jude Shehab, ton film Q (2023) est personnel et raconte ton histoire familiale.
C’est un documentaire sur ma mère et ma grand-mère et leur relation avec un groupe islamiste. J’ai toujours ressenti que faire ce film est une responsabilité. Chez les musulmans, il y a des groupes qui veulent interpréter la religion comme ils l’entendent et imposer cette interprétation sur les autres. C’est une histoire personnelle donc je pense que de cette manière il y a eu plus d’émotions. Mais je voulais partager cette expérience, même si à ce jour, nous subissons encore les conséquences.
Farida Zahran, ton film à propos du harcèlement sexuel Banat Ekher Zaman (2019) a été jusqu’aux Oscars.
Non, il a été uniquement qualifié pour les Oscars. C’était la première fois que je tournais en Égypte et je ne connaissais personne, je me demandais quelle histoire simple je pourrais raconter et qui raconterait ma relation avec la ville.
Mostafa Sheshtawy, à quel point l’objectif d’un photographe peut faire parvenir une émotion et une image?
Je pense que ce qui me fait bouger est l’histoire avant l’image. Nos films sont de plus en plus réalistes. Parfois les fictions deviennent presque des documentaires. La nouvelle génération s’est habituée au fait que l’image actuelle est très réaliste. Pour nous, un film comme Marvel est du cinéma irréel.
Kawthar Younis, Un cadeau du passé (2016) a été ton premier film. Raconte-nous.
C’est l’histoire de mon père, auquel j’ai offert une bague pour qu’il puisse l’offrir à la femme qu’il aimait. Nous en avons fait un film, qui a été sélectionné dans plusieurs festivals, qui a eu du succès au cinéma et c’est ce qui a changé ma vie.
Exploration enrichissante de la créativité cinématographique contemporaine
La diversité des expériences, des genres de films, et des thèmes abordés par les panélistes a rendu ce panel « Pleins feux sur : la nouvelle génération » une exploration enrichissante de la créativité cinématographique contemporaine. Ces talents émergents et confirmés ont non seulement partagé leurs histoires inspirantes mais ont également offert des aperçus précieux sur l’évolution de l’industrie cinématographique.
En somme, le panel a offert une immersion captivante dans les esprits créatifs qui façonnent l’avenir du cinéma. Des histoires personnelles aux succès éclatants, chaque intervenant a apporté une nuance unique à la discussion, offrant un regard riche sur la diversité et la créativité florissante de la nouvelle génération du cinéma. L’interaction entre les générations a créé une dynamique inspirante, ouvrant des horizons pour les futurs conteurs d’histoires cinématographiques. L’événement a brillamment capturé la passion, la persévérance, et l’innovation qui définissent l’industrie cinématographique contemporaine.
Neïla Driss