Lors de la 44e édition du Festival International du Film du Caire, qui s’est déroulée du 13 au 22 novembre 2022, le public a été captivé par la sélection de deux films belges remarquables, centrés sur l’univers des enfants et des adolescents : L’amour selon Dalva réalisé par Emmanuelle Nicot et Close par Lukas Dhont.
Sélectionné en compétition internationale, L’amour selon Dalva a remporté deux prix : La Pyramide d’Argent et le Prix de la Meilleure actrice pour la jeune Zelda Samson. Close par contre était en sélection hors compétition.
Ces deux œuvres cinématographiques avaient déjà brillé à Cannes, témoignant de leur qualité artistique : L’amour selon Dalva a marqué la Semaine de la Critique en remportant trois prix : le Prix FIPRESCI de la critique internationale, le Rail d’Or, ainsi que le Prix Louis Roederer de la révélation, distinction attribuée à la jeune Zelda Samson. De son côté, Close a été sélectionné en compétition officielle, récoltant le Grand Prix ex-aequo, bien qu’il aurait mérité davantage, notamment une récompense pour la performance remarquable du jeune Eden Dambrine. Ces deux films, empreints d’émotions saisissantes, évoquent également un autre long métrage belge remarquable, Un monde, réalisé par Laura Wandel, présenté à Cannes en 2021 dans la section Un certain regard où il avait remporté le Prix FIPRESCI de la critique Internationale.
Au cœur du film L’amour selon Dalva, Emmanuelle Nicot a abordé avec une sensibilité exceptionnelle le délicat sujet de l’inceste. Le film suit Dalva, une jeune fille de 12 ans, victime d’abus sexuels de la part de son propre père, qui lui faisait croire que ces relations sexuelles étaient une manière de s’aimer et de se montrer leur amour réciproque. Conditionnée pendant des années, Dalva a bien du mal à voir la réalité en face.
Comment se reconstruire lorsque le monde qu’elle connait s’écroule et qu’elle découvre qu’elle a été dupée, que l’une des personnes censées la protéger et l’aimer a abusé d’elle ? Comment redevenir une enfant lorsque pendant plusieurs années, son père s’est comporté avec elle comme si elle était une adulte ? Outre la transformation physique de la jeune Davla que son papa « déguisait » en adulte, on assiste également à sa transformation psychologique, par des petits gestes, des mots… La carapace se fissure, apparaît une enfant apeurée, arrachée à la seule source d’amour qu’elle avait jusqu’alors . À qui faire confiance ? Qui croire ? Comment appréhender les autres hommes qui gravitent autour d’elle, ses camarades ou son éducateur? La reconstruction est lente et douloureuse.
De son côté, Close réalisé par Lukas Dhont, explore le parcours d’un jeune adolescent face aux regards scrutateurs des autres. Le protagoniste apprend progressivement à gérer les jugements extérieurs, et également doit faire face à la réalité du deuil et à la culpabilité.
Un monde, réalisé par Laura Wandel, aborde le thème du harcèlement au sein de l’école d’une manière délicate et réaliste. Le film suit Nora, une jeune écolière, aux prises avec le harcèlement dont son frère Abel est victime. Tiraillée entre son désir de s’intégrer, les attentes de son père et les demandes de son frère de garder le silence, Nora se retrouve dans une situation de conflit intérieur. Un monde offre une plongée immersive dans le monde de l’école à travers les yeux d’une enfant, exposant les dynamiques complexes et parfois cruelles qui y règnent.
Un point commun majeur unit ces trois films : une profonde sensibilité émotionnelle. Chacune de ces œuvres cinématographiques permet avec brio de capturer et transmettre une gamme d’émotions complexes, offrant ainsi au public une immersion totale dans le monde intérieur des enfants et des adolescents. Cette caractéristique partagée se révèle particulièrement touchante, car elle permet aux spectateurs de vivre ces histoires à travers les yeux de leurs jeunes protagonistes. Les trois films sont empreints d’une émotion sincère qui imprègne chaque scène et chaque interaction. Ils s’efforcent de saisir l’essence de l’expérience enfantine, explorant les défis et les triomphes avec une compréhension aiguë et une empathie palpable. Les réalisateurs ont adopté une approche attentive : se concentrer sur les détails qui présentent les émotions intérieures des personnages et produisent leurs histoires universellement ressenties. Cette exploration profonde des émotions et des expériences de ces jeunes protagonistes contribue à faire de L’amour selon Dalva, Close et Un monde des films qui touchent le cœur et l’âme de tous ceux qui ont la chance de les découvrir sur grand écran.
Un élément crucial de ces films est la performance des jeunes acteurs, qui apporte une authenticité et une sincérité touchantes à leurs personnages. Leur interprétation contribue grandement à la création et à la profondeur émotionnelle de chaque récit. À travers leurs talents, ces acteurs parviennent à transmettre les nuances émotionnelles et les défis intérieurs auxquels leurs personnages sont confrontés, sans déployer des artifices excessifs. Ils auraient tous les trois mérités de remporter plusieurs prix de meilleure interprétation.
Neïla Driss