En cette pĂ©riode de l’annĂ©e, le MarchĂ© central de Tunis accueille des maĂ®tres ès effluves qui, comme des hirondelles du parfum, annoncent le printemps.
Chaque annĂ©e, Ă pareille Ă©poque, ils se retrouvent – femmes et hommes – dans une allĂ©e qui leur est spĂ©cialement rĂ©servĂ©e et reste dans leur attente tout au long de l’annĂ©e.
C’est presque au centre gĂ©ographique du marchĂ© que ces tĂ©moins d’une floraison subreptice s’installent, avec des Ă©tals Ă mĂŞme le sol, qui regorgent de couleurs et de senteurs.
C’est la saison de la fleur d’oranger, de gĂ©ranium ou de rose. C’est un marchĂ© unique, exceptionnel qui se tient seulement pour quelques semaines.
Les chalands sont nombreux, les produits bigarrĂ©s et les effluves vous entĂŞtent dès que vous faites un pas dans cette allĂ©e oĂą l’on se bouscule.Ils sont nombreux celles et ceux qui sont venus ici en quĂŞte d’un bouquet de gĂ©ranium ou de quelques kilos de pĂ©tales de roses ou de fleurs d’orangers.
VĂ©ritable Ă©blouissement des sens, moment jouissif et souvent proustien, la remontĂ©e de ce souk est de l’ordre de la jubilation lorsqu’on a grandi bercĂ© par ces parfums.On vient donc ici acheter ce qui vous servira ensuite Ă crĂ©er des Ă©lixirs, des extraits qui surgiront de l’alambic domestique et iront remplir les « fechkas » de notre tradition, ces prĂ©cieuses bouteilles pleines de « zhar », « atrchiya » et « ma ouard » qui dĂ©signent respectivement l’eau de fleur d’oranger, l’eau de fleur de gĂ©ranium et l’eau de rose.
Après une rapide inspection des lieux et de tout aussi brèves palabres, on repart avec de gros bouquets et des sacs pleins pour, leur donner un nouveau destin d’Ă©lixir qu’on utilisera une annĂ©e durant.
Une goutte d’eau de fleur d’oranger dans un cafĂ© ou dans une pâtisserie et c’est tout un art de vivre qui remonte Ă la surface.
C’est ici, en plein printemps, que ce marchĂ© aux effluves nous convoque. Et ce rendez-vous, il convient de ne pas le manquer…