C’est l’horreur absolue, un abominable holocauste, un geste d’une sauvagerie inouĂŻe.
Si ce que rĂ©vèlent les journalistes d’Al Jazeera s’avère bien rĂ©el, nous serions projetĂ©s dans l’inhumain, l’innommable, la barbarie la plus abjecte.
Voici la loi du talion dans toute sa terrible signification ! Des diplomates saoudiens et leurs hommes de main auraient crapuleusement assassinĂ© un journaliste pris au piège d’une visite Ă son consulat, abattu puis dĂ©pecĂ© et probablement, si l’on entre dans cette logique abjecte, jetĂ© aux chiens.
Et dire que les supposés responsables de ce crime atroce sont des bons musulmans, qui font leurs cinq prières et sacrifient au rigorisme wahabite qui prétend donner des leçons aux autres musulmans.
Et dire que ceux qui les dĂ©noncent, Ă partir d’une chaĂ®ne du Qatar, ne sont pas des enfants de chĹ“ur mais bel et bien des ennemis circonstanciels qui, au fond, obĂ©issent aux mĂŞmes rĂ©flexes grĂ©gaires, aux atavismes violents de toute cette rĂ©gion.
Terrible constatation: un homme a Ă©tĂ© dĂ©pecĂ©, peut-ĂŞtre massacrĂ© Ă la tronçonneuse, Ă©masculĂ©, ses viscères rĂ©pandus, son corps atrocement mutilĂ© Ă cause de ses positions politiques, parce qu’il Ă©tait un journaliste libre (ou presque), parce que Dieu l’aurait voulu.
De quelle humanitĂ© pouvons-nous nous proclamer si nous nous taisons devant pareil crime qui nous renvoie au temps oĂą l’on buvait le sang de son adversaire après avoir mangĂ© symboliquement son cĹ“ur ? Quelles horreurs se cachent encore derrière cette exĂ©cution sommaire dans les locaux d’une ambassade?
Quel crĂ©dit accorder Ă ce qu’affirment savoir les journalistes d’Al Jazeera ? Car tout indignĂ©s que nous soyons, nous n’oublions pas les manipulations et mensonges de cette chaĂ®ne qui a Ă©pousĂ© depuis longtemps la cause des Frères musulmans et n’a jamais fait dans la dentelle quand il s’agissait de pourfendre un ennemi.
Une irrĂ©pressible nausĂ©e m’accompagne depuis quelques jours, depuis la rĂ©vĂ©lation de cette sinistre affaire et la vulgate mĂ©diĂ©vale qui la structure.
Parce que je suis non seulement journaliste mais aussi Arabe. Parce que ces Arabes du Golfe prĂ©tendent rĂ©genter mon esprit et s’emparer de mon pays au nom de leurs pĂ©trodollars. Parce que des connivences leur ouvrent la voie laissant supposer une barbarie en partage.
Aujourd’hui, plus que jamais, je ne suis pas Saoudien. Aujourd’hui, plus que jamais, je ne suis pas un Arabe (du Golfe).
J’ajoute mĂŞme un hashtag Ă mes cris qui, pour le moment, ne sont pas encore Ă©touffĂ©s.
Je le crie haut et fort: je veux sortir de cette arabitĂ© mĂ©diĂ©vale et de cet Islam barbare qui prĂ©tendent nous apprendre notre religion et parlent au nom d’une race qui se voudrait supĂ©rieure.
N’entrons pas collectivement dans l’inhumanitĂ© et sachons-le, certains directeurs de conscience sont prĂŞt Ă tout pour faire valoir leur puissance.
Cette violence sauvage me terrorise car je la porte dans ma chair de torturé par des intégristes fous et parce que je sais que ceux qui se cachent derrière le salafisme et le jihadisme sont capables de pareils crimes.
N’ont-ils pas mutilĂ© nos soldats ? N’ont-ils pas assassinĂ© aveuglĂ©ment ? Ne le feront-ils pas demain pour quelques pĂ©trodollars de plus et l’illusion d’un dieu clĂ©ment et misĂ©ricordieux ?
Je ne suis pas un Arabe (du Golfe) et ne désire nullement être colonisé par ces roitelets du pétrole à bas prix et de la violence en libre service commise en leur nom par tous les mercenaires et desperados de la planète.
Aujourd’hui, je pense Ă nos ancĂŞtres lointains qui, accueillant les PhĂ©niciens sur leur sol, ont su opĂ©rer une synthèse d’oĂą naĂ®tra la civilisation punique.
Saurons-nous demain Ă notre tour opĂ©rer cette nĂ©cessaire synthèse qui nous sortira de cette illusion d’ĂŞtre Arabes alors que nous ne le sommes pas vraiment ?
Saurons-nous devenir des Tunisiens arabes, africains, mĂ©diterranĂ©ens, voire europĂ©ens et fiers de l’ĂŞtre ?
Arabe, je ne saurais le rester dans le silence complice des dépeceurs et des faussaires de Dieu.
Et cela, je le dis haut et fort pour que l’impression de dĂ©missionner devant l’horreur absolue ne taraude pas ma conscience.
Aujourd’hui, un homme dĂ©pecĂ©, demain des charniers. De quelle humanitĂ© parlons-nous ?