Nous vivons une époque d’intimidations de toutes sortes, d’imprécations fulminantes et de menaces au nom de lectures étriquées du sacré. Cette brutalité et cette violence larvée ont pour but de tuer la liberté d’expression et a posteriori l’idée même de débat démocratique.
Les islamistes (presque) toutes tendances confondues sont passés experts dans ces formes d’intimidation qui consistent à brandir des lignes rouges et engager des procès d’intention à tous ceux qui leur sont différents.
Ce faisant, ils font mine d’oublier qu’ils mettent un frein à la liberté des autres et faussent toute forme de dialogue constructif et de débat démocratique et équitable.
Car si le courage consiste à parfois exprimer ce que la société n’est pas encore prête à entendre, la liberté de le faire et d’exprimer audace et innovation ne peut faire l’objet de campagnes induisant des menaces et des promesses d’autodafés.
C’est vrai, objectivement, il doit y avoir des limites morales à la liberté d’expression. Mais ces limites ne sont-elles pas l’incitation à la violence ou la menace de violences pour que l’autre se taise et que sa pensée, ses idées, ne puissent être exprimées.
Ces intimidations sont une atteinte grave à la liberté d’expression. D’ailleurs, ceux qui les profèrent se placent en dehors de toute forme de débat démocratique. Et de manière récurrente, ceux qui brandissent systématiquement ce type d’intimidations en invoquant blasphème, sacrilège et atteinte au sacré sont justement les secteurs islamistes de l’opinion qui, ce faisant, refusent le débat démocratique et la confrontation des idées pour le progrès de toute la société.
Notre liberté d’expression est inaliénable et tous les arguments – en général fallacieux – en faveur de sa suppression doivent être rejetés.
Ce qui, par contre, doit être systématiquement rejeté, c’est bien l’incitation à la violence et les intimidations qui ne peuvent avoir droit de cité dans une société policée, libre et responsable.
Aux islamistes d’Ennahdha qui prétendaient hier être capables d’absorber le radicalisme des ultras de leur camp, de méditer ces réflexions et agir en conséquence. A eux de nous prouver, dans la pratique, que la duplicité ne saurait être un mode de gouvernement ni une tactique responsable. A eux aussi d’accepter les conséquences de notre vécu commun dans une société libre.
C’est à ce prix que les potentiels assassins de nos libertés se désigneront comme les ennemis et les parias de notre projet démocratique.