Le recensement général de la population et de l’habitat de 2024 confirme une tendance structurelle majeure en Tunisie : près de 75 % des ménages tunisiens sont propriétaires de leur logement, selon les données révélées ce lundi 29 septembre par Abdelkader Talhaoui, directeur technique du recensement à l’Institut national de la statistique (INS).
Invité de la Radio nationale, Talhaoui a précisé que le taux de propriété est plus élevé en milieu rural qu’en milieu urbain. Un contraste qui traduit des réalités sociales et économiques différentes : dans les campagnes, la transmission intergénérationnelle et l’autoconstruction dominent, tandis qu’en ville, l’accès au logement se heurte davantage au coût du foncier et aux prix de l’immobilier.
Un autre chiffre interpelle : le pays compte 825 000 logements inoccupés, dont 200 000 sont classés comme résidences secondaires. Ce volume soulève des questions sur la gestion du parc immobilier en Tunisie, dans un contexte où de larges franges de la population, notamment les jeunes et les ménages à revenus modestes, peinent à trouver un logement abordable dans les grandes agglomérations.
Lecture socio-économique
Cette photographie statistique met en lumière plusieurs paradoxes :
- D’un côté, la Tunisie affiche un taux de propriété parmi les plus élevés de la région, reflet d’une culture de l’investissement dans la pierre, perçue comme valeur refuge.
- De l’autre, les inégalités territoriales persistent : le logement reste plus accessible en zone rurale, mais souvent au prix d’un déficit d’infrastructures et de services publics.
- Enfin, la présence d’un parc vacant aussi massif interroge : comment expliquer qu’un pays à forte demande en logement, surtout social, laisse autant de biens inoccupés ? Les causes vont de la spéculation foncière à l’émigration, en passant par l’absence de politiques de valorisation des logements vacants.
Vers une politique de logement plus cohérente ?
Pour de nombreux économistes, ces données rappellent l’urgence d’une politique plus intégrée du logement : incitations à la réhabilitation, fiscalité sur les résidences inoccupées, et surtout soutien à la construction de logements sociaux et intermédiaires.
En définitive, si le chiffre de 75 % de ménages propriétaires peut paraître rassurant, il ne doit pas occulter les défis : le marché du logement reste déséquilibré, marqué à la fois par une abondance de logements vides et une pénurie d’offres accessibles aux catégories les plus fragiles.
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