En Tunisie, bien que la prise en charge familiale des personnes âgées demeure profondément ancrée dans les traditions culturelles, le pays s’oriente progressivement vers un modèle institutionnalisé, similaire à ceux observés en France ou aux États-Unis.
Cette évolution, dictée par les transformations démographiques et socioéconomiques, marque un tournant significatif dans l’approche tunisienne du vieillissement.
D’ici 2036, un Tunisien sur cinq aura plus de 60 ans
Le 2 mai 2025, le ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Personnes âgées a organisé une importante séance de travail visant à améliorer le cadre réglementaire des établissements de soins pour aînés. Cette initiative s’inscrit dans une démarche plus large d’adaptation aux réalités démographiques du pays, où la population âgée représente désormais 14,2% des habitants, contre 13% en 2018. Les projections indiquent que ce taux atteindra 17% d’ici 2029 et avoisinera les 20% en 2036.
Notre société évolue, et avec elle, nos structures familiales traditionnelles. Si autrefois la prise en charge des aînés relevait exclusivement de la responsabilité familiale, aujourd’hui, l’urbanisation, l’émigration des jeunes et l’entrée massive des femmes sur le marché du travail obligent à repenser ce modèle.
Les autorités ont souligné l’importance d’harmoniser les approches procédurales et sectorielles pour actualiser les cahiers des charges régissant ces établissements, dans le cadre d’une collaboration entre le ministère de la Famille et celui de la Santé. Cette démarche vise également à simplifier les procédures administratives et à encourager l’investissement privé dans ce secteur en pleine expansion.
38 établissements pour 691 résidents : un réseau encore limité
Actuellement, le pays compte 13 établissements publics accueillant 378 résidents (243 hommes et 135 femmes), tandis que le secteur privé gère 25 structures hébergeant 313 personnes âgées. Six nouvelles installations sont en cours de développement dans les régions de Kasserine, Kairouan, Jendouba, Sfax, Ariana et Siliana, témoignant de la volonté gouvernementale d’étendre ce dispositif.
Le taux de dépendance des personnes âgées, qui était de 11,5% en 1966, devrait atteindre 31,8% en 2034, constituant un défi majeur pour les politiques sociales tunisiennes. Face à cette réalité, le gouvernement cherche à développer un modèle hybride qui préserve les valeurs familiales tout en offrant des solutions institutionnelles de qualité.
L’approche tunisienne consiste à adapter ces structures aux spécificités culturelles du pays, où le lien familial reste primordial, tout en répondant aux besoins d’une population vieillissante dans un contexte social en mutation. Cette évolution progressive vers l’institutionnalisation des soins aux personnes âgées marque ainsi une adaptation pragmatique aux défis démographiques, tout en cherchant à préserver l’équilibre délicat entre tradition familiale et modernité sociale.