Dans un monde où les flux touristiques redessinent les cartes du soft power, la Tunisie ose s’aventurer hors des sentiers battus. Pour la première fois, notre pays participe au salon WTM Amérique latine à São Paulo, une présence qui sonne comme un signal : Tunis ne veut plus rester confinée à son pré carré européen.
Les premiers résultats sont là. En 2024, 5 000 touristes brésiliens ont foulé notre sol, soit une hausse de 30 % par rapport à l’avant-Covid, rapporte ANBA, l’agence de presse de la Chambre de commerce arabo-brésilienne. Loin d’un simple frémissement, ce chiffre nourrit une ambition : atteindre 15 000 visiteurs annuels d’ici dix ans. Un cap audacieux mais réaliste, à condition de penser au-delà des slogans.
À la manœuvre, Leila Tekaia, cheffe de mission pour l’Espagne, le Portugal et le Brésil, tisse patiemment les fils de cette nouvelle diplomatie touristique. Sa visite à la Chambre de commerce arabo-brésilienne, aux côtés du consul Hassen Saadani, incarne cette volonté de conjuguer culture, économie et stratégie.
Mais le défi logistique est de taille. Si un quart des visiteurs arrivent aujourd’hui par croisière, ces escales restent fugaces. Quant à Tunisair, en plein chantier de réinvention, elle n’est pas encore en mesure d’assurer des liaisons long-courriers. Il faudra donc, en attendant, miser sur des partenariats aériens alternatifs.
Pour séduire le Brésilien, il faut du rêve. Et la Tunisie en a à revendre : le souffle chaud du désert, les ruelles de Djerba, les vestiges d’un passé millénaire qui parlent à l’âme autant qu’à l’œil. Encore faut-il savoir les raconter, les vendre, les incarner.
Ce tournant vers l’Amérique du Sud n’est pas un simple pari commercial. Il s’agit, pour notre pays, de réinventer son image, d’élargir son horizon, de faire vibrer l’ailleurs en se reconnectant à soi. Le tourisme comme diplomatie douce, comme relais d’influence, comme levier de relance.