Il est en Tunisie pour une semaine pour présenter son roman « Les Vertueux » au public tunisien
Nous vous invitons à découvrir ce texte de l’écrivain algérien Yasmina Khadra. Écrit à l’occasion du Nouvel an 2023, il décline les recommandations et vœux de l’auteur.
« Chères toutes et chers tous, les années passent et se ressemblent. Celle qui frappe à nos portes n’y changera pas grand-chose. I
Il y aura des hauts et des bas, des guerres fratricides et des ennemis réconciliés, des semeurs de joie et des fossoyeurs d’espoirs, des femmes investies dans le lancement d’une sonde spatiale hors du Système solaire et des gourous qui interdiront aux femmes l’accès aux universités, des nations prospères et des peuples sclérosés, des stèles érigées à la gloire des tyrans et des prisons immenses pour de braves innocents… parce que l’Humanité est ainsi faite, à la fois sublime et frustrante, radieuse et enténébrée, perspicace et outrageusement imbécile cependant, en dépit de tous les paradoxes et de tous les extrêmes, il y aura toujours, pour chacun d’entre nous, le choix d’être au coeur de son rêve ou bien à la périphérie de ce qui est essentiel.
Et il n’y a d’essentiel que soi. Si le monde nous déçoit, sachons qu’il n’a jamais été parfait et que la bêtise est la soeur utérine de la présence d’esprit. Si nous ne pouvons pas remédier à ses travers, contentons-nous de ne pas les aggraver. Respirons, espérons, fantasmons, devenons braconniers et traquons notre bonheur comme un précieux gibier.
Il n’y a de vrai, sur terre, que nous-mêmes — c’est-à-dire ce que nous faisons de nous-mêmes à travers le peu de temps que nous accorde l’existence -, le reste n’est qu’une question de mentalité.
Ne gâchons pas nos rares moments de quiétude en nous attardant sur des choses déplaisantes, ne confions à personne notre libre arbitre, et surtout aimons par nous-mêmes, aimons la nature, les livres, les Arts, les champions, les humoristes, aimons de toutes nos forces car les années passent, et nous tous avec.
Vivons bien, à défaut de vivre mieux, cela suffira à nous tenir chaud dans le gel sidéral. Et s’il nous arrive de ne plus croire aux contes de fée, et par voie de conséquence de douter de nous-même, rappelons-nous ce quatrain d’Omar Khayyam :
Si tu veux t’acheminer
Vers la paix définitive
Souris au destin qui te frappe
Et ne frappe personne
Bonne année à toutes et à tous. »