Dans deux semaines, nous célébrerons la République. Et, dans le même élan, nous saluerons la mémoire des pères fondateurs de la Tunisie moderne.
Pas de place pour l’archaĂŻsme anti-rĂ©publicain…
Alors que sous certains cieux, on continue Ă naĂ®tre soumis et inĂ©gaux, nous sommes redevables aux fondateurs de la rĂ©publique de notre Ă©galitĂ© dans les textes et dans l’esprit des lois. Cette terre qui est notre mère Ă©ternelle ne trahira jamais ce choix d’Ă©galitĂ© que certains aujourd’hui contestent sans oser le dire clairement.
Au nom de toutes nos filiations, l’archaĂŻsme anti-rĂ©publicain ne passera pas en Tunisie. Et que celles et ceux qui prĂ©fèrent le wahabisme s’en aillent vivre leur foi chez leur maĂ®tres. Mais qu’ils soient prĂ©venus, leurs mères, sĹ“urs et Ă©pouses devront troquer leur permis de conduire contre des voiles plus hermĂ©tiques que des prisons.
La première révolution tunisienne
Beaucoup de pays arabes rĂ©trogrades n’ont pas encore digĂ©rĂ© la rĂ©volution vĂ©cue par la Tunisie des annĂ©es cinquante. Dans ma lecture de notre histoire contemporaine, la pĂ©riode qui a vu successivement la naissance de la RĂ©publique, celle de la première constitution et celle du code du statut personnel devrait ĂŞtre qualifiĂ©e de première rĂ©volution tunisienne.
Il est d’ailleurs symptomatique que cette conquĂŞte de la libertĂ© individuelle ( et de son corollaire, la responsabilitĂ© civile pour tous) ait Ă©tĂ© attaquĂ©e de toutes parts, surtout par les archaĂŻques et les intĂ©gristes de tous bords qui n’ont jamais gobĂ© la libertĂ© conquise par les Tunisiennes, pour revenir Ă elles.
Le projet des annĂ©es cinquante a besoin d’une refondation
En fait, cette rĂ©volution tunisienne des annĂ©es cinquante reste le rĂ©fĂ©rent des forces de progrès. Car, ce qui a ensuite Ă©tĂ© prĂ©conisĂ©, planifiĂ©, anticipĂ© par Bourguiba et ses compagnons n’a pas Ă©tĂ© Ă la hauteur de ce qui a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© lors des premières annĂ©es de l’indĂ©pendance.
Par la voix de Bourguiba, la Tunisie a prĂ´nĂ© un Etat laĂŻc, des individus libĂ©rĂ©s, une rĂ©publique, une constitution et beaucoup d’autres choses encore Ă l’image du dĂ©mantèlement des habous, la dĂ©structuration des alliances tribales et l’ancrage stratĂ©gique Ă l’ouest.
Ce projet du nouvel Etat tunisien a malheureusement échoué. Le contexte international, les dissensions internes, la malheureuse expérience des coopératives auront eu raison de cette Tunisie rêvée.
Ensuite, le projet a dĂ©finitivement chavirĂ© lorsque Bourguiba qui a eu raison d’Ă©tablir une dictature de la modernitĂ© pour sortir la Tunisie de ses archaĂŻsmes a fini par sombrer dans la dĂ©raison d’une prĂ©sidence Ă vie.
Du frémissement moderniste à la défaillance démocratique
C’est pour tout cela qu’il faut revenir Ă l’esprit de 1956, au frĂ©missement moderniste qui a fini par cĂ©der devant la dĂ©faillance dĂ©mocratique. Car c’est bien dans cette absence de dĂ©mocratie qu’ont fleuri tous les intĂ©grismes, toutes les rĂ©pressions puis les mensonges d’un Ben Ali qui a voulu tout s’approprier y compris le projet bourguibien dont il n’ a pu pleinement rĂ©aliser que les dimensions policière et sĂ©curitaire.
Si le monde occidental observe la Tunisie avec beaucoup de sympathie, ce n’est pas le cas de beaucoup de pays engluĂ©s dans leur archaĂŻsme et tournant le dos Ă la libertĂ©.
Pour ceux-lĂ , une Tunisie qui sortirait de la modernitĂ© de son projet initial et ouvrirait les bras Ă l’islamisme crypto-wahabite aurait une valeur de symbole.
En effet, ils pourraient ainsi avoir raison du pays le plus libĂ©ral de l’aire arabe et faire plier un peuple plus Ă©pris de libertĂ© que de gĂ©nuflexions. Ne leur donnons pas cette joie, mĂŞme si nos politiciens agissent comme d’ingĂ©nues girouettes.
Ni les dictateurs ni les faux dévots !
Ne subissons ni le rictus du dictateur déchu ni ces faux dévots drapés dans des oripeaux politiciens qui viennent nous dire comment être musulmans.
Car la Tunisie n’est ni l’Arabie saoudite ni le Bangladesh. Car ce qui nous lie Ă la MĂ©diterranĂ©e est aussi fort que ce qui nous lie Ă l’Orient, car nous sommes autant des enfants de 1789 que des adeptes de l’Islam malĂ©kite.
Car enfin, chez nous, depuis les combats des annĂ©es trente, la libertĂ© de l’individu ne saurait reculer devant le diktat des confrĂ©ries rĂ©surgentes. Car aussi, une fois pour toutes, nous sommes Tunisiens avant tout !
Vive la République !
H.B.