Il est des indices qui ne trompent pas quant Ă la nouvelle prĂ©dominance qu’est en train de conquĂ©rir la langue anglaise en Tunisie. Ils sont nombreux et nous en passerons quelques uns en revue.
En fait, nous n’avons plus de deuxième langue
Commençons toutefois par un constat : de facto, il suffit de tendre l’oreille, la Tunisie n’a plus de deuxième langue. En d’autres termes, le recul du français est tel que la Tunisie profonde, certaines Ă©lites politiques et mĂŞme de nombreux universitaires ne maitrisent plus ni la langue de Molière ni ses codes.
Si, Ă dĂ©faut d’ĂŞtre bilingue, la rue tunisienne est devenue bibègue, le français continue Ă ĂŞtre la langue relative des affaires, de quelques mĂ©dias et des gĂ©nĂ©rations qui ont aujourd’hui cinquante ans et plus. Mais nous le savons, la dĂ©mographie tunisienne est dynamique et le pays jeune.
Un recul qui commence Ă la source
Dans plusieurs domaines, le français garde un statut de langue vĂ©hiculaire mais toujours avec l’anglais Ă ses trousses. Mais, on le sait, quelque soit son indice de pĂ©nĂ©tration, une langue vĂ©hiculaire n’est pas une deuxième langue, largement pratiquĂ©e voire culturellement assimilĂ©e.
Ce recul du français commence Ă la source, dès l’Ă©cole primaire, pour ne pas dire le jardin d’enfants. Et il semble de plus en plus illusoire de renverser la vapeur, tant l’anglais semble avoir le vent en poupe dans tous les domaines.
Partout, l’anglais tend Ă s’imposer
Au point oĂą l’on pourrait lĂ©gitimement se demander quel sera en Tunisie le statut du français dans dix ans. TalonnĂ© partout par l’anglais, la langue française s’essouffle au point oĂą dans la bonne sociĂ©tĂ©, on prĂ©fère dĂ©sormais enseigner ses enfants en anglais, sans mĂŞme plus regarder vers les universitĂ©s françaises pour les formations supĂ©rieures.
De fait, les indices d’une montĂ©e de l’anglais sont nombreux. De plus en plus de jeunes parlent l’anglais mieux que le français, ce qui pouvait sembler inconcevable, il y a quelques dĂ©cennies. Dans le monde Ă©conomique, l’anglais est devenu la norme international ainsi que dans les milieux universitaires.
Des politiques discutables
Signe des temps, un ouvrage qui vient de paraitre Ă propos du Dialogue national en Tunisie, s’est mieux vendu en anglais de l’aveu mĂŞme de ses Ă©diteurs pourtant francophones.
Les exemples sont nombreux et soulignent que l’anglais arrive Ă toute vitesse dans une Tunisie oĂą la langue française continue Ă vaciller sous les effets conjuguĂ©s d’une appropriation inadĂ©quate dans l’Ă©ducation nationale tunisienne et d’une politique plus que discutable des acteurs culturels français.
Le trésor perdu de la singularité maghrébine
Quel sera le tableau dans dix ans ? Quelles seront les positions respectives du français et de l’anglais ? Tout semble indiquer une montĂ©e en puissance de l’anglais et un recul qui semble inexorable du français.
Sous de nombreux regards complices qui se rĂ©jouissent de cette tendance, tout en semblant oublier que nous perdons un trĂ©sor, une tradition, une part de notre singularitĂ© maghrĂ©bine…
H.B.