Qu’on prenne ce billet pour ce qu’il est: un simple point de vue et une réaction face aux faits et gestes des uns et des autres.
Comme tous les Tunisiens, j’ai constaté que ces dernières semaines, le gouvernement s’est mis en mode turbo. Habib Essid, Najem Gharsalli et Farhat Horchani sont sur tous les fronts, rassurants, sobres et efficaces.
On dira ce qu’on voudra mais, quoique le cynisme soit de mise au temps de la parole libérée, nous devrions cesser de relativiser en permanence l’action du gouvernement. Ces femmes et ces hommes font ce qu’ils peuvent dans un contexte pourri et la moindre des choses serait de le reconnaitre puis de critiquer, lorsqu’il le faut.
Slim Chaker, un ministre en hausse
Ceci étant dit, ces derniers jours ont été marqués par l’action pragmatique de Slim Chaker, le ministre des Finances. Sur le terrain, au nord-ouest et au sud-est, Chaker a gagné mon estime de simple citoyen grâce à une action réfléchie, concertée et parfaitement ciblée.
Programmes de mise à niveau, anticipation des flux de ressortissants libyens et algériens et aussi d’autres mesures relatives aux douanes et aux diverses taxations.
C’est un fait : Slim Chaker travaille et peu m’importe sa couleur politique, c’est l’essentiel qui m’intéresse, autrement dit sa capacité à servir la Tunisie et son peuple.
Accessoirement, l’action de ce ministre des Finances nous fait oublier le désastreux passage des « technocrates » qui l’avaient précédé à ce poste hautement stratégique.
Car ni Elyes Fakhfakh ni Hakim Ben Hamouda n’avaient convaincu, ni l’un ni l’autre ne laisseront de trace marquante après leur passage sinon quelques timbres xénophobes et beaucoup de démagogie doublée d’une fuite en avant.
Yassine Brahim, un homme trop pressé
Parfois, lorsqu’ils essaient en permanence d’être sous les feux des projecteurs, certains ministres en finissent par devenir lassants. Leur jeu narcissique s’avère cousu de fil blanc et leur obsession médiatique finit toujours par se retourner contre eux.
C’est le cas de Yassine Brahim, un illustre inconnu qui avait été parachuté de je ne sais où dans le gouvernement Mohamed Ghannouchi, en janvier 2011. Depuis, cet adepte du libéralisme, poussé par des sponsors invisibles à l’œil non exercé, se la joue clairement solo.
On dirait qu’il n’y a que lui qui compte, que les autres sont des supplétifs et qu’il est le seul qui porte un dessein pour la Tunisie. Obnubilé par son image, pressé de parvenir, ce jeune homme me fait penser à un certain Sarkozy qui, dit-on, y pensait en se rasant.
Brahim ferait bien de réfréner ses ardeurs car, tout simplement, il agace et semble ne pas réaliser la complexité du travail gouvernemental ni comprendre le fonctionnement de son ministère.
A force de froisser ses collaborateurs, à force de déconsidérer les fonctionnaires, il finira comme tous les hommes pressés: grillé sur l’autel de ses ambitions, fussent-elles légitimes.
Néji Jelloul et les perspectives d’une rentrée calamiteuse
Néji Jelloul, ministre de l’Education, savoure « sa » victoire sur les syndicats d’enseignants. Considérant avoir le vent en poupe, il semble s’être installé dans une forme de déni de réalité.
Sa fermeté, au printemps dernier, avait convaincu, rassuré une opinion publique alarmée par l’intransigeance syndicale. D’autre part, même confusément, les Tunisiens savaient le combat des instits porté par des revendications légitimes.
Est-il nécessaire de revenir sur le passage en force du ministre ? Est-il utile de reformuler la riposte promise ? Devrions-nous nous attarder sur les implications de l’état d’urgence sur la situation ?
Il suffit, à mon sens, de souligner que nous allons inéluctablement vers une rentrée houleuse. C’est un risque que ne devrait pas prendre Jelloul en pêchant par excès.
En effet, malgré ses déclarations apaisantes, ce ministre est en train de creuser davantage le fossé entre enseignants et gouvernement. Et ce faisant, il nous mène vers une rentrée sulfureuse.
Néji Jelloul saura-t-il convaincre en revenant à temps à la table des négociations ? Ou bien persistera-t-il à créer les conditions d’une rentrée calamiteuse ? Dans ce dernier cas, ce serait fort désespérant de constater que l’homme à poigne ne se double pas d’un bon politicien qui sait lâcher du lest au bon moment.