Comme on pouvait s’y attendre, après la dĂ©gradation de BBB- Ă BB de la note souveraine parue le 23 mai, qui a classĂ© la Tunisie en zone spĂ©culative, un niveau qui implique ipso facto le renchĂ©rissement potentiel de la prime de risque au profit des bailleurs de fonds, l’agence de notation Standard and Poor’s vient d’annoncer (voir le communiquĂ© de Reuters) le prolongement de sa note sur le secteur bancaire, Ă©tant donnĂ© le lien Ă©troit de certaines banques avec l’État, tant en sa qualitĂ© d’emprunteur sur le marchĂ© financier international qu’en sa qualitĂ© d’actionnaire. Et ceci, particulièrement pour certaines banques qui en partenariat Ă©tranger opèrent exclusivement sur le site tunisien. Il s’agit des 5 banques ci-après :
Arab Tunisian Bank BB/Stable contre précédemment BBB-/Negatif
BanqueTuniso-Koweitienne BB/Stable contre // // BB+/Négatif
Banque de l’Habitat BB-/Stable contre // // BB+/NĂ©gatif
Banque de Tunisie et des Emirats BB-/Négatif contre // // BB/Négatif
Societe Tunisienne de Banque Bpi contre // // BBpi
Cette notation que Mustapha Kamel Nabli, l’actuel gouverneur de la Banque Centrale, a considĂ©rĂ©e comme dĂ©jĂ sĂ©vère au niveau de l’État, l’est sans doute encore plus Ă celui des banques qui y ont Ă©tĂ© (injustement) amalgamĂ©es. Mais il n’en demeure pas moins que cette notation risque Ă©galement de se rĂ©percuter sur leurs cotations respectives, car pour la quasi-totalitĂ©, elles sont cotĂ©es en bourse et sont intĂ©grĂ©es au Tunindex, qui est l’indice phare de la capitalisation du marchĂ©. Le Tunindex est pour le moment positif depuis le dĂ©but de l’annĂ©e (+7%) et semble s’accommoder de la transition.
Or dans toutes les banques concernĂ©es, dont on rappellera que l’exploitation est exclusivement « dĂ©diĂ©e » au territoire tunisien, l’État en est un actionnaire très prĂ©sent. Ă€ la fois important, sinon majoritaire. Aussi parait-il logique que, selon le principe qui dit que: » l’accessoire suit le principal », la dĂ©gradation de la note souveraine de l’État soit Ă©tendue (rĂ©percutĂ©e) dans tous les domaines oĂą l’État est prĂ©sent. Particulièrement dans le secteur financier. Pourtant si cet impact est logique, il n’est pas nĂ©cessairement mathĂ©matique. Expliquons-nous.
Tout dĂ©pend de la question de savoir quel est le degrĂ© de fiabilitĂ© et de fidĂ©lisation que ressentent les diffĂ©rents partenaires des dites banques et quelles pourraient ĂŞtre les perspectives qu’ils se font eux mĂŞme d’un pays qui sort Ă peine d’une rĂ©volution. S’il est vrai que le court terme porte le poids et l’impact du bouleversement des donnĂ©es et de la transition difficile, faut-il reconnaĂ®tre, que le pays traverse en ce moment, en revanche, et c’est S&P qui le mentionne lui mĂŞme dans sa note d’analyse, le moyen et le long terme restent très prometteurs une fois la constitution Ă©tablie et approuvĂ©e et les Ă©lections dĂ©finitives rĂ©alisĂ©es. Le fonds monĂ©taire international (FMI) a mĂŞme prĂ©vu que, ne serait ce qu’en 2012, le PIB devrait terminer l’annĂ©e Ă hauteur de 3%.
Ceci dit, en prenant part dans la structure du capital pour y siĂ©ger en qualitĂ© de partenaire-administrateur, avec une forte position dans le noyau dur de l’actionnariat, les investisseurs Ă©trangers, venant gĂ©nĂ©ralement de pays amis, offrent souvent leurs garanties contre le risque hypothĂ©tique d’une Ă©ventuelle dĂ©faillance. En plus de ce support, il est quasi impossible qu’une banque sur la place de Tunis, appartenant en partie Ă l’État tunisien, ne soit laissĂ©e pour compte ou fasse faillite. Cela ne s’est jamais vu de par le passĂ© et la plupart des observateurs pensent qu’un tel scĂ©nario n’est pas de l’intĂ©rĂŞt de la gouvernance, qui pourrait y risquer sa crĂ©dibilitĂ© comme celle de la place de Tunis.
Des solutions de continuitĂ© et de relais demeurent possibles via les fusions ou le remplacement des partants par de nouveaux actionnaires stratĂ©giques. La bourse elle-mĂŞme pourrait ĂŞtre sollicitĂ©e avec les intermĂ©diaires, pour Ă©ventuellement re-capitaliser les banques si le besoin s’en faisait ressentir. Le système boursier tunisien, qui a si bien su remonter la pente en cette phase de transition compliquĂ©e, est aujourd’hui suffisamment potentiel en expĂ©rience, en organismes de placement collectif (SICAV, FCP et autres OPC…) et autant de structures d’appoint, pour des prises fermes et des relais ou portages divers et Ă©viter le pire en cas de besoin. D’ores et dĂ©jĂ , l’ardoise laissĂ©e par les Trabelsi est en voie de comblement. MĂŞme si cela doit en coĂ»ter aux actionnaires de sacrifier, pour quelques exercices, le prix du dividende. Celui-ci pourrait ĂŞtre cumulĂ© pour ĂŞtre distribuĂ© une fois que tout sera rentrĂ© dans l’ordre et que la banque sera renflouĂ©e le cas Ă©chĂ©ant.
