Dans une allusion à la grève de la faim qui a coûté la vie aux jeunes salafistes , Mohamed Bakhti et Bechir El Golli, Cheikh Rached Ghannouchi a indiqué, sur les ondes de Shems FM, que « ceux qui font la grève de la faim et se laissent mourir sont des impies ».
Venant de la bouche du Président du Parti islamiste au pouvoir, cette déclaration peut avoir une double signification. Elle peut traduire l’intention d’escamoter la responsabilité du ministère de la Justice, accusé de négligence et de laisser-aller, comme elle peut exprimer une manœuvre de renversement de la situation en faisant assumer aux deux grévistes la responsabilité de leur décès. Indirectement, Cheikh Rached Ghannouchi entend dire que les grévistes se sont suicidés à petit feu en refusant toute forme d’assistance médicale de la part des autorités pénitentiaires et sanitaires.
Lorsque Naoufel Ouertani a pratiquement repris les mêmes propos dans son émission « Midi Show » présentée aujourd’hui sur Mosaïque FM, Raouf El Golli, le frère de feu Bechir El Golli, est intervenu par téléphone et a contesté vigoureusement l’assimilation du décès des deux grévistes à un acte de suicide.
Sa réaction est parfaitement compréhensible non seulement parce que l’une des victimes est son frère, mais aussi parce qu’il refuse le renversement de la situation en faisant croire à l’hypothèse du suicide qui est un péché au sens de la religion. En défendant les grévistes de manière aussi intempestive, il a cherché à défendre leur position et justifier leur attitude. D’après Raouf El Golli, leur acte est une protestation légitime pour alerter l’opinion publique sur les circonstances et conditions de leur détention.
Participant dans la même émission, l’avocat qui a pris en charge l’affaire, Seifeddine Khalfallah, a été de même avis que Raouf El Golli. Il a affirmé que la cause du décès des deux grévistes a été la négligence des autorités qui n’ont pas pris les mesures nécessaires pour empêcher le pire et qui ne se sont intéressées à l’état de santé des victimes qu’après qu’elle soit devenue critique. Il a reproché aux médias la diabolisation de la tendance salafiste au point d’avoir influencé les autorités, et la Justice, et de les avoir montées contre les membres et les sympathisants de cette tendance. Un échange électrique a eu lieu entre l’avocat et Naoufel Ouertani qui a insisté sur le fait que la couverture des événements violents, dont l’attaque de l’ambassade américaine, et l’appel à la poursuite des responsables ne constituent pas une incitation contre les salafistes. Il reconnaît que les médias auraient dû couvrir suffisamment la grève de la faim qui a coûté la vie à deux jeunes tunisiens.