L’événement du 14 Janvier s’est imposé de facto à tous et même à Rached Ghannouchi qui n’a pas manqué l’aubaine de se démarquer ou plutôt de marquer le coup en se positionnant comme un fin communicateur dans les médias occidentaux… Histoire de se poser en gardien de la Révolution !
«La Tunisie relèvera les défis de la démocratie», c’est sous ce titre que Rached Ghannouchi, président du mouvement Ennahda, a publié, aujourd’hui, date anniversaire de la Révolution tunisienne, une tribune sur les colonnes du journal français «Le Monde».
«We are building a Tunisia for all», c’est le titre de sa tribune publiée hier dans le journal «The Guardian».
Deux tribunes, en français et en anglais, qui transmettent un même message, celui d’un Rached Ghannouchi désireux de se poser en véritable père spirituel de cette Révolution qui semble à bout de souffle. Une stratégie de communication qui ne passe pas inaperçue car il est difficile de ne pas commenter ce qui est exprimé dans ces tribunes. A croire que c’est un monarque qui en est l’auteur !
Dans la tribune du journal «Le Monde», à titre d’exemple, c’est sous une facette soft et ouverte au dialogue que Cheikh Rached nous apparaît. «La Tunisie célèbre, le 14 janvier, le deuxième anniversaire du soulèvement de son peuple et de sa jeunesse contre la dictature. Grâce au sang de ses martyrs ainsi qu’aux sacrifices de générations de Tunisiens, elle est engagée dans un processus de fondation d’un régime et d’une société démocratiques.
Une facette tournée vers l’avenir alors qu’il y a quelques années, Cheikh Rached Ghannouchi avait tout tenté pour se rapprocher de Ben Ali. Et aujourd’hui, il veut faire converger vers un seul objectif, les sacrifices des générations passées, son exil et sa tentative de rapprochement de ZABA, ainsi que les martyrs. C’est ce qu’on appelle prendre le train en marche et se donner le titre de guide suprême qui lui permet de s’emparer d’une révolution déjà très esquintée.
«Les Tunisiens ont surtout réussi à démontrer la possibilité du rapprochement, de la coopération et du partenariat entre islamistes modérés et laïques modérés. Si l’opposition à la répression et à la dictature a permis un tel rapprochement avant le 14 janvier 2011 (comme l’a montré, par exemple, le collectif du 18 octobre 2005), nous sommes aujourd’hui, laïques et islamistes, engagés dans la construction des fondations de la démocratie en Tunisie. Ce partenariat demeure la seule voie pour assurer un progrès durable et une démocratie stabilisée, unifiée autour de la réalisation des véritables objectifs nationaux de la Tunisie», dit-il.
Mais est-ce bien une retranscription exacte de la réalité du terrain ? Les Tunisiens, sont-ils dans leur ensemble, un bloc soudé ? Comment expliquer alors l’existence de conflits, parfois violents entre partis et autres structures comme les ligues de protection de la révolution sans parler des milices qui ne portent pas encore leur nom ?
«La révolution tunisienne a non seulement transformé le visage de la Tunisie, mais elle a également déclenché un mouvement qui s’est étendu à l’ensemble des pays arabes. (…). Le « printemps arabe » est la réponse à une longue crise politique qui paralysait le monde arabe». Rached Ghannouchi veut, en ce sens, baliser le chemin à une autre forme de démocratie, celle des islamistes, ouvrant par conséquent, comme il le dit, «une nouvelle page dans les relations extérieures de cette région avec le monde».
Que nous réserve donc Rached Ghannouchi ?