La fixation d’un prix de référence de 10 dinars le kilo pour l’huile d’olive au niveau des huileries déclenche une vive contestation chez les producteurs. Le Syndicat des agriculteurs tunisiens dénonce une décision qu’il juge déconnectée des coûts réels et avertit des risques sérieux pour l’avenir de la filière oléicole.
La décision conjointe des ministères de l’Agriculture et du Commerce d’instaurer un prix de référence mobile pour l’huile d’olive continue de susciter de vives réactions. Aujourd’hui, sur les ondes d’Express fm, le président du Syndicat des agriculteurs tunisiens (Synagri), Midani Dhaoui, a publiquement critiqué cette mesure, estimant qu’elle accentue les tensions au sein de la filière. Selon lui, le prix arrêté ne reflète ni la réalité des coûts de production ni les équilibres économiques du secteur.
Une décision qui fracture la filière
Pour le Synagri, la fixation du prix à 10 dinars le kilo au niveau des huileries a créé un climat de crispation inédit entre agriculteurs et propriétaires d’huileries. Midani Dhaoui affirme que cette situation a conduit certaines unités de transformation à refuser la réception des olives, paralysant partiellement la campagne oléicole dans plusieurs régions. Il dénonce une mesure « improvisée » qui n’a pas fait l’objet d’une concertation globale avec l’ensemble des acteurs concernés.
Le cœur du désaccord réside dans l’écart entre le prix de référence fixé et les coûts réels supportés par les agriculteurs. Le président du syndicat souligne que la majorité de la production actuelle provient désormais de cultures irriguées, nettement plus coûteuses en raison de la hausse des intrants, de l’énergie et de la main-d’œuvre.
Dans ces conditions, le prix annoncé ne permettrait pas de couvrir les frais engagés, faisant peser l’essentiel de l’effort financier sur le seul producteur. Il estime que le prix réel devrait se situer à pas moins de 14 dinars le kilogramme, et ce, afin d’absorber les coûts de production, de transformation et de commercialisation.
Inquiétudes sur l’avenir de l’oliveraie tunisienne
Midani Dhaoui a également pointé la faible valorisation de l’huile d’olive tunisienne sur les marchés internationaux. Malgré une qualité reconnue parmi les meilleures au monde, le produit tunisien demeure, selon lui, vendu à des prix inférieurs à ceux de nombreux concurrents. Il attribue cette situation à des politiques conjoncturelles et à des décisions prises dans l’urgence, sans vision stratégique à long terme.
Au-delà de la conjoncture actuelle, le syndicat s’inquiète pour la pérennité d’un patrimoine agricole estimé à près de 120 millions d’oliviers. En l’absence de politiques proactives garantissant une rémunération équitable des producteurs, Midani Dhaoui redoute un désengagement progressif des agriculteurs et une fragilisation durable de la filière, pourtant centrale pour l’économie nationale et les exportations.
Appel à une révision des prix
Face à cette situation, le président du Synagri appelle les autorités à revoir leur approche et à fixer des prix « réels », alignés sur les coûts de production. Il estime qu’assurer aux agriculteurs des revenus décents constitue une condition indispensable pour préserver la filière, apaiser les tensions avec les huileries et maintenir la compétitivité de l’huile d’olive tunisienne sur les marchés internationaux.
Les ministères de l’Agriculture et du Commerce, ont conjointement annoncé, mardi 23 décembre 2025, l’instauration d’un prix de référence mobile pour l’huile d’olive au niveau des huileries. Ce prix est fixé à 10 dinars le kilogramme pour la campagne agricole 2025–2026.
Selon ce communiqué, cette mesure vise à encadrer le marché de l’huile d’olive et à garantir le bon déroulement du processus de récolte et de transformation des olives. Elle cherche également à préserver l’équilibre de la filière et à protéger les intérêts de tous les acteurs, en particulier les petits producteurs.
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