Quelle mouche a encore piqué Moncef Marzouki ? Le voilà qui, à l’heure où la communauté internationale le juge coupable de crimes de guerre, offre l’asile à Bachar El Assad. Est-ce pour essayer de lui vendre un des palais présidentiels qu’il cherche à négocier au plus offrant ? Ou bien est-ce encore une fois pour essayer de se distinguer à tout prix et avoir sa photo dans la presse internationale ?
S’il parle d’hospitalité aujourd’hui, pourquoi le président provisoire a-t-il renvoyé avec fracas l’ambassadeur syrien à Tunis ? Et pourquoi toutes ces gesticulations ?
N’avons-nous pas assez à faire avec tous les chantiers qui devraient nous occuper et tous les périls qui nous guettent ?
Pourquoi mettre ainsi le doigt dans l’engrenage moyen-oriental pour se faire rabrouer par les uns et les autres, sortir la Tunisie de ses rails diplomatiques et surenchérir pour satisfaire des pays tiers ?
À quoi joue Monsieur Marzouki ? Car, il ne fait nul doute qu’il fait joujou avec les fonctions dont il a hérité, grâce à ses alliés d’Ennahdha.
À l’étroit (selon lui) dans ses fonctions, le président provisoire cherche à tout prix à se faire une place au soleil à l’international. Au lieu de tenir le cap d’un soutien critique à ses partenaires en position dominante, il semble agir pour la galerie alors qu’il abandonne le terrain devant l’alliance tacite salafiste-conservatrice.
Simple citoyen, je suis profondément déçu. Devrais-je me taire, car il s’agit du magistrat suprême ? Devrais-je faire semblant et, comme lui, regarder ailleurs ?
Fussent-elles provisoires, je voue le plus grand respect à nos institutions républicaines. Mais force est de reconnaitre que le costume de président va très mal à Monsieur Marzouki. Est-ce pour cela qu’il le cache souvent sous des burnous ?
À chacune de ses sorties intempestives et indignes d’un chef d’État, c’est la Tunisie qu’il accable un peu plus et la mainmise d’Ennahdha qu’il consolide davantage.
Où allons-nous, si le premier magistrat de la République, englué dans des alliances qui lui laissent le rôle de pantin, s’agite à tout-va et cherche à tout prix à se forger une stature qui ne sera jamais la sienne.
Au fond, les Tunisiens découvrent aujourd’hui que la plupart des opposants à Ben Ali étaient à son image : médiocres, opportunistes, irrationnels comme ces grenouilles qui se veulent aussi grosses que des bœufs.
Marzouki n’arrive pas à la cheville de ceux pour lesquels il se prend. Il est loin, très loin des Mandela, Lula et autres Walesa auxquels il pense ressembler et dont il croit s’inspirer.
Et, de toutes les manières, n’a-t-il pas un mandat d’un an pour mener à bon port le socle de la nouvelle République tunisienne ? N’est-ce pas passionnant de se trouver au cœur de la naissance d’une nouvelle constitution, à la tête d’un pays qui mène sa révolution ?
Cette tâche pour laquelle il est mandaté n’est-elle pas suffisante ? Pourquoi la délaisser et s’investir à hue et à dia dans d’autres urgences et d’autres agendas qui ne sont pas ceux du peuple tunisien ?
Si ces divagations continuent, je ne parierais pas un millime sur les chances de Moncef Marzouki d’être réélu, si d’aventure, il se présentait devant le suffrage des Tunisiens, lors d’échéances prochaines.
Bien sûr, il pourra toujours compter sur ses amis d’Ennahdha et sur l’aile la plus conservatrice du CPR, mais cela, nous le savions déjà, n’est, au meilleur des cas, qu’un cache-misère.
À tout prendre, le président provisoire devrait tenter de remettre les pieds sur terre, faire son autocritique et, s’il se sent dépassé par le poids des responsabilités, rendre le burnous.
Bien sûr, Monsieur Marzouki a ses supporters qui ne seront pas de mon avis. Mais qu’ils prennent le soin d’écouter les paroles d’un citoyen déçu, peiné, voire écœuré par cette confusion au sommet, à l’ombre des burnous de l’incurie.