Editorial | Tunisie : La caution de Rached Ghannouchi !

Editorial | Tunisie : La caution de Rached Ghannouchi !
Tunis-Hebdo
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Les Islamistes ne laissent pas passer une occasion pour faire parler d’eux et être au centre des discussions. En communication, faire parler de soi est très important, de manière positive ou même, parfois, de manière négative. Le fait d’être le sujet de débats au sein de tous les milieux est certes productif. Il ne l’est cependant pas dans tous les cas, surtout lorsqu’il s’agit de coups médiatiques montés pour tenter de s’entourer d’un certain prestige ; ou simplement de purs mensonges. La semaine dernière, le patriarche d’Ennahdha, ses plus proches collaborateurs et sa famille, ont effectué une visite à Paris. Rached Ghannouchi (RG) et ses troupes ont laissé entendre qu’ils allaient, outre donner quelques conférences dans des centres « de recherche », avoir le « privilège » (généralement réservé aux personnalités officielles de l’Etat) de rencontrer des autorités officielles françaises. Il est de bonne guerre et compréhensible que les Islamistes et RG lui-même tentent de rencontrer des personnalités étrangères surtout occidentales. Car le contexte international dans son ensemble est désormais, hostile aux Islamistes et aux courants politiques se réclamant de « l’Islam Politique », eux qui furent jadis, au cours de ce qu’on avait appelé le « Printemps Arabe », le fer de lance de ces mêmes Occidentaux, le « cheval » sur lequel ils ont parié. Mais, aujourd’hui, le vent semble avoir radicalement tourné contre les tenants de « l’Islam Politique » à partir du moment où les Etats-Unis ont commencé à les lâcher et menacent de les inscrire sur la liste des mouvements terroristes. Une épée de Damoclès qu’ils essaient d’éviter et une condamnation qui viendrait ruiner tous leurs rêves de conquête du pouvoir et de changement de la société. En réalité, par le biais de pareilles initiatives, les Islamistes et Rached Ghannouchi souhaitent atteindre deux objectifs : montrer patte blanche aux Occidentaux, eux qui ont toujours cherché un soutien international (Turquie, Qatar) au point d’avoir des positions de vassaux, et montrer aux Tunisiens qu’ils sont incontournables et possèdent leurs entrées dans les grandes chancelleries. Ils veulent d’abord rassurer les Occidentaux sur le caractère pacifique d’Ennahdha et son orientation démocratique. Leurs positions assez osées, et même contraires parfois à leurs convictions (rappelez-vous la position de RG sur les homosexuels), ou « tolérer » la présence d’un ministre de confession juive au sein d’un gouvernement où ils sont présents, sont autant de concessions et de gestes de séduction. Ils leur présentent aussi une sorte de caution quant à leurs orientations économiques qui correspondent à la vision ultra-libérale de Bruxelles à propos notamment de l’ALECA qui se profile à l’horizon. Présenté comme un véritable pacte néocolonial qui va ruiner l’économie nationale et la déstructurer la rendant totalement dépendante de l’UE, cet accord n’a pas été commenté, encore moins critiqué, par les Islamistes qui observent un silence complice à son égard. Pour ce qui est de l’opinion publique nationale, et à quelques mois des élections législatives et présidentielles, les Islamistes veulent faire croire aux Tunisiens qu’ils constituent la plus importante force politique du pays, et que RG a toutes les qualités pour être leur président. Or, tous les partis ou presque ont fait de leur décision de ne pas s’allier avec eux un argument de campagne, ce qui démontre leur isolement sur la scène politique mais aussi la conviction de ces partis que l’inimitié envers les Islamistes suffit, ou presque, à leur accorder les voix des Tunisiens. Autant de faits et de données qui préparent un scrutin décisif pour le pays…

Lotfi LARGUET Tunis-Hebdo du 20/05/2019




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