H.H. Abdelwaheb : Le premier critique dramatique tunisien

H.H. Abdelwaheb : Le premier critique dramatique tunisien
Tunis-Hebdo
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Hassen Hosni Abdelwaheb s’éteindra le 9 novembre 1968, d’une crise d’asthme, dans sa villa de Salammbô où il était venu terminer sa vie avec ses milliers de livres et de manuscrits qu’il avait réunis au fil des ans, durant presque trois quarts de siècle, les uns venant de son père, un aimable érudit qui lui avait fait aimer l’histoire, les autres provenant de la bibliothèque de Béchir Sfar (Hassen Hosni Abdelwaheb ayant épousé la veuve du fils de ce dernier Mustapha, cheikh de la Médina de Tunis et fondateur de la Rachidia, les autres, enfin, récoltés à Tunis, au souk des libraires, dans les bibliothèques et dans les pays qu’il visitait. Signalons que tous ces manuscrits, tous ces livres, toutes ces brochures, ces documents, Hassen Hosni Abdelwaheb les légua, par testament, à la bibliothèque nationale. Deux jours avant sa mort, Hassen Hosni Abdelwaheb s’était vu décerner en même temps que Tahar Ben Achour, le Prix Bourguiba de littérature qui venait d’être créé. Signalons à présent, un détail, important que peu d’historiens connaissent : H.H.Abdelwaheb a été le premier critique dramatique que notre pays ait enfanté. En effet, en 1908, un groupe de jeunes tunisiens constitua la première troupe théâtrale tunisienne « L’Etoile » dont l’existence fut très éphémère et qui ne se produisit, jamais, sur scène. Or, en septembre de la même année, la direction du Théâtre municipal engagea une troupe égyptienne, dirigée par Abelkader El Masri, et qui comprenait, entre autres, parmi ses membres, le célèbre chanteur Zaki Mourad (père de la chanteuse Leyla Mourad). Cette troupe donna deux concerts musicaux au Théâtre Municipal de Tunis, les 25 et 27 septembre 1908. Mais son programme comportait également un numéro d’illusionniste et une petite pièce de théâtre « L’Amoureux soupçonné (العاشق المتّهم)dont le rôle principal était tenu par le célèbre acteur comique égyptien, Mohamed Kamel El Masri, mieux connu sous le nom de Charfantah. Ce dernier qui parut dans de nombreux films égyptiens et qui est mort il y a quelques années fut donc le premier acteur arabophone qui ait foulé la scène du Théâtre Municipal. Cette courte pièce comique (il s’agirait d’une parodie de « Roméo et Juliette » à en croire M. Béchir Khangui, l’un des rares témoins de l’époque que j’ai eu la chance de connaître, ne semble pas avoir marqué outre mesure nos jeunes tunisiens férus de théâtre et assoiffés de beaux textes et de belles déclamations. Elle revêt, cependant, une grande importance à nos yeux pour avoir provoqué la première critique dramatique tunisienne. L’auteur en était un jeune homme de vingt- cinq ans (à cette époque) : Hassen Hosni Abdelwaheb. Cet article parut dans le journal « Ettakaddoum » (le 5 octobre 1908). Par la suite, sera fondée la 1ère troupe théâtrale tunisienne Ech-chéhama (الشهامة) dont la présidence sera confiée à Ali Abdelwaheb, frère de Hassen Hosni. A propos de frères, signalons que les Abdelwaheb étaient quatre : Jilani (qui était peintre), Ali, dont nous avons parlé, qui a été chef du protocole, adjoint d’Ahmed Bey, 2ème du nom, qui a aidé dans ses recherches et à mieux connaître la Tunisie, la célèbre Isabelle Eberhardt, lors de ses séjours dans notre pays, et qui a été tué par un éclat de bombe, à Hammam-Lif, en mai 1943 et enterré le 10 de ce mois, les autres frères étaient Hassen Hosni et Hamadi. Signalons de même que Hassen Hosni avait, entre autres, une fille qui a été l’épouse du Docteur Mohamed Sakka de Sousse, et un fils, Khaled, féru de cinéma et qui a réalisé le fameux film « Seigneur Julus » qui relate à partir des mosaïques, la vie quotidienne d’un citoyen carthaginois et qui a sauvé au péril de sa vie, un grand nombre de Tunisiens juifs des Allemands lors de l’occupation de notre pays par les forces de l’Axe, durant la Seconde Guerre mondiale. Revenons à H.H. Abdelwaheb pour dire qu’Habib Bourguiba ne le portait pas dans son cœur. Voici ce qu’il a dit de lui : « J’ai un ancien document tunisien « Ettaqwim Ettounsi », sorte d’Al-manach, qui relatait la tournée effectuée en 1926, par le Résident Général Lucien-Saint, dans les caïdats du Sud. A cette époque, le caïd de Sfax était Salem Snadli et le Contrôleur civil s’appelait Bertholle. M. Hassen Hosni Abdelwaheb se trouvait à la tête du caïdat de Djebeniana. Cet illustre érudit, à l’image de tous les caïds, n’avait pas manqué de faire un éloge dithyrambique du représentant de la France. L’ex-caïd Hassan Hosni Abdelwaheb était un concussionnaire notoire. Quand il était à Mahdia, m’a rapporté M. Sadok Boussofara, le recrutement des soldats au tirage au sort, au profit de l’armée française, était pour lui l’occasion d’un trafic lucratif. Le père de Sadok Boussofara était l’ami intime de ce caïd. Aussi lui doit-il l’exemption de l’un de ses fils du service militaire, sans contre-partie pécuniaire. Le même personnage, à l’indépendance, s’est fait passer pour un érudit éminent ». A signaler, par la suite, que Bourguiba oubliera les exactions commises par H.H. Abdelhaheb lorsqu’il était Caïd et ne verra en lui que le grand historien, chercheur et archéologue de réputation mondiale que tout le monde connaît. Quant à moi, j’ai eu la chance de connaître, Hassen Hosni Abdelwaheb. En effet, la société archéologique de Sousse (dont j’étais Secrétaire général) avait organisé, du 28 au 31 mars 1963, un colloque sur les problèmes économiques et sociaux, concernant une zone géographique qui correspond à l’ancienne province de Byzacène et en avait confié la présidence à Hassen Hosni Abdelwaheb. Et malgré son âge avancé (79 ans) il en avait présidé tous les débats sans exception quelle que fut leur durée, y participant activement et les enrichissant par des interventions fort judicieuses. Il fallait le faire ! … Moncef CHARFEDDINE Tunis-Hebdo du 05/11/2018



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