40 à 49% des mariages en Tunisie seraient consanguins !

40 à 49% des mariages en Tunisie seraient consanguins !
Tunis-Hebdo
print



C'est un phénomène profondément ancré dans la société tunisienne qui n'a jamais été, ouvertement, sujet à caution. Pourtant, les mariages consanguins sont la cause d'innombrables pathologies génétiques aussi dangereuses les unes que les autres. "Préfères-tu épouser ton cousin, ta chair et ton sang ou un parfait inconnu qui risque de précipiter notre famille dans un abîme de maux", tel est le genre de phrase culpabilisatrice que les jeunes filles de certaines régions rurales ou défavorisées ont coutume d'entendre avant de se faire passer la bague au doigt. Bien qu'ils soient réticents, au premier abord, d'épouser un membre de leur famille, beaucoup de jeunes Tunisiens se soumettent encore à cette idée. Les pressions familiales et le manque d'éducation en sont les principales causes. Pour rappel, un mariage consanguin est l'union entre deux individus du même sang. Généralement, un garçon va épouser sa cousine germaine et vice versa. Préserver la famille Dans le temps, en Europe et partout ailleurs, ce type de mariage concernait surtout les familles royales et les gens appartenant à un milieu social aisé. Par cette alliance, les membres d'une même famille réunissaient leur terre et leur richesse afin de préserver leur patrimoine familial. L'amour joue un rôle très secondaire dans cette entreprise. Sauf qu'en essayant de préserver ledit patrimoine familial, on altère le patrimoine génétique. Les enfants issus d'un mariage consanguin présenteront un risque très élevé de développer des maladies héréditaires incurables. Car à l'heure actuelle des choses, on est incapable de soigner une maladie génétique. Avec les progrès de la science et l'évolution des mentalités, les mariages consanguins ont fortement diminué au sein de la bourgeoisie mais ont augmenté au sein des classes populaires. En ce qui concerne la Tunisie, la raison d'une telle évolution des mœurs est toute simple. En effet, la plupart des familles pauvres vivent à la campagne, isolées du monde et sont assez méfiantes des gens de la ville. Epouser le cousin ou la cousine permet de garder la famille unie, de ne pas trop regarder vers les dépenses et d'agrandir les terres. Malheureusement, la plupart de ces gens n'ont aucune idée des conséquences dramatiques qui peuvent résulter de ce type de mariage. D'après l'étude d'Anwar et al., (2014) publiée dans le journal scientifique "European Journal of Public Health" 40 à 49% des mariages en Tunisie seraient consanguins, soit près d'un mariage sur deux ! Au Maroc, ce chiffre est de l'ordre de 33%, avec une moyenne de 15% dans le monde. Un peu de génétique Partons du principe qu'un père et une mère qui sont cousins germains, possèdent la même mutation délétère sur l'une des deux versions (allèle) d'un même gène. Si cette mutation est récessive, on dit que les parents sont porteurs sains de la maladie. Ils sont en bonne santé. En revanche, leur enfant aura une chance sur quatre de recevoir ladite mutation sur les deux versions d'un même gêne. Dans ce cas, l'enfant développera la maladie et sera, donc, en mauvaise santé. On entend régulièrement des gens de conditions très moyennes se plaindre d'anémie (فقر ألدم). Cette maladie caractérisée par un manque d'hémoglobine entraîne un mauvais transport par le sang du dioxygène et cause, notamment, une pâleur de la peau et des muqueuses. En cas d'anémies graves, le patient peut souffrir de troubles sensoriels, moteurs et cardiaques. Si elle n'est pas traitée convenablement, cette pathologie peut entraîner la mort du sujet. Si vous creusez l'historique d'une personne atteinte de ce type de pathologie, vous verrez qu'elle est le fruit d'une consanguinité de haut niveau. D'autres maladies héréditaires empoisonnent quotidiennement l'entourage de la personne atteinte car les traitements symptomatologique sont lourds et très coûteux. Comble de l'ironie, les patients qui souffrent de telles maladies vivent en zones rurales et loin des centres hospitaliers spécialisés. A vouloir préserver la famille des dépenses farfelues, on engendre une progéniture malade qui coûtera une fortune en soins médicaux.

Mohamed Habib LADJIMI

Tunis-Hebdo du 13/08/2018



Nos banques : à radin, radin et demi !

Précédent

Franc-parler : Tunis-Munich !

Suivant