BCE nomme Essid / Chahed nomme Haj Sassi : Je te tiens, tu me tiens par la barbichette !

BCE nomme Essid / Chahed nomme Haj Sassi : Je te tiens, tu me tiens par la barbichette !
National
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Le président de la République, Béji Caïd Essebsi, a nommé, lundi 6 août 2018, l’ancien chef du gouvernement, Habib Essid, comme son conseiller personnel chargé des affaires politiques. Quelques heures plus tard, l’actuel chef du gouvernement, Youssef Chahed, a nommé Kamel Haj Sassi, un vieux de la vieille, comme son conseiller personnel chargé, lui aussi, des affaires politiques.   Il s’agit là d’une attaque de Béji et une contre-attaque de Chahed. En effet, selon les échos venus de Carthage, Habib Essid est pressenti pour succéder à Youssef Chahed, si toutefois le Parlement ne renouvelle pas sa confiance en ce dernier. En nommant Haj Sassi, Chahed s’est allié à un vieux de la vieille, de la même trempe qu’Essid et qui connaît tous les coups auxquels ce dernier peut avoir recours.   Habib Essid : le « malmené » à la rescousse de Béji La nomination de Habib Essid à Carthage a étonné plus d’un. Et pour cause, il est sorti de la Kasbah sur ordre du même Béji Caïd Essebsi qui l’a nommé il y a deux semaines comme son conseiller politique. Il a intégré l’équipe de celui qui l’a menacé de le malmener s’il ne quitte pas la Kasbah, un certain Noureddine Ben Ticha ! Le retour de Habib Essid aux devants de la scène politique s’installe dans le cadre de la guerre qui oppose, depuis des mois, Carthage à la Kasbah. L’objectif de son retour est très simple : trouver le moyen de « se débarrasser » de Youssef Chahed qui tient tête et au Président de la République et à Nidaa Tounes et l’UGTT.   Kamel Haj Sassi : un vieux de la vieille à la rescousse de Chahed Quelques heures seulement après l’annonce de la nomination d’Essid à Carthage, Youssef Chahed réplique et annonce la nomination de Kamel Haj Sassi comme son conseiller politique. Une nomination qui a fait couler beaucoup d’encre, en vue du passé peu recommandable de Haj Sassi. En effet, le tout fraîchement conseiller à la Kasbah traîne quelques casseroles : l’affaire dite « Marey Carey » qui remonte à 2006, lorsque deux concerts de la chanteuse américaine ont été organisés en Tunisie. L’ancien président de la République, Zine El Abidine Ben Ali, et le neveu de Leila Ben Ali, Imed Trabelsi, ont été accusés de détournement de fonds., tout comme trois anciens ministres Samira Khayache, ancienne ministre de l’Equipement et de l’Habitat, Tijani Haddad, ancien ministre du Tourisme, et Kamel Haj Sassi, ancien secrétaire d’Etat à la Jeunesse. La chambre criminelle près de la Cour d’appel a décidé l’arrêt des poursuites contre les accusés en vertu de la loi organique relative à la réconciliation administrative, alors que les accusés, dont Haj Sassi, ont été condamnés à six ans de prison ferme.Haj Saasi a été, également, accusé, par un ancien du Courant islamiste, de torture, quand il était gouverneur à Kairouan entre 1988 et 1990. Il a été poursuivi en justice, mais l’affaire a été classée au niveau de l’instruction. Haj Sassi a également connu des démêlés avec la justice, en raison du Fonds 26-26 qu’il a dirigé pendant cinq années. Il a été audité et il a été prouvé que sa gestion a été saine. Haj Sassi est un ancien du « système » et il a l’habileté de contrer toute manœuvre venue de l’ancien de la vieille école, Habib Essid. Il est, également, très proche des décideurs de la machine RCDiste et peut, en cette qualité, trouver un soutien électoral indéniable pour Chahed s’il décide de se présenter en 2019.   Rencontre Chahed/Essid  Une semaine avant la nomination d’Essid à Carthage, Youssef Chahed a demandé à le voir. L’ancien chef du gouvernement a eu l’élégance de répondre positivement à la demande de son successeur. Cela s’est passé mardi 31 juillet, à Dar Dhiafa à Carthage, un lieu chargé de symboles et de souvenirs, pour les deux. Lors de cet entretien, qui a duré environ une heure, le sujet de retour d’Essid aux affaires politiques a été évoqué, tout comme les développements spectaculaires de l’actualité politique surtout après le vote de confiance sollicité et obtenu par Chahed en faveur de son nouveau ministre de l’Intérieur, Hichem Fourati.   Beji s’attaque à l’allié fort de Chahed Selon les nouvelles venues de Carthage, BCE s’apprête à passer le projet de loi relatif à l’égalité dans l’héritage devant le Parlement. Pour le reste des recommandations du rapport de la COLIBE, il attendra l’épilogue du dialogue sociétal qui s’en est créé. Avec cette décision, Béji s’attaque à l’allié fort de Chahed, à savoir Ennahdha. Sachant que Rached Ghannouchi a catégoriquement refusé de recevoir les membres de la COLIBE et que Mehrezia Laâbidi avait déclaré qu’Ennahdha est contre l’égalité dans l’héritage, BCE mettra le parti islamiste devant deux choix aussi amers l’un que l’autre : voter l’égalité et perdre une masse électorale importante à quelques mois des échéances de 2019 ou ne pas le voter et perdre l’estime de l’opinion internationale qui voit en Ennahdha un parti religieux moderne. L’unique choix qui restera à Ghannouchi est de négocier avec Béji. En position de force, ce dernier demandera certainement, en contre-partie, qu’Ennahdha lâche Youssef Chahed. Ainsi, il pourra lui ordonner de demander à l’ARP de lui renouveler sa confiance, en étant certain du résultat. La « guerre » entre Carthage et la Kasbah prend une nouvelle tournure qui ne semble pas favorable à Youssef Chahed. S’il a bien tenu le coup jusque-là, le chef du gouvernement risque désormais d’affronter seul les Caïd Essebsi. Une bataille qui s’annonce défavorable au très ambitieux Chahed. Sauf si Kamel Haj Sassi lui trouve une manœuvre, dont lui seul connaît le secret. N’est-il pas nommé pour cela ?

Meher KACEM  

Tunis-Hebdo du 13/08/2018



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