Festival de Cannes - Posoki (Directions)

Festival de Cannes - Posoki (Directions)
Culture
print



Festival de cannes 2017Posoki (Directions), cinquième film du réalisateur bulgare Stephan Komandarev, était parmi les 18 longs-métrages en compétition dans la sélection Un Certain Regard de cette 70ème édition du festival de Cannes.

Synopsis : Lors d’un rendez-vous avec son banquier, le propriétaire d’une petite entreprise, qui fait le taxi pour joindre les deux bouts, découvre que le pot-de-vin qu’il aura à payer pour obtenir un prêt a doublé. Le conseil d’éthique qui a examiné sa plainte pour chantage demande maintenant sa part. Ne sachant plus à quel saint se vouer, ce propriétaire tue le banquier et se suicide. Cet incident suscite un débat national à la radio sur le désespoir qui règne dans la société civile. Entre-temps, cinq chauffeurs de taxi et leurs passagers se déplacent dans la nuit, chacun dans l’espoir de trouver un chemin plus clair pour aller de l’avant.

L’histoire commence donc avec ce propriétaire d’entreprise, également chauffeur de  taxi  pour arrondir ses fins de mois, qui après sa dispute avec l’huissier  venu saisir  son  entreprise et avant  d’aller à son rendez-vous  avec  son  banquier, va conduire sa fille  à  l’école et prendre  dans  son  taxi  une jeune écolière devant cette même école.

Première des six histoires de taxi de ce long métrage, mais qui va donner une idée  sur le caractère de ce chauffeur et sur l’état général du pays. En effet, la jeune fille se révèle  être une prostituée. Lorsqu’il refuse de l'emmener dans l'hôtel où elle travaille et décide de la ramener à l'école, elle se met en colère, l'insulte et lui dit que de toute façon dans ce pays, tous sont comme elle, que sa fille à lui finira comme elle, que les gens qui travaillent honnêtement sont des miséreux, que la corruption règne partout, que la médiocrité les entoure et qu'au moins elle, contrairement à lui, gagne beaucoup d'argent.

 

Scène du film Directions Scène du film Directions

Dès cette première histoire de taxi, la couleur est annoncée. Plus d’éthique, plus d’espoir, le travail honnête ne paye plus. Le chauffeur,  droit dans ses bottes et incorruptible, résiste et ramène la jeune fille à l’école, il ne veut pas être complice. Il refuse cette société telle qu’elle est devenue. Mais lorsqu’il va à son rendez-vous et comprend qu’il n’y a aucune chance pour lui de garder son entreprise à cause de cette corruption qui règne, désespéré, il pète littéralement les plombs, tue son banquier et se suicide lui-même.

Tel est le point de départ.

Ensuite tout le film va se dérouler dans des taxis.

Six taxis différents, six histoires différentes.

Celle du juriste qui refuse de payer le prix de la course qu'il trouve trop élevé et qui fini, ayant lui aussi pété les plombs, par tuer involontairement le chauffeur.

Celle du chauffeur qui par hasard reconnaît son client. Celui-ci avait détruit sa vie en lui faisant refuser un visa de voyage en Italie où elle avait obtenue une bourse pour étudier.

Celle du prêtre qui devient chauffeur de taxi le soir pour nourrir sa famille.

Celle du chauffeur qui transporte des jeunes qui se saoulent à mort et qui lui rappellent son fils décédé, sa souffrance suite à ce deuil et sa solitude.

Celle du chauffeur qui sauve un homme du suicide.

À chaque fois un taxi différent, un ou des clients différents, des histoires différentes. Seuls points communs: un taxi, la même émission radio et un mal être profond.

 

Scène du film Directions
Scène du film Directions

L’émission radio permet d’écouter les bulgares. En effet, les auditeurs téléphonent pour donner leurs opinions sur un thème donné, et ce soir là, tous commentent le crime du matin. Chacun son avis, quoique la plupart s’expliquent le geste du chauffeur de taxi et comprennent son ras le bol face à la corruption, l'injustice, la médiocrité, la pauvreté...

Aussi bien les auditeurs, les chauffeurs ou les clients, tous dénoncent un mal être, un étouffement et une sorte de désespoir. Par le biais de ces gens, et en permettant un aperçu de leurs problèmes, le film est une critique de la société bulgare et du mal qui la ronge.

C'est noir, c'est triste, c'est oppressant. Tout est sale. Les immeubles sont moches. C’est fermé. Il y a plein de serrures partout. Du fer forgé aux fenêtres et portes pour se protéger…

Tous aspirent à mieux, à changer de vie.

Le film est très bien fait. L'idée est originale en soi.

Komandarev raconte qu’il a pensé à faire ce film lorsque, étant lui-même dans un taxi, il avait appris que son chauffeur était un ancien professeur en physique nucléaire et qu’il n’avait pas eu d’autres choix que d’exercer cette activité pour survivre. Il lui avait également rapporté que de nombreux collègues ainsi que des enseignants, des prêtres, des avocats… étaient dans l’obligation de faire les chauffeurs de taxi pour payer leurs factures.

Le réalisateur a également déclaré qu’il avait choisi de tourner chaque épisode en une seule prise pour donner une touche ultra-réaliste à son film. En effet, pendant 7 mois, avec une partie de son équipe, ils ont arpenté les rues de Sofia. 12 000 km parcourus pour repérer les routes et découvrir les secrets de la ville. Ensuite, les acteurs ont du répéter sur ces mêmes routes dans de vrais taxis pour que finalement chaque épisode soit filmé en une seule fois et en temps réel.

Stephan Komandarev a aussi expliqué qu’il a donné au film le titre Directions, car «chaque chauffeur de taxi suit sa propre direction, et les personnages cherchent tous vers où aller. Notre société, en revanche, ne sait plus où elle va».

Très beau film, très touchant.  Assurément l’un des plus beaux films de la sélection Un certain regard pour cette année 2017. A voir absolument.

 

 

Neïla Driss

  Lire sur le même sujet:

 




Festival International du Caire : une équipe permanente et un travail continu sont le secret de sa r...

Précédent

CinémaTdour : Une initiative innovante pour le rayonnement culturel en Tunisie

Suivant

Articles Similaires