Tunisie : Une politique de rigueur qui frapperait de plein fouet les plus démunis

Tunisie : Une politique de rigueur qui frapperait de plein fouet les plus démunis
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Tunis Hebdo | Youssef Chahed et son équipe gouvernementale sont confrontés à de vastes chantiers sur le plan économique. Ils doivent retrousser les manches…
Le legs économique catastrophique dont a hérité le gouvernement Chahed est la résultante de six années post-révolution caractérisées par des politiques budgétaires discrétionnaires, toutes soldées par des échecs et qui ont contribué à accroitre la dette publique.
Prévisions trop optimistes
Dans la Loi de Finances 2016, l’encours de la dette publique (d’après le portail du ministère des Finances) devra être de 50,354 milliards de dinars alors que le déficit budgétaire se situerait à 3,9% du PIB. A vrai dire, à quatre mois de la clôture de l’exercice 2016, ces prévisions sont trop optimistes par rapport à la réalité… Le nouveau Chef du gouvernement est, désormais, dans de beaux draps. Les grands défis économiques auxquels lui, et son gouvernement, sont confrontés s’opposent à la petitesse des moyens dont dispose le pays.
La production du phosphate périclite
Et pour cause : les ressources traditionnelles desquelles l’Etat puise l’argent pour assurer le gros de ses finances publiques sont, aujourd’hui, minées. La production du phosphate périclite. De 8 millions de tonnes en moyenne, la production est tombée à 2,5 millions, au mieux 3 millions, durant les six dernières années. Le climat social dans le bassin minier n’augure pas une reprise de l’activité phosphatée dans les proportions normales même si l’annonce de recrutement de 1073 agents (cadres et exécution) au GCT, en plus d’autres employés dans les sociétés de l’environnement relevant de la GCT à Gabès, Sfax et Gafsa, pourrait apaiser, un tant soit peu, les esprits.
Le tourisme tarde à se redresser
Même cas de figure pour le tourisme : ce secteur, qui s’est élevé au rang d’industrie en rapport avec le nombre d’entrées et recettes touristiques (6.902.749 visiteurs et 3,5225 milliards de dinars à titre d’exemple en 2010), tarde à redresser cinq années de crise. Malgré le développement du marché russe et la stabilité qui caractérise le flux des Algériens, le secteur n’a pas réussi à pallier la défaillance des marchés traditionnels français, anglais et allemand.
Conflit libyen : un manque à gagner de 4 milliards de dinars
A cela, il faut ajouter les pertes sèches qu’a entraînées le conflit libyen sur notre économie. On évalue le manque à gagner à près de 4 milliards de dinars, sans parler de la crise en Europe qui, elle aussi, a impacté négativement notre économie, notamment les échanges commerciaux, 80% du total de notre commerce extérieur s’effectuant avec le Vieux Continent. Il va sans dire que Youssef Chahed est devant un choix cornélien pour redresser la barre. Dans son discours prononcé devant les Représentants du peuple, il a menacé de prendre des mesures impopulaires au cas où les choses en restent là. Il a clairement indiqué que si les choses ne s’améliorent pas en 2017, la Tunisie devra adopter une politique d’austérité.
Hausse de la fiscalité
Reste que cette politique de rigueur sera-t-elle acceptée par le Tunisien quand on sait que cette politique prône la hausse de la fiscalité et la baisse des dépenses publiques dans le but de réduire le déficit budgétaire ? Nous comprenons l’attitude de Chahed quant à une politique rigoureuse des deniers publics. Le recours massif, ces dernières années, aux dettes extérieures menace aujourd’hui la solvabilité de l’Etat et risque de lui faire perdre le peu de crédit dont il bénéficie encore de la part de ses créanciers.
Dispenser les moins nantis
Freiner l’accumulation des déficits publics et ramener l’inflation à des proportions acceptables sont deux objectifs derrière l’adoption de la politique d’austérité. Mais cette rigueur doit dispenser les moins nantis des Tunisiens et ceux qui vivent dans la précarité, sinon le plan Chahed risque de capoter. S’il doit préserver les démunis, le Chef du gouvernement est tenu, aussi, à assurer les détenteurs de l’argent, les investisseurs entre autres, sur la nécessité de mettre la main à la poche et soutenir l’effort de développement du pays, surtout dans les points les plus reculés. Préalablement à la Conférence Internationale sur l’Investissement qu’abritera la Tunisie en novembre prochain, Youssef Chahed doit envoyer un message fort aux investisseurs locaux, leur donner la parole et être à l’écoute de leurs doléances pour que naissent des partenariats gagnant-gagnant entre l’Etat et les pourvoyeurs de fonds. Sans quoi, Chahed sera témoin de sa déchéance.

Chahir CHAKROUN




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