La Tunisie, le pays des paradoxes ?

La Tunisie, le pays des paradoxes ?
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Tunis Hebdo | La Tunisie est-elle le pays des paradoxes ? Probablement avec les événements successifs qui s’y déroulent quotidiennement. Les émotions les plus contradictoires s’y succèdent de façon à nous rendre à la fois paranoïaques et schizophrènes. En l’espace de vingt-quatre heures, le peuple tunisien est passé de la paranoïa la plus absolue avec la tentative crapuleuse visant le député, et accessoirement le Président de l’Etoile Sportive du Sahel, M. Ridha Charfeddine, à la satisfaction la plus béate après l’attribution du prix Nobel de la Paix au Quartet du Dialogue National. Ce sont deux événements qui ont eu un impact énorme sur le pays. Commençons par le second pour dire qu’il vient reconnaître un mode de transition politique que le monde entier peut, théoriquement, nous envier. Il faut dire que la violence extrême qui a caractérisé ce que certains analystes ont appelé, de manière abusive, « le printemps arabe », les crimes barbares commis en son nom, les destructions engendrées et les pires atrocités, plaide pour notre pays.
Le mérite revient également à la société civile tunisienne, les citoyens, en particulier les femmes et les jeunes
Les souffrances vécues par nos voisins libyens ou en Syrie ont fait de l’expérience tunisienne, plutôt pacifique malgré la volonté de certains de l’entraîner dans une véritable guerre civile à caractère religieux, une expérience unique de (relative) tolérance dans un océan de fanatisme et de dogmatisme. La réussite des échéances électorales a fini par convaincre le monde de la pertinence de l’expérience tunisienne érigée, désormais, en exemple à suivre par les autres pays aux situations comparables à la nôtre. Cependant, nous devons rappeler qu’indépendamment de la « question » de l’attribution de la paternité de cette initiative salvatrice au « Dialogue national », le mérite revient également à la société civile tunisienne, les citoyens, en particulier les femmes et les jeunes, qui avaient exprimé une volonté commune de couper l’herbe sous les pieds de ceux qui voulaient tirer la société vers une irréversible descente pour les affres du rigorisme et ont donc été les véritables leviers de la réussite de l’expérience tunisienne.
Un prix qui devrait nous permettre de donner une nouvelle image de notre pays dans le monde entier
Ce prix Nobel de la Paix nous remplit certes de fierté et montre que la consécration des idées de tolérance et d’espoirs démocratiques peut aussi naître sur les terres arabes. Il fait aussi peser sur tous les Tunisiens une forte responsabilité sur la nécessité d’aller encore plus loin sur la voie du pluralisme et des droits de l’Homme, mais à la condition de faire preuve d’un comportement civique que nous n’avons pas, malheureusement, encore acquis. C’est aussi un prix qui devrait nous permettre de donner une nouvelle image de notre pays dans le monde entier. Les médias du monde entier ont relayé cette information, et il s’agit maintenant de savoir capitaliser cet élan de sympathie qui peut apparaître envers notre pays pour nous refaire des amis à travers la planète, et l’exploiter afin de donner à nos relations internationales une autre dimension à même de contribuer à la relance économique et diplomatique. Mais, voilà que la tentative odieuse sur M. Ridha Charfeddine nous remet les pieds sur terre nous empêchant de rêver à des lendemains qui chantent.
Le spectre du terrorisme plane de manière menaçante sur notre pays
Les explications et les analyses des « experts » ou les conclusions des profanes nous ont parfois surpris, voire scandalisées, notamment de la part de certains qui ont l’indécence de parler d’une « piètre mise en scène », ou de certains qui attribuent cela à la lutte intestine que traverse Nidaa Tounès depuis plusieurs mois. L’inconscience, voire l’aveuglement de telles affirmations, ajoutées à un traitement de l’information d’une manière frisant le régionalisme, alors que ce qui est arrivé à M. Ridha Charfeddine est un problème d’ordre national, constitue un véritable sujet de préoccupation pour l’ensemble du pays, de ses institutions, de sa société civile et de toutes ses forces politiques. Sans entrer dans des supputations incertaines relativement au « choix » de vouloir éliminer M. Ridha Charfeddine, qui jouit par ailleurs d’une excellente réputation sur tous les plans, il est clair que le spectre du terrorisme plane de manière menaçante sur notre pays. Que ses origines soient politiques ou autres, les trafiquants de toutes sortes, ses auteurs ou ses mandataires ont tous un intérêt commun : instaurer l’anarchie et le désordre pour en tirer davantage de profits. Sur ce plan, nous ne pouvons passer sous silence cette forme de léthargie qui frappe le gouvernement, incapable à mon sens de remettre le pays sur le chemin de la relance réelle.
La Tunisie a besoin aujourd’hui de gouvernants qui osent
La Tunisie a besoin aujourd’hui de gouvernants qui osent, comme on le dit communément, « secouer le cocotier » ou « donner des coups de pied dans les fourmilières », mettre chacun à sa place, faire preuve de plus d’audace dans la confection des politiques publiques et de plus rigueur dans l’application de la loi. Bref, il faut donner le sentiment que le pays est maîtrisé, que l’on travaille d’arrache-pied pour l’extirper des multiples dangers qui le guettent, que l’on œuvre à restaurer une certaine éthique, une forme de morale, et de la probité dans l’ensemble des activités sociales et économiques, que l’on tente de mettre fin à l’impunité dont semblent jouir, et même, se prévaloir certaines gens qui veulent se draper aujourd’hui dans des habits vertueux alors qu’ils sont connus pour être des rapaces agissant dans l’illégalité la plus totale, que l’on est gouverné pour nous éviter de nouveaux épisodes comme ceux vécus par le député de la nation, M. Ridha Charfeddine, et nous permettre de rêver à de nouvelles consécrations pour faire de la Tunisie un berceau de paix et un pays d’avenir pour tous ses enfants.

L.L.




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