Tunisie : Redresser la barre

Tunisie : Redresser la barre
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Les conséquences de l’acte ignoble qui a frappé la ville de Sousse, trois mois après celui du Bardo, risquent d’être extrêmement nocives sur la situation économique et sociale du pays si l’on n’arrive pas, à prendre conscience, tous ensemble, de la gravité de la situation et surtout si on ne réagit pas de manière positive afin de dépasser ce moment délicat dans l’histoire de notre pays. On peut dire que la gravité de l’acte en lui-même a finalement amené le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour y faire face sur le plan sécuritaire. En effet, et si l’attentat du Bardo n’a pas produit l’effet escompté et a semblé tétaniser les gouvernants qui se sont contentés du limogeage de quelques responsables sécuritaires et du resserrement du contrôle de quelques institutions ; cette fois-ci, les décisions ont été plus radicales avec notamment l’adoption de l’état d’urgence décrété par le Chef de l’Etat.
Ennahdha : une position et son contraire
Sur ce plan, il convient de souligner que cette décision qui a fait l’unanimité au sein de l’opinion publique, n’a pas recueilli le même assentiment de la part des partis politiques y compris ceux qui forment le quatuor gouvernemental. A ce sujet, il convient de relever, encore une fois, le discours des Islamistes d’Ennahdha qui adoptent une position et son contraire. Cela se vérifie au moins sur deux décisions : la fermeture des mosquées hors de contrôle et qui sont devenus de véritables antres de l’extrémisme et de la violence politique et religieuse en disant qu’il ne faudrait pas que cela se transforme en guerre contre l’Islam. Mais qui a donc parlé de guerre contre la religion de l’écrasante majorité des Tunisiens ? Personne ! Ensuite, et en ce qui concerne l’état d’urgence, ils le soutiennent à condition qu’il ne mette pas en danger les libertés publiques. A ce propos, il faut rappeler qu’une décision pareille est rendue nécessaire par l’avènement d’un péril imminent (le terrorisme) qui menace le pays. Ce péril est là et bien réel, et par conséquent la décision se justifie.
Restrictions par rapport au statut normal des libertés
Sur un autre plan, elle impose automatiquement, par définition, des restrictions par rapport au statut normal des libertés avec l’extension des pouvoirs de police. Aujourd’hui, il est préférable de réduire son espace de liberté de manière provisoire et donner plus de moyens et de liberté de manœuvre aux autorités plutôt que de la perdre totalement si jamais le pays bascule dans l’horreur. Le gouvernement a aussi pris des décisions plus radicales telle l’édification de ce mur de tranchées, de sable et de dunes sur nos frontières avec notre turbulent voisin du sud, la Libye, afin de faciliter son contrôle et de limiter les multiples trafics qui foisonnent dans la région, et qui touchent autant les produits les plus divers que les armes. Il reste maintenant à Habib Essid et à son équipe d’entamer une douce mais rapide modernisation et transformation de tous les services sécuritaires afin de mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut et de les doter des moyens, y compris les plus sophistiqués pour leur permettre de se protéger et de protéger le pays. Sur le plan économique, on assiste aujourd’hui à une véritable catastrophe qui s’appelle le tourisme. On savait depuis longtemps que ce secteur est extrêmement volatile et fragile dans la mesure où sa réussite dépend essentiellement de facteurs extérieurs pas suffisamment maîtrisables par l’Etat ou les acteurs concernés.
Cette fois les gouvernements européens ont réagi différemment qu'au lendemain de l'attentat du Bardo
Au contraire de l’attentat du Bardo où la solidarité internationale a été présente et encourageante avec un vaste élan de sympathie, cette fois les gouvernements européens ont réagi autrement appelant leurs ressortissants soit à quitter la Tunisie, soit à n’y pas venir sauf dans des cas d’extrême urgence ou nécessité. Telle est la position du Royaume Uni, du Danemark ou de la Finlande. Cela a commencé à se faire sentir puisque plusieurs unités hôtelières du sud du pays, à Tozeur ou à Djerba, ont commencé à mettre la clé sous la porte. Cela risque de provoquer une véritable hécatombe en termes d’emplois directs et indirects, et par conséquent d’aggraver la situation sociale. C’est dans ce contexte particulièrement difficile que nous devons, en tant que peuple, avoir une saine réaction, avec devant nos yeux le seul intérêt du pays. C’est là que l’unité et le patriotisme des Tunisiens seront sollicités. Aujourd’hui, chaque Tunisien est appelé à décupler d’efforts pour réussir chacun dans son domaine à faire ce petit plus dans l’intérêt de l’ensemble de la communauté, mais aussi du sien. Une prise de conscience des efforts à fournir afin de créer un surcroît de richesses et de la nécessaire rigueur et discipline sociale et collective pourraient renverser la tendance en relançant l’économie du pays vers le haut.
Nous vivons en situation quasi-anarchique avec des citoyens peu soucieux du respect des lois
Aujourd’hui, il est nécessaire que l’on regarde la vérité en face, que l’on reconnaisse que nous vivons en situation quasi-anarchique avec des citoyens peu soucieux du respect des lois, des travailleurs faisant peu de cas de leurs professions, bref une cruelle réalité que nous devons absolument dépasser si l’on ne veut pas voir couler notre pays dans la violence et le désordre. Travailler davantage, soigner notre environnement, prendre soin des biens publics, se montrer discipliné en termes de comportement social et de consommation, assurer les meilleurs services possibles à nos compatriotes dans tous les domaines, tels sont les véritables défis qui contribueront à éloigner le spectre du terrorisme et à réinstaurer cette confiance sans laquelle les peuples ne peuvent avancer et les pays ne peuvent s’immuniser et se développer. Tous les Tunisiens sont appelés aujourd’hui à faire ce gigantesque effort collectif pour redresser la barre et repartir vers l’avant avec cette ambition historique de faire de notre pays cette île de prospérité et de démocratie dans un océan d’intolérance, de dogmatisme et de fanatisme.

L.L.




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