Comment ces journalistes vivent-ils la menace de mort ?

Comment ces journalistes vivent-ils la menace de mort ?
Tunis-Hebdo
print



Cinq personnalités du monde des médias, en l’occurrence Lina Ben Mheni, Sofiane Ben Farhat, Lotfi Laâmari, Naoufel Ouertani et Haythem Mekki, auraient été menacés de mort par le groupe islamiste Ansar Achariaâ, selon le ministère de l’Intérieur. Et malgré le fait que leur vie soit en danger, ces journalistes et blogueurs ne semblent, visiblement, pas prêts à faire des concessions. Face à la présence de son nom dans cette liste des personnalités médiatiques menacées de mort, la bloggeuse Lina Ben Mheni semble imperturbable: «Je ne vais quand même pas renoncer à mes principes et à mes convictions pour ça, non ? Vous savez, lors des premiers jours de la Révolution et juste avant la chute de Ben Ali, je sillonnais toute seule les rues afin de couvrir les événements, alors que les coups de feu fusaient de partout. C’est pour vous dire que la mort, je l’ai vue de bien près pour en avoir peur, aujourd’hui. Je pense qu’il est insensé d’avoir peur car nul ne peut échapper à son destin». Lina Ben Mheni, habituée à ce genre d’intimidation Dans ce même ordre d’idées, Lina Ben Mheni nous a informés qu’elle ne comptait, donc, pas s’enfermer chez elle mais qu’elle envisageait, plutôt, de vivre «normalement [sa] vie». D’un autre côté, la bloggeuse s’est dite habituée par ce genre d’intimidation: «Depuis juin 2011, je reçois, quotidiennement, des menaces de mort, surtout sur Facebook. Des messages anonymes dans lesquels on me traite souvent de «non-croyante», et en appelant à mon exécution». Cependant, malgré sa sérénité et son calme apparents, la bloggeuse nous a avoué qu’elle a, quand même, eu la chair de poule, pour la première fois de sa vie «lorsqu’elle a entendu, dans une vidéo projetée lors de la conférence de presse du ministère de l’Intérieur, son nom prononcé par un individu la menaçant de mort». D’ailleurs, en parlant de cette conférence de presse (très controversée) du ministère de l’Intérieur, le journaliste Lotfi Laâmari, dont le nom figure aussi sur la liste des personnages médiatiques menacés de mort, a affirmé, de son côté, que celle-ci n’avait rien apporté de nouveau: «Ce qu’on voulait savoir, nous, c’est le nom des gens qui ont commandité les assassinats et non pas ceux des exécutants», a-t-il souligné. Lotfi Laâmari accuse les milices d’Ennahdha Toujours aussi direct et aussi cash, Laâmari n’y est pas allé par quatre chemins pour accuser «les milices d’Ennahdha» d’être derrière les menaces de mort le visant: «Je crois que Rached Ghannouchi n’a pas du tout apprécié le message que je lui ai adressé, lors du dernier épisode de l’émission de «Bila Moujamala», et dans lequel je lui ai dit: «Ce n’est pas parce que tu t’es installé à Monplaisir que tu vas faire de la Tunisie ton plaisir. La Tunisie doit être notre plaisir à nous tous, sinon elle sera toujours ingouvernable». Laâmari a également affirmé sur sa lancée, qu’il n’avait pas peur des menaces de mort. «Par contre, ce qui me désole, c’est le fait de ne plus avoir une tribune dans laquelle je peux continuer à exposer mes opinions et mes positions. En effet, après l’arrêt du journal «Hakaik», dont lequel j’étais rédacteur en chef, et l’arrêt de diffusion de l’émission de «Bila Moujamala», je me trouve, aujourd’hui, au chômage», a-t-il ponctué. Dans ce même état d’esprit assez mélancolique, Laâmari a révélé sa grande désillusion par rapport à «cette Révolution, dans laquelle les hommes politiques portent -désormais- des gilets pare-balles et les intellectuels se baladent entourés de gardes du corps». Sofiane Ben Farhat peu surpris Quant à Sofiane Ben Farhat, journaliste et chroniqueur de l’émission «Ness Nessma» sur la chaîne Nessma TV, il a affirmé ne pas être particulièrement surpris par les menaces de mort dont il est la cible: «La présence de mon nom sur la liste des personnes visées par Ansar Achariaâ ne m’a pas beaucoup étonné. En effet, un cadre des services de renseignement militaires m’avait fait part de ces menaces, il y a plus d’une année. De plus, je reçois, régulièrement des menaces de mort anonymes, sur mon lieu de travail», a-t-il expliqué. Comme ses collègues, Sofiane Ben Farhat a affirmé ne pas avoir peur des terroristes et a affiché sa détermination à continuer son travail journalistique en toute liberté, en critiquant à la fois «le pouvoir et ceux de l’opposition». Naoufel Ouertani très surpris de voir son nom figurer parmi la liste des personnalités «à abattre» De son côté, Naoufel Ouertani, animateur vedette de l’émission «Labès» sur Attounissia TV et «Midi-Show» sur Mosaïque FM, s’est dit être très surpris de voir son nom figurer parmi la liste des personnalités «à abattre». «En effet, je n’ai jamais reçu de menaces de mort, avant», a-t-il révélé. Dans ce même cadre, l’animateur d’Attounissia TV n’a pas dissimulé la peur pour son entourage, après que son nom ait été cité dans la fameuse liste. «Mais cela ne me dissuadera pas à continuer mon travail, normalement, et à rester fidèle à mon esprit critique», a-t-il assuré. Haythem Mekki ne s’embarrasse pas Quant à Haythem Mekki, il n’a été ni étonné ni surpris outre mesure d’être dans cette liste de personnes à abattre. «Ce n’est pas nouveau pour moi car je suis menacé depuis l’assassinat de Chokri Belaid, le 6 février dernier et ce n’est donc pas aujourd’hui que j’apprend cette nouvelle. J’ai été menacé de mort, mais les mauvaises langues avaient, à l’époque, démenti ces menaces de mort à mon encontre et à l’encontre de certains de mes collègues». Haythem renchérit en précisant qu’il a été menacé de mort mais que ça ne l’a jamais préoccupé. «Je suis menacé mais cela n’a rien changé dans mes habitudes quotidiennes qui sont restées les mêmes entre l’avant et l’après 6 février 2013». Enfin, il convient de signaler que tous ces journalistes cités ci-dessus bénéficient d’une garde rapprochée assurée par le ministère de l’Intérieur.

Slim MESTIRI




Nos banques : à radin, radin et demi !

Précédent

Franc-parler : Tunis-Munich !

Suivant