La vie d'Adèle, le trophée et la polémique

La vie d'Adèle, le trophée et la polémique
Culture
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La Palme d'or du festival de Cannes 2013 a été attribuée hier soir au film La vie d'Adèle, du Franco-Tunisien Abdellatif Kechich. Lors de son discours de remerciement, ce dernier n'a pas omis de rendre hommage à la jeunesse tunisienne qui a fait la révolution, en lui souhaitant de pouvoir vivre librement, s'exprimer librement et aimer librement. Seulement voilà, aussitôt le palmarès annoncé, une grande question a été posée sur la toile tunisienne: ce film sera-t-il projeté un jour en Tunisie ? C'est le sujet même du film qui fait polémique, à savoir, une histoire d'amour entre deux lesbiennes. La majorité des internautes tunisiens pensent, à tort peut-être, qu'au vu de l'atmosphère générale en Tunisie et de la montée de l'intégrisme, le film de Kechiche ne sera jamais projeté sur nos écrans. L'homosexualité étant un sujet tabou dans notre société, ce film risque de heurter la sensibilité des spectateurs tunisiens et notamment celle des plus conservateurs et de déplaire aux islamistes au pouvoir. La réaction du ministère de la Culture n'a pas tardé. Selon le site de Radio Kalima, Mr Fathi Kharrat, directeur général du cinéma,tout en se félicitant du succès du film, a déclaré que celui-ci s'adressait à "un environnement particulier" et que des réactions violentes à la projection du film dans nos salles pourraient avoir lieu. Après les scandales qui ont accompagné la projection du film de Nadia Fani, "Ni Allah ni maître", et de Persepolis, doit-on désormais s'attendre à un "veto" du ministère de tutelle à chaque sortie d'un "film particulier" ? Les choses auraient-elles été différentes si le metteur en scène du film n’était pas tunisien? Assistera-t-on au retour d'une nouvelle ère de censure ? Les Tunisiens en général et la jeunesse tunisienne en particulier, celle évoquée par Kechiche, hier soir, sur le podium du festival de Cannes, n'ont-t-ils pas encore acquis le droit de pouvoir évaluer par eux mêmes un film ? Qui détient le droit de juger une œuvre cinématographique et déterminer si elle est bonne pour notre société ou ne l'est pas ? Où se situe la limite de la liberté de penser chère payée par les Tunisiens dans cette affaire ? L'art en général, est-il sujet aux appréciations morales ? Nous n'en sommes pas encore là, le film ne sortira officiellement en France qu'en octobre prochain, attendons donc de voir, et qui sait, d'ici là, les vents auront peut-être tourné.



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