L’art de libérer les indemnités parlementaires

L’art de libérer les indemnités parlementaires
National
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En vertu de l’article 78 de la loi des finances pour l’exercice 2013, proposé par le député Habib Khedher et adopté par la majorité de ses collègues, il appartient au Président de l’Assemblée nationale Constituante (ANC) de fixer les indemnités du Président, des vice-présidents et des députés. Cette proposition du député intervient quelques semaines après l’arrêt du tribunal administratif portant annulation d’une décision antérieure de Mustapha Ben Jaâfar relative à la majoration des indemnités service et attaquée par Maître Neji Baccouche pour excès de pouvoir. Son annulation, d’après le tribunal administratif, réside dans l’incompétence du Président de l’ANC en la matière. La proposition de Habib Khedher n’est pas sans rapport avec l’arrêt du tribunal administratif précité puisque son objet consiste à reconnaître au président de l’assemblée le pouvoir de prendre des décisions dans ce domaine. De ce fait, l’argument du tribunal administratif au vu duquel il a annulé la décision de majoration des indemnités parlementaires n’a plus de raison d’être. Habib Khedher qui a été à l’origine de l’article 78 a indiqué sur Mosaïque FM dans l’émission Midi Show de ce jour, que sa proposition vise à combler une lacune dans la loi et non à préparer le terrain à une nouvelle décision d’augmentation des indemnités parlementaires. Il a critiqué la réaction du député Mongi Rahoui qui a été contre le projet, considérant que la loi des finances se limite à fournir les moyens nécessaires à la couverture des dépenses de l’Etat et à la réalisation des investissements publics et n’inclut pas des dispositions relatives à la rémunération des fonctionnaires et des députés. Selon Habib Khedher, l’adoption de sa proposition ne conduit pas forcément à la majoration des indemnités mais il n’exclut pas une décision dans ce sens émanant du Président de l’ANC, dans la limite de l’enveloppe affectée à l’Assemblée. Il est allé jusqu’à admettre le caractère rétroactif d’une telle décision. Intervenant dans la même émission, le professeur d’université Mohamed Salah Ben Aissa, ancien doyen de la faculté de droit de Tunis et spécialiste en droit administratif est d’un avis contraire. Il a précisé que les indemnités des députés sont fixées par un décret d’application sur la base de la loi des finances de 1988. En d’autres termes, il estime qu’il n’existe pas de lacune dans la loi justifiant la proposition. Il a ajouté, par ailleurs, que cette proposition est inconstitutionnelle dans la mesure où elle confère au Président de l’Assemblée nationale Constituante un pouvoir qui relève de la compétence du gouvernement. A cet effet, il s’est prévalu de l’article 17 de la loi fixant l’organisation des pouvoirs provisoires (mini-constitution) suivant lequel, l’application de la loi y compris la loi des finances, est du seul ressort du pouvoir exécutif. Certains juristes et constitutionnalistes ayant eu à se prononcer sur cette question ont fait recours au droit constitutionnel comparé. Ils rappellent que dans la plupart des pays, la décision relative aux émoluments des députés se prend par le chef de l’Etat ou du gouvernement en leur qualité de chef de pouvoir exécutif. Dans les pays où la décision est attribuée à l’autorité législative, tel le cas des USA, elle n’a d’effet qu’après élection d’une nouvelle chambre parlementaire et ne profite qu’aux futurs députés.



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