Télé nationale: attention, peinture fraîche !

Télé nationale: attention, peinture fraîche !
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Dans la bataille pour la liberté de la presse, on ne peut plus dire que les chaînes du service public se mettent au premier rang. L'objectivité devient denrée rare sur les deux chaînes, et les Tunisiens remarquent tous les jours un peu plus un changement foncier autant dans le contenu que dans le ton de la ligne éditoriale. Pour ne citer que des exemples récents, il y a eu un black-out total sur le naufrage d'une cinquantaine de Tunisiens au large de Lempedusa, suivi d'une diffusion de chants religieux alors qu'une bataille rangée avaient lieu autour de l'ambassade américaine à Tunis, et que l'école américaine brûlait. Le soir même, c'est Rached Ghannouchi, président du mouvement Ennahdha, qui est sur le plateau du journal télévisé, et qui passe avant l'allocution du président de la république. Depuis ce matin et pour un mois, Mr Khademi, ministre des Affaires religieuses en personne prodiguera des conseils pour les futurs pèlerins tunisiens. Mais c'est dans le journal télévisé que le changement est le plus manifeste: il n'y a pratiquement plus d'invités sur le plateau, les dossiers chauds de l'actualité sont traités avec une insoutenable banalité, et les sujets d'ordre religieux prennent de plus en plus d'espace. Ce changement a atteint son paroxysme il y a deux jours, quand, dans le journal de 18h30, une journaliste a invité un imam radical pour débattre de sujets sociaux-économiques, et que ce dernier a indiqué, le plus simplement du monde, de démembrer tous les sit-inneurs, exactement comme l'avait indiqué le député Sadok Chourou à l'assemblée constituante. La journaliste, bien que déconcertée, avait laissé parler cet imam au prêche violent sans l'interrompre, et l'a même relancé sur le sujet du film qui porte atteinte au prophète. L'exemple peut paraître anodin, mais aux yeux de beaucoup de Tunisiens, cet incident qui s'est produit en direct était un outrage au caractère civil de l'état et une insulte à la république du fait que les percepts de l'islam se substituent aux lois. Il est clair que cette nouvelle orientation de la télévision publique est le fruit de la nomination de Imen Bahroun à sa tête. Très contestée par les journalistes et le personnel de la télévision nationale, Mme Bahroun, comme son prédécesseur, a été nommée avec le rang et les avantages de secrétaire d'État (voir JORT n°: 072 du 11/09/2012). Les Tunisiens qui se sont à peine réconciliés avec leur télévision nationale se voient obligés de l'abandonner de nouveau, l'enthousiasme disparaît avec la volonté affichée d'Ennahdha à mettre la main sur les médias en général, et sur le service public en particulier. La télévision gouvernementale que Jebali appelle de tous ses voeux est en marche grâce à l'efficacité de Mme Bahroun. La télé nationale est un chantier, on refait les peintures, le mauve qui a trop duré est décapé pour être remplacé par du bleu. . . barbeau.



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