Moncef Marzouki : Il « snobe » le peuple, mais il écrit à El Jazeera !

Moncef Marzouki : Il « snobe » le peuple, mais il écrit à El Jazeera !
National
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Encore une fois, le Président de la République, Moncef Marzouki, s’abstiendra de s’adresser au peuple tunisien. Même lors de certaines occasions comme celle qui se présentera à lui, la cérémonie d’ouverture de la XXVIIIème session de l’Académie Internationale de Droit Constitutionnel, qui constitue traditionnellement une opportunité pour faire un discours, si succinct soit-il. Il serait pourtant bien inspiré d’en faire, et l’occasion s’y prête bien, alors que l’on parle déjà de l’option, d’au moins ses alliés de la troïka, pour le régime parlementaire comme le futur régime politique qui sera institué dans la deuxième Constitution de la république. Mais, voilà ! Le Président « snobe » le peuple ! Il faut dire que les camouflets successifs qui lui sont infligés ces derniers temps par ses propres alliés, et aussi par ses anciens compagnons, le privent de mots convaincants à dire à ses compatriotes qui n’apprécient pas d’avoir un Président sans pouvoirs ! En revanche, Moncef Marzouki s’est adressé à El Jazeera dans une opinion qui ne manque pas de lucidité ou de punch, même si « notre Président » semble un idéaliste invétéré ! Évoquant la situation en Tunisie, il a mis tout d’abord en évidence l’existence d’une lutte féroce entre différentes forces sociales, qui, chacune défend ses intérêts. Cependant, il a souligné aussi que le peuple tunisien a démontré une unité sans faille et a exprimé clairement son refus de la violence pour la résolution des conflits de quelque nature qu’ils soient. Il a, ensuite, développé l’idée que nous devions nous inspirer des valeurs ancestrales, tirées des expériences de ceux qui nous ont précédés, et qui constituent le meilleur moyen et la meilleure garantie pour nous éviter de commettre des erreurs. Le Président insiste sur la nature des rapports sociopolitiques qui doivent être guidés par la recherche de l’intérêt général. Il a précisé les places respectives de l’intérêt général et de l’intérêt privé. L’intérêt général doit assurer la coexistence sociale, éviter la violence et préserver de la paix civile dans ses trois dimensions : la dignité, la richesse et le pouvoir. Il poursuit en disant que ceux qui croient pouvoir utiliser l’intérêt général pour dissimuler leurs intérêts privés, mésestiment l’intelligence sociale toujours capable de discerner entre ceux qui militent réellement pour l’intérêt général et ceux qui le détournent à leur profit. Il proclame que la réalisation de l’intérêt privé passe par celle de l’intérêt général. Puis il donne quelques pistes soulignant que l’intérêt privé ou individuel réside aujourd’hui dans la recherche de cet intérêt général qui se situe aujourd’hui en Tunisie dans trois défis :
  1. Un défi politique : La réussite du consensus historique entre le courant laïc modéré et le courant islamiste modéré qui peut permettre l’édification d’un régime démocratique qui passe par le refus de toute monopolisation de la question religieuse. Ce consensus serait aussi déterminant pour la construction des institutions sociales comme l’enseignement, la santé, la sécurité, la culture et l’information ; aucune force politique n’étant capable d’imposer ses vues, seule, ou de les mettre sous sa coupe.
  2. Un défi socioéconomique : Gagner la bataille contre la pauvreté. La révolution tunisienne n’a pas eu lieu pour l’établissement de la Charia ou du Califat ni même pour la démocratie, mais pour mettre fin à l’extrême pauvreté et dénuement dans lesquels se trouvaient au moins quatre millions de Tunisiens. Même le Salafisme est une expression de cette pauvreté devenue insupportable. Je suis convaincu que l’économie libérale seule ne peut résoudre le problème, mais il faudrait compter sur des solutions autres comme le soutien des émigrés, le rééchelonnement de la dette extérieure, la mobilisation des ressources nationales. Il faut aussi instaurer une révolution agraire en distribuant les terres collectives aux petits agriculteurs.
  3. Un défi stratégique : Œuvrer pour l’intégration maghrébine et plus tard arabe. Une grande part de la réussite dans la lutte contre la pauvreté passe par l’intégration maghrébine. Il a réitéré la question des cinq libertés accordées aux ressortissants maghrébins (la circulation, le travail, la résidence, la propriété et la participation aux élections municipales) qui sera proposée au prochain sommet maghrébin.
Des idées généreuses et une analyse que l’on peut considérer même comme optimiste, un optimisme qu’il a exprimé à la fin de son écrit considérant que la lutte contre les ennemis de la révolution sera gagnée.



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