Manipulation malsaine : Ben Ali toujours dans les cœurs !

Manipulation malsaine : Ben Ali toujours dans les cœurs !
National
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Les plus avertis sauront que les instituts de sondage, tout aussi sérieux qu’ils sont et tout aussi scientifiques qu'ils puissent être, demeurent un formidable, mais dangereux instrument de propagande et de manipulation. Dans un inexplicable élan, Sigma Conseil vient de réaliser un sondage publié par le "Maghreb" et qui laisse, à première vue, pantois. Selon les résultats de cette enquête d’opinion, 42% des Tunisiens interrogés regretteraient l’ère Ben Ali, estimant que le pays se portait mieux sous la dictature. Un chiffre effarant, quatorze mois après une révolution qui a mis sens dessus dessous le monde arabe. Mais reste à savoir dans quelles conditions a été réalisée cette enquête auprès des personnes interrogées ? Sur les mille Tunisiens sondés, près de la moitié regretteraient donc le départ de Ben Ali ! Est-on vraiment pour le retour de Ben Ali au Palis de Carthage ? À vrai dire, ce sondage – comme tous les sondages d’ailleurs –, n’est pas aussi innocent. Il est même provocateur tout comme l’a toujours été Sigma Conseil. Là, se pose la question de la crédibilité de ce sondage alors que Sigma Conseil est réputé pour avoir, par le passé, épousé les causes de l’ancien régime. Il n’en est pas à sa première enquête chiffrée et les plus avertis savent pertinemment que les instituts de sondage sont dictés par la loi de l’argent. Il n’y a pas si longtemps que cela, Sigma sacrait, à travers un autre sondage "commandité", Cyrine Ben Ali, fille du dictateur. Elle devenait ainsi la femme d’affaires de l’année 2010, mettant sur la touche les nombreuses compétences que peut compter ce petit pays qu’est la Tunisie. Le tout est de savoir poser la question qui ouvre la voie à multiples interprétations. Les méthodes utilisées restent scientifiques, mais tout est dans l’approche. De là, on comprend mieux comment un institut comme Sigma, rôdé comme il est, est parvenu à arracher les réponses qu’il voulait entendre. C’est professionnel et scientifique ! Mais c’est aussi de la manipulation qui consiste avant tout à créer le buzz, à se faire de la pub afin de retrouver un prestige perdu depuis la fuite des Ben Ali. C’est en tout cas, malsain ! C’est alarmant pour la majorité des petites gens ! C’est aussi un message abstrait que veut faire passer le "Maghreb", connu pour ses prises de position anti-Ennahdha. Dans ce désespoir et ce pessimisme ambiant qui régit notre quotidien depuis plus d’une année, ne vaudrait-il pas mieux rappeler Ben Ali ? Là aussi, le malsain prédomine. Opposer deux ennemis jurés que sont Ben Ali et Ennahdha dans ce jeu malsain de questions détournées et vicieuses et en faire ressortir des chiffres qui donnent raison à la dictature, jettent un trouble dans les esprits. Entre machinations passées et manipulations futures, la limite est devenue infime. L’illustration est d’ailleurs présente dans ce sondage qui assène le coup avec 78,3% de mécontents concernant la gestion du pays de la part du gouvernement actuel, mais aussi avec 53,5% des personnes interrogées qui estiment que ce gouvernement est la cause des problèmes actuels. De là, il est "naturel" d’avoir 42% de Tunisiens souhaitant le retour de Ben Ali vu la détérioration de la situation générale. Tout est dans la manipulation ! Reste à savoir qu’en pense Ben Ali lui-même qui doit se délecter de ces chiffres ! À moins qu’un autre dictateur ne vienne en sauveur. Cela nous rappelle la mémorable vidéo créée par Memac Ogilvy Label à l’occasion d’une campagne «Le retour de Ben Ali à la Goulette» faite pour le compte de l'association tunisienne Engagement Citoyen, destinée à mettre en garde les Tunisiens. Si aujourd’hui, les Tunisiens parviennent à regretter un dictateur, c’est peut-être aussi parce que ce gouvernement ne fait rien pour ces Tunisiens. Si le "Maghreb" a voulu faire le buzz, c’est aussi pour qu’on suive son regard, à savoir qu’il faut prendre garde de ne pas retomber sous une autre forme de dictature… celle de l’argent et celle des grosses fortunes qui ont perdu un atout de charme quand Ben Ali a été chassé du pays !  



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