Prix des hydrocarbures : quand Ennahdha s’oppose à la Troïka au nom du peuple, le gouvernement peut intervenir au nom de la loi

Prix des hydrocarbures : quand Ennahdha s’oppose à la Troïka au nom du peuple, le gouvernement peut intervenir au nom de la loi
National
print



Dès l’annonce de l’élaboration de la loi des finances complémentaire, des bruits ont commencé à courir au sujet d’une éventuelle augmentation du prix des hydrocarbures. La rumeur s’est confirmée suite à une conférence de presse tenue le 3 mars 2012 par le ministre de l’Industrie, Monsieur Lamine Chakhari, qui a annoncé une probable augmentation du prix des produits pétroliers dans le cadre de la loi des finances complémentaire, justifiant cette éventualité par la montée des cours du pétrole sur le marché international et le coût des projets d’investissement prévus dans le cadre du programme du gouvernement. Mais, coup de théâtre, l’information a été démentie par la présidence du gouvernement qui dans un communiqué publié le 7 avril 2012 a indiqué qu’elle est dénuée de tout fondement et qu’aucune mesure n’a été prise dans ce sens. Seulement voilà, le projet de loi des finances complémentaire soumis à la constituante prévoit la révision à la hausse du prix des hydrocarbures. Pour justifier sa décision, le ministre des Finances, Houcine Dimassi, qui du temps où il était dans l’opposition critiquait la flambée des prix, s’est prévalu des mêmes arguments avancés par M. Chakhari lors de sa conférence de presse du 3 mars 2012. Cette valse-hésitation rappelle les circonstances qui ont précédé la révolte du pain. Mansour Moallah avait préconisé la suppression de la caisse de compensation, et feu Mohamed Mzali avait démentit. Et le 1er janvier 1984, le prix du pain avait doublé sur ordre de Bourguiba d’après le témoignage de Mzali. Le feuilleton ne s’est pas arrêté là. En réaction à la décision d’augmentation, le député Moez Belhaj Rehouma, du mouvement Ennahdha, a fait connaître que ses homologues dans le mouvement voteront contre la décision qu’ils trouvent impopulaires et de nature à aggraver la situation des classes modestes et démunies, dont le niveau de vie est assez critique. Cette prise de position, une fois traduite dans les faits, sera une première sur les plans politique et juridique. Politiquement, ce sera de leur part un vote contre la Troïka où leur mouvement détient la part du lion à moins qu’il s’agisse d’une machination populiste en prévision des prochaines élections destinées à faire croire que la majorité privilégie l’intérêt général sur les choix politiques. Juridiquement, leur vote aussi massif soit-il, sera contraire à la loi. S’agissant, en effet, d’une mesure rentrant dans le cadre de la loi des finances et qui a pour visée de limiter le déficit budgétaire, elle doit être perçue sous l’angle de la loi organique du budget du 8 décembre 1967 qui est encore en vigueur. L’article 30 de cette loi interdit aux députés de voter dans un sens qui entraîne une augmentation d’une charge, la réduction d’une recette ou l’aggravation d’un déficit. Les dispositions de cet article s’expliquent par le fait qu’un député a toujours tendance à réduire les recettes de l’État et à augmenter les dépenses publiques soit pour plaire à ses électeurs et se rapprocher des masses soit pour bloquer l’activité du gouvernement lorsqu’il s’agit d’un député de l’opposition. Outre la loi organique du budget, l’État a mis en place depuis 2009 un système de régulation qui permet d’ajuster à la hausse et à la baisse des prix intérieurs des produits pétroliers chaque fois que l’écart entre le prix mondial et le prix d’équilibre de référence atteint les 10 dollars. Par rapport à ce système, la situation sur le marché international justifie amplement la décision d’augmentation des prix. Mais par rapport à la situation sociale du citoyen, la décision ne peut être que désastreuse sur le pouvoir d’achat. Certains mettant en garde contre ses conséquences sociales et aussi économiques, conseillent de chercher la solution ailleurs .Ils proposent, notamment, la compression des charges, la suppression des dépenses inutiles, la réduction des avantages exorbitants attribués aux hauts fonctionnaires du gouvernement et la réactivation de la compagnie des phosphates de Gafsa dont les pertes se chiffrent à des centaines de milliards en raison de la protestation des chômeurs de la région.



André Parant juge nécessaire de préserver les acquis démocratiques en Tunisie

Précédent

Stress hydrique : le taux de remplissage des barrages est de 35,8%

Suivant