Mehrézia Labidi-Maïza : une islamiste libérale ?

 Mehrézia Labidi-Maïza : une islamiste libérale ?
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Osons déchirer ce voile qui nous voile la face : qui est Mehrézia Labidi-Maïza, deuxième personnalité de l’Assemblée constituante ? Presque totalement inconnue du paysage politique tunisien, Mehrézia Labidi-Maïza a fait lundi 22 novembre 2011 une entrée fracassante dans la sphère politique. L’élue du parti Ennahdha, quasiment inaperçue pendant les élections du 23 octobre dernier, se voit comme par magie propulsée au devant de la scène politico-médiatique pour occuper désormais le prestigieux poste de vice-présidente de l’Assemblée Constituante. Après des études brillantes à l’Ecole normale de Sousse, Maherzia Labidi-Maïza part à Paris où elle poursuit des études en traduction, d’abord, à la Sorbonne et, ensuite, à l’Institut Européen des Sciences Humaines à Saint Denis. Citoyenne française, statut qu’elle revendique puisqu’elle vit en France, Mme Labidi a été élue du mouvement Ennahdha dans la circonscription de France I. Et c’est cette double nationalité qui a fait l’objet de controverse auprès de ses détracteurs. La vice-présidente de l’Assemblée est une femme engagée dans la vie politique et associative. Elle préside le réseau mondial des « femmes croyantes pour la paix ». Elle est également co-présidente de « Religions pour la paix ». Prônant un islam tolérant et ouvert sur les autres, nul doute que l’élue islamiste rétablira l’image quelque peu écornée du mouvement Ennahdha, surtout après les interventions de Souad Abderrahim et Hamadi Jebali qui ont fait couler beaucoup d’encre. Du pain béni pour la formation d’inspiration religieuse. Mme Labidi-Maïza s’est en effet distinguée pendant l’été 2010 à l’occasion du projet de loi interdisant le niqab, en France. Dans sa « Lettre ouverte à mes sœurs qui portent le voile intégral » qu’on peut lire sur le site officiel du Conseil français du Culte Musulman, l’auteure donne à lire une vision nullement austère de l’islam dans une réflexion qui pour être éminemment religieuse, n’en demeure pas moins souple. En effet, il se dégage de sa pensée subtile une sorte de réserve quant au niqab, comme l’illustre cette question oratoire : « Est-ce rendre service à l’image de l’islam que de sortir dans la rue la face couverte ? ». Son attachement au voile ne l’empêche pas de souligner que le plus important est ce que le cœur ressent. Le voile n’est rien s’il n’est pas au diapason des valeurs que la religion véhicule : la bonté, l’altruisme et la tolérance. L’islam qu’elle défend est en définitive l’islam de l’ « équilibre » et de la « juste mesure », qui exhorte au savoir et à la connaissance et qui se veut ouverture et dialogue avec l’autre. Sur la problématique notion de « chariaâ », elle la conçoit plutôt comme voie, chemin que comme application rigoriste de lois. La posture de Mehrézia Labidi-Maïza laisse ressortir l’image d’une islamiste libérale et moderne. Quant au voile, une question se pose : et s’il nous apprenait à ne plus nous fier au paraître, par essence imparfait, pour vouloir saisir l’être, difficilement accessible ? Mais c’est là une autre histoire pas seulement de piété, mais surtout philosophico-esthétique.



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