Décryptage : Borhène Bsaies, benaliste jusqu’au bout des ongles

Décryptage : Borhène Bsaies, benaliste jusqu’au bout des ongles
National
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L’émission « Essaraha Raha » (La vérité est apaisement) de Hannibal TV, enregistrée au mois de Ramadan dernier avec pour invité Borhène Bsaies, a été présentée samedi 24 septembre. Tant attendu l’entretien entre Samir El Ouafi et son invité a tenu ses promesses. Durant presque deux heures l’animateur n’a eu de cesse d’ « essorer » celui qu’on peut considérer, sans exagérer, comme le « zélateur » de Zine El Abidine Ben Ali. Telle est la conclusion qu’on peut tirer de ses propos qui ont pris l’allure d’une justification de son allégeance au président déchu. Une allégeance jusqu’au boutiste manifestée avec une arrogance sans égale ce 13 janvier 2011 sur la chaîne Al Jazira alors que le soulèvement gagnait tout le pays. Ces images choquantes seront à l’origine de la cristallisation de la haine que lui portent beaucoup de Tunisiens. Dans les périodes d’insurrection et de violence, tout peuple a besoin d’un bouc émissaire. Borhène Bsaies en a été l’exemple idéal pour la Révolution tunisienne. Dans la vie de ce professeur de l’enseignement secondaire avide d’ascension politique, il y a assurément un avant et un après 14 janvier 2011. A la question de l’animateur sur ce qu’il a gagné et perdu de ces six années passées aux ordres de Ben Ali, Borhène Bsaies dit avoir acquis de l’expérience. Mais quelle expérience dès lors qu’il s’excommunie lui-même de la sphère médiatico-politique. Aveu amer d’un échec qu’il essaie de dissimuler derrière une sorte de reconversion religieuse à peine perceptible à coups de citation coranique. A l’évidence cette expérience fut un véritable traumatisme si l’on en juge par ce corps fortement amaigri et ce visage blême et tiré. C’est que l’homme, en dépit de son mea culpa, continue visiblement à manger son pain noir. Derrière son costume sombre qui semble refléter l’âme d’un damné, Borhène Bsaies conserve sa brillante verve verbale un tantinet tremblante et qui pour être séduisante n’en est pas toujours convaincante. S’il a raison de stigmatiser les héros d’aujourd’hui, tous bords confondus, au regard de ce qu’ils furent avant le 14 janvier, s’il n’a pas tort de rappeler que toute personne aurait accepté la sollicitation que Ben Ali lui a faite, on ne peut en revanche comprendre sa fascination pas seulement pour le pouvoir mais surtout pour le président Ben Ali dont la médiocrité était un secret de polichinelle. En effet, les limites intellectuelles du dictateur détrôné mais aussi ses lacunes politiques qui frisent le ridicule sont de notoriété publique. S’il veut bien nous persuader du rôle qu’il a joué dans les affaires de Taoufik Ben Brik et de Fahem Boukadous, Borhène Bsaies occulte le fait qu’il servait un terrible dictateur. Voilà pourquoi il apparaît au mieux comme un anti héros digne d’un Don Quichotte qui, voulant combattre le mal, se retrouve réduit à lutter contre les moulins à vent. Mais là où le propos paraît surprenant, presque provocateur, c’est lorsque Borhène Bsaies dénie le terme « déchu » ne voulant parler que de l’ « ancien » président. Si les mots ont encore un sens, ce choix en dit long sur la fidélité du zélateur qui n’aura, durant deux heures, à aucun moment critiqué le dictateur déchu. Curieux tout de même lorsqu’on songe aux multiples scandales dont Ben Ali a été l’auteur. Ainsi comme pour marquer sa singularité vis-à-vis de tous ceux qui ont retourné leur veste (ils sont légion), Borhène Bsaies demeure on ne sait par quelle outrecuidance benaliste jusqu’au bout. La retraite prématurée qu’il se donne lui donnera suffisamment le temps pour procéder à une salutaire introspection. On compte sur son intelligence et loin de toute rancœur. Au nom du pardon.



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