Pour que l’avenir de la femme ne devienne pas son passé

Pour que l’avenir de la femme ne devienne pas son passé
Tunis-Hebdo
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Le congé de maternité sera prochainement prolongé d’un mois, à raison de 15 jours avant l’accouchement et 15 jours supplémentaires après. C’est le « cadeau » de Youssef Chahed aux Tunisiennes, à l’occasion de la célébration, le 8 mars, de la Journée internationale de la femme. On le sait maintenant, depuis la promulgation du Code du statut personnel en 1956 et la batterie de droits dont a bénéficié la femme, libérée, entre autres, de l’étau de la polygamie, chaque politique y va du sien. C’est à qui mieux mieux, on cherche à prouver que l’on a fait quelque chose de plus, un acquis supplémentaire à ajouter à ceux que Bourguiba avait imposés, et c’est bien le mot, à la société tunisienne. L’on se souvient qu’après la prise du pouvoir par Ben Ali, les « idéologues » du nouveau régime (dont certains transfuges des mouvements estudiantins de gauche des années 80 passés dans le giron du tout nouveau Rassemblement constitutionnel démocratique) ont convaincu le futur déchu de détourner le legs bourguibien et de s’en attribuer le mérite. Il le fit, en s’ingéniant à inventer des plus-values fort discutables dont il a affublé le Code du statut personnel, telles les clauses concernant le divorce. Il a de ce fait transformé les fêtes de la femme et toutes les manifestations nationales et internationales la concernant en des kermesses où on célèbre deux cultes de la personnalité, le sien et celui de sa femme. Il a fait de cette dernière le porte-drapeau des acquis de façade qu’il s’est adjugés pour que son image creuse resplendisse aux dépens de celle du véritable libérateur de la femme, en l’occurrence le « Zaïm ». Et puis Ben Ali savait mieux que quiconque que la position très avant-gardiste de la Tunisie par rapport à des nations très développées, concernant les droits de la femme, lui a toujours valu le respect et l’estime de la communauté internationale, ainsi que d’importants soutiens financiers à son action dans ce domaine. Sur le terrain; la réalité est tout à fait à l’opposé de ce que Ben Ali a voulu faire croire aux Tunisiens et à ses partenaires de par le monde. Les femmes sont toujours maintenues dans leur position d’accessoire. Et si, de temps à autre, l’une d’entre elles brille par un exploit, le mérite revient principalement à elle et non pas à la volonté des dirigeants de lui donner la place qui lui revient de droit dans la société. Mais que d’injustices, que d’arbitraires, que d’abus visent les femmes aussi bien celles du milieu urbain que du milieu rural. Exploitées pour trois fois rien, notamment dans le secteur agricole, elles ne peuvent prétendre à aucune parité réelle ni aspirer à un traitement équivalent à celui que l’on réserve aux hommes. Puis vint la décidément funeste révolution. Des forces jaillies du passé, de nulle part, ont tout remis en cause, et le legs bourguibien et les acquis de la femme ont été passés au crible de l’obscurantisme. Des prédicteurs aussi extrémistes les uns que les autres venus de nations arriérées et méprisables ont défilé sur les tribunes publiques du pays pour insulter Bourguiba et prôner un retour à la polygamie, à l’excision et au droit de battre la femme conformément à la chariaâ. C’est ce danger-là qui guette la femme et si ces fondamentalistes moyenâgeux parviennent à arracher le pouvoir, la femme peut dire adieu à tout ce qu’elle a pu obtenir durant les soixante dernières années d’indépendance.

Imed BEN HAMIDA Tunis-Hebdo du 11/03/2019




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