Quand Hassan II en voulait à Zaba

Quand Hassan II en voulait à Zaba
Tunis-Hebdo
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Le roi du Maroc, Hassan II, n’a jamais été en odeur de sainteté avec notre fuyard. Ayant reçu un rapport confidentiel sur les différentes turpitudes de notre futur putschiste - vivant entre autres, en concubinage, alors qu’il était marié - il a absolument refusé de le recevoir. Et cela lors de la présentation des lettres de créance de notre diplomate à Rabat. Pourtant, les usages veulent, comme le stipule le protocole, que l’attaché militaire accompagne son ambassadeur, lors de cette cérémonie officielle. Mais ça ne va pas s’arrêter là ! Par ailleurs, quand Ben Ali (surnommé M. Bac moins trois) a été promu, sur un vrai coup de tête de Bourguiba en tant que Premier ministre, le monarque a eu cette réflexion prémonitoire lancée sous forme de boutade parmi son entourage : «Celui-là (parlant de Ben Ali) ne quittera plus jamais le pouvoir». Toutefois, il n’a pas daigné en avertir notre «Zaïm» des futurs graves méfaits que son chef du gouvernement est capable de provoquer ! Et le putsch a été perpétré comme sur des roulettes quelques mois plus tard... Ben Ali a reconnu qu’il avait bien les choses en main avant d’entreprendre la destitution de Bourguiba avec le concours du général Habib Ammar, ami fidèle qui a été très mal récompensé par la suite. Lors du sommet arabe tenu à Casablanca en mai 1989, Hassan II a ordonné au responsable de la tour de contrôle de laisser l’avion transportant «Zaba» tournoyer une demi-heure supplémentaire au-dessus de l’aéroport marocain, question de le faire paniquer au maximum, étant donné qu’il était phobique de l’avion... Ce n’est pas tout ! Le lendemain matin, lors de la première réunion inaugurale du sommet, les membres du protocole ont empêché «le représentant de la Tunisie», qui était parmi les premiers à arriver, d’accéder à la salle, à l’instar des autres Chefs de délégation sous prétexte qu’il était le dernier parmi les présidents à être parvenu au pouvoir dans le monde arabe. Ainsi, il ne doit apparaître, à la conférence, qu’en dernier lieu et cela à son grand désarroi. Dépité au plus haut degré, Ben Ali décida, dare-dare, de rebrousser chemin, sans prendre congé de personne. Il retourna, alors, au bercail à bord de son appareil qui l’attendait depuis la veille sur le tarmac de l’aéroport. Entre Hassan II et Ben Ali, le courant n’est jamais passé, mais alors pas du tout ! Navré pour le putsch du 7 novembre 1987, le premier n’a pas manqué de réclamer aux autorités tunisiennes malveillantes de l’époque «qu’on lui transfère l’ami du défunt son père, «Si Lahbib Bourguiba», à Rabat» où il mènera une vie digne de son rang et de son combat pour l’indépendance de la Tunisie. Mais Ben Ali fit la sourde oreille... À noter que notre fuyard se faisait toujours petit face au monarque chérifien. Et il aurait donné tout l’or qu’il a volé au peuple tunisien pour gagner sa sympathie. C’est ainsi que «Zaba» n’a jamais reçu un télégramme quelconque ou une note de vœux de la part du roi du Maroc aussi bien lors des fêtes nationales que religieuses. Jamais un échange de courrier ou de coups de fil entre les deux. Ce qui en dit long sur leur mésentente. Je tiens la plupart de ces confidences de feu Zouheir Chelli, notre éminent ambassadeur à Rabat à l’époque, qui a vécu ces scènes de visu. À «Si Zouheir» revient le grand honneur d’être le premier diplomate à avoir su et pu réhabiliter le costume traditionnel (la jebba), lors de la présentation de ses lettres de créances à Hassan II. Depuis, le port de la tenue traditionnelle chez nous, autant pour les messieurs que pour les dames, revit intensément à telle enseigne qu’on finit par lui réserver officiellement une journée annuelle dans l’administration tunisienne.

M’hamed BEN YOUSSEF Tunis-hebdo du 15/10/2018




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