Un an après l'attentat de Sousse : L'Europe est-elle en train de nous sanctionner ?

Un an après l'attentat de Sousse : L'Europe est-elle en train de nous sanctionner ?
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Le 26 juin 2015, Seifeddine Rezgui tirait sur des touristes tuant 38 d'entre eux à l'Hôtel Riu Imperial Marhaba dans la zone touristique d'El Kantaoui. Depuis cette attaque où 30 ressortissants britanniques ont trouvé la mort, le tourisme tunisien ne s'est pas relevé ! L’attentat de Sousse a représenté un tournant dans l’histoire du pays...
Un an après, nous sommes retournés sur les lieux du drame. Un lieu déserté par les touristes et un hôtel dominé par un vide fracassant. Le Riu Imperial Marhaba, fermé depuis neuf mois, symbolise à lui seul l'impact qu'a eu l'attaque de Sousse sur le tourisme tunisien. En arrivant à El Kantaoui, les premières impressions font froid dans le dos. Ramadan oblige, tous les cafés et salons de thé sont fermés, mais les artères de la zone touristique sont également désertes. Les touristes sont quasiment rares. Un par-ci ; un autre par là... En cette matinée de jeudi 23 juin 2016, on se croirait au mois de février.La police touristique effectue ses rondes et chaque hôtel est gardé par une équipe sécuritaire bien équipée. Direction l'Hôtel Riu Imperial Marhaba. Là, tout est désert, seuls quatre employés nous accueillent, deux administrateur et deux gardiens.
La contrainte des restrictions de voyage
Il faut rappeler que l'hôtel est fermé depuis le mois d'octobre 2015. "On est restés ouverts en juillet, août et septembre 2015, juste après l'attentat du 26 juin, puis on a décidé de fermer en octobre car il y avait peu de touristes. Même les quelques Algériens présents avaient peur...", nous précise le Directeur Général de l'hôtel, Mehrez Saadi.Selon lui, un hôtel comme l'Imperial Marhaba, habitué à avoir entre 400 et 600 clients, ne peut pas fonctionner à 10 ou 11% de ses capacités (80 clients), ce n'est pas rentable. "Il nous faut au minimum 150 clients (4500 nuitées par mois) pour couvrir les frais et les charges de l'établissement", indique Mehrez Saadi qui précise, par ailleurs, que le marché russe reste un marché complémentaire. Quant au marché local ou maghrébin, il fait monter un peu les chiffres, sans plus ! Où en est l'hôtel aujourd'hui ? Mehrez Saadi reste optimiste malgré la gravité de la situation. "Si les restrictions de voyage imposées par la Grande-Bretagne, la Belgique ou les Pays-Bas sont levées, on peut rouvrir en trois jours. C'est le meilleur hôtel de la zone et nous avons toujours eu des touristes fidèles et de haute catégorie, principalement des Britanniques".
"L'Europe est en train de nous sanctionner"
Théoriquement, les touristes peuvent venir en Tunisie, mais les restrictions empêchent les tours opérateurs de s'engager vers la destination Tunisie. "L'activité touristique en Tunisie est interdite par les gouvernements européens, donc l'hôtellerie en pâtit. L'attentat a eu un impact très fort et la destination Tunisie a été retirée de tous les tours opérateurs qui se sont retournés vers Chypre et l'Espagne. L'Europe est en train de nous sanctionner", lance amèrement Mehrez Saadi. Il n'en veut pas qu'aux gouvernements européens. "Même les autorités tunisiennes n'ont rien communiqué officiellement sur le cours de l'enquête. Le touriste ressent donc un certain manque de confiance et c'est légitime. Il y a une perte de notre crédibilité, toutefois, et même si je ne peux pas faire revenir les morts, je reste optimiste et positif et je reste convaincu que les Britanniques vont revenir et même plus nombreux qu'avant..."
L'Imperial Marhaba rebaptisé
L'hôtel qui se tient prêt à rouvrir, le fera sous un nouvel habit. La chaîne hôtelière espagnole RIU Hôtels & Resorts, implantée en Tunisie depuis 16 ans a quitté le pays et les hôtels, dont l'Imperial Marhaba, portant l’enseigne, n’ouvriront plus sous la marque Riu. Riu considère en effet que la Tunisie est devenue une destination a même de porter atteinte à sa notoriété. L'Imperial Marhaba sera donc rebaptisé sous le nom de "El Kantaoui Bay". Un nouveau nom et un nouveau départ souhaité par tous ceux qui travaillent actuellement à l'hôtel, comme Anouar Hamrita, gardien. "Je travaille ici depuis 13 ans et ça fait maintenant 9 mois que je vis un stress quotidien à venir tous les jours dans cet hôtel vide. J'attend avec impatience une réouverture qui se fera sous un autre nom parce que Riu a décidé de nous lâcher. J'espère seulement que tout ce branle-bas médiatique autour de l'hôtel depuis l'attentat se poursuivra au-delà d'une nouvelle réouverture..."
L’enquête touche à sa fin
A trois jours de la date anniversaire de l'attentat de Sousse, Sofiene Selliti, porte-parole du Tribunal de première instance de Tunis et du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, a déclaré à l'Agence TAP que l’enquête sur l’attaque de l’hôtel Imperial Marhaba était sur le point de s’achever. L’instruction touche à sa fin, a-t-il dit, précisant que le dossier de l’affaire sera transféré à la chambre d’accusation près la Cour d’appel de Tunis. Selon Selliti, le nombre de personnes incriminées dans cette affaire s’élève à 46, dont 16 en état d’arrestation et 25 en liberté. Cinq suspects sont en fuite parmi lesquels figurent les dénommés Abou Bakr al-Hakim, Chamseddine Sendi et Tahar Dhifallah. Selliti a, d’autre part, relevé que nombre de sécuritaires ont été interrogés dans le cadre de cette affaire. Evoquant le cours de l’enquête, Selliti a parlé de "coopération positive" avec des parties judiciaires étrangères, estimant que cette collaboration "n’est pas contraire au principe de souveraineté nationale étant donné qu’elle s’est déroulée dans le cadre de commissions rogatoires".

M.C.

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