La "Journée mondiale de la langue arabe" : Une date oubliée…

La "Journée mondiale de la langue arabe" : Une date oubliée…
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Tunis Hebdo | La "Journée mondiale de la langue arabe", fixée par l’UNESCO au 18 décembre de chaque année, est passée, une fois de plus, inaperçue, à l’instar des années précédentes. Aucune manifestation, de quelque nature que ce soit, n’a marqué cette date dont chacun appréhende pourtant l’importance ; la langue arabe étant partie intégrante de notre spécificité identitaire, de notre Histoire et de notre civilisation. L’initiative onusienne s’inscrit dans le cadre de la lutte engagée, ici comme ailleurs, contre la perte du patrimoine linguistique, qui a atteint une ampleur sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Elles étaient plus de 130.000 langues parlées au-début du siècle dernier. Elle ne sont plus que quelque 5000 aujourd’hui. Et les linguistes prévoient qu’à la fin du XXIème siècle, près de 4500 langues du monde auront disparu, dont une bonne vingtaine pour la seule année qui s’achève. L’arabe est-il menacé d’extinction ? Il y a un siècle, plus de 100 pays utilisaient les caractères de l’alphabet arabe. Certains, beaucoup moins nombreux, les utilisent encore aujourd’hui : Pakistan, Afghanistan, Iran, Caucase, communautés indiennes, chinoises et même au Vietnam et au Cambodge. Quant à la Turquie, qui avait "exporté" les caractères arabes au plus profond de l’Europe et de l’Asie, elle a préféré, in fine, les "troquer" contre les caractères latins, sous le règne d’Atatürk. L’adoption de la langue arabe par l’ONU, il y a quelques années, comme une des six langues officielles (avec l’anglais, le français, le russe, le chinois et l’espagnol) lui a permis de se régénérer et de remonter le temps. Sa "réhabilitation" par l’organisation onusienne l’a délivrée, pourrait-on dire, d’une longue et ténébreuse période de stagnation, au cours de laquelle elle connut, peut-être plus que toute autre langue, de nombreuses vicissitudes. Sauvée par le gong ! Bien avant l’apparition de l’islam, déjà, l’époque de la « Jahilya » avait restreint la portée de la langue arabe. Loin d’en faire la langue d’une nation et d’une civilisation, cette époque avait confiné l’arabe dans un contexte tribal et sectaire, comme le démontre Hanna el-Fakhouri dans son "Histoire de la littérature arabe". Remise à l’honneur par l’islam et le Coran, qui lui ouvrirent de nouveaux horizons dans les domaines de la législation, de la philosophie et de la culture, la langue arabe ne tarda pas à sombrer dans une nouvelle éclipse due à la décadence politique des Arabes eux-mêmes. L’avènement de l’ère coloniale au Machrek et au Maghreb faillit porter le coup de grâce à la langue arabe. Au bord de l’abîme, cette langue ne dût son salut qu’au processus de décolonisation. Cependant, si l’ère coloniale est aujourd’hui révolue (tout au moins sous sa forme classique), la langue arabe n’en demeure pas moins menacée par d’autres dangers, bien de chez nous ceux-là. Parmi ces dangers, l’appel récurrent de quelques "novateurs modernistes" en faveur d’une simplification qui ravalerait l’arabe littéraire au niveau du jargon dialectal ; et cela essentiellement au moyen de la remise en question de toutes les grammaticales et autres. Les adeptes de cette voie sont généralement des universitaires, formés dans des établissements étrangers. Leur quête tend à singer d’autres mouvements analogues, européens notamment, où il est également question de "réformer" l’écriture (français, allemand…). Leur tentative a soulevé, il y a quelques années, une véritable levée de boucliers, en raison précisément de la gravité de ce projet, considéré comme une "profanation identitaire", par les gardiens du temple. Troquer le littéraire contre le dialectal, affirment les pourfendeurs des "réformistes", c’est d’abord "diffamer" la religion (l’arabe littéraire étant la langue du Coran) ; c’est porter atteinte, ensuite, à l’unité du monde arabe, la langue littéraire étant un facteur d’unité linguistique, voire d’unité tout court, et un puissant élément d’identité. S’il est vrai que le dialectal reste la langue des couches populaires, des souks et de la rue, par contre, et sous aucun prétexte il ne doit devenir celui de la littérature. Le recours au dialecte signifierait la rupture avec le patrimoine culturel du passé. La politique coloniale avait tenté, à plusieurs reprises, de convaincre les "autochtones" que leur langue littéraire était inutilisable dans la vie de tous les jours. Le dialectal fut même enseigné dans les écoles et les lycées, mais le "complot" a fini par échouer grâce au militantisme de quelques esprits éveillés. Les "nouveaux adeptes de la langue parlée" sont, eux, loin de désarmer.

Tahar Selmi




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