Descente de police à la Goulette: "Ceux qui sont censés nous protéger me font peur"

Descente de police à la Goulette: "Ceux qui sont censés nous protéger me font peur"
National
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Hier 26 novembre, tard dans la nuit, à la Goulette, c’est le couvre-feu, tout le monde dort depuis longtemps. Le quartier est silencieux. A 2h du matin, Monia Abid se réveille en sursaut. Elle entend des bruits de pas, des chuchotements. Et soudain un grand coup. La porte d’entrée est défoncée. Elle pense à des voleurs. Elle voit des individus avec des espèces de lampe-torches fixées sur le front qui pointent des leurs armes sur elles et sur le reste des membres de sa famille. Son cœur s’arrête de battre. Elle croit que c’est une attaque terroriste et qu’ils vont tous être égorgés. Mais ce sont des policiers, qui au milieu de la nuit, ont enfoncé la porte d’une cinquantaine de maisons dans le voisinage
«J’ai pensé que c’était des terroristes déguisés venus pour m’égorger. J’entendais les cris, les tirs. Il y a eu des balles sur les portes qui étaient trop dures à enfoncer. Vous n’imaginez pas la terreur. Cela fait 60 ans que j’habite ici. Dans ce quartier, tout le monde se connait. On vit ici depuis des générations. C’est un quartier de bons vivants. Ici vous trouverez sûrement de la zatla et de l’alcool mais pas de terrorisme».
Monia ne comprend pas. Elle essaie d’avoir des explications. Mais ils n’expliquent rien. Ses fils sont mis à terre, les mains derrière le dos, traités comme des criminels, sans même savoir de quoi ils sont accusés. Les policiers fouillent partout, vident les tiroirs et les armoires, retournent les matelas, ouvrent même la boite à couture. Tout est à terre. Ils cherchent des armes. Ils crient «où sont les armes?» Ils ne trouvent rien. Ils embarquent les fils de Monia, Nidhal, 27 ans at Anis, 24 ans. Le mari de Monia est cardiaque. Elle le voit blêmir, manquer de s’évanouir mais il tient le coup. Il n’est pas le seul. Leur voisine diabétique était aux toilettes au moment de l’arrivée des policiers. Elle entend le bruit et en sortant, se trouve face à une arme braquée contre elle et une autre contre la tête de sa fille, assise dans le salon, face à la télévision. 50 familles en tout ont vu leurs maris, frères, fils embarqués pour El Gorjani. Ils ont été frappés, insultés traités comme des moins que rien puis ramenés chez eux à 5h du matin. Tous les hommes du quartier ont été embarqués puis relâchés sans autre forme de procédure. On leur a juste demandé leurs cartes d'identité. Monia comprend que c’est l’Etat d’urgence et que le pays est en état d’alerte et en tant que citoyenne est prête à collaborer du mieux qu’elle peut pour aider son pays à combattre le terrorisme. Ce qu’elle ne comprend pas, c’est cette manière d’agresser le citoyen. Elle est gravement traumatisée.
« Je me suis sentie écrasée, violée, sans dignité, humiliée. Ils ont foulé aux pieds le respect et la pudeur. D’un coup, je n’avais plus aucun droit et c’est terrible comme sensation, savoir qu’on peut tout vous faire en totale impunité. Je pense que je ne m’en remettrai jamais. Je n’ai plus confiance. Ceux qui sont censés nous protéger, me font peur ».
Plusieurs familles ont décidé de déposer une plainte.

S.B




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