Saisie des biens du clan Ben Ali : Une responsabilité historique !

Saisie des biens du clan Ben Ali : Une responsabilité historique !
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La décision de la onzième Chambre du Tribunal administratif d’annuler en première instance le décret-loi numéro 13, en date du 14 mars 2011, relatif à la confiscation d’avoirs et de biens meubles et immeubles de Ben Ali et son clan a provoqué un véritable séisme dans le pays. La polémique qui s’en est suivie a pris une dimension multiple allant des interprétations juridiques les plus pertinentes aux plus saugrenues parfois, aux accusations de politisation adressées au Tribunal administratif d’autant plus que cette décision fait suite à une série de sursis à exécution dont aurait bénéficié un homme d’affaires appartenant à la famille du président déchu. Sur ce plan, il serait opportun, d’abord, d’apporter quelques précisions de base qui pourraient nous éclairer sur les aspects qui concernent tout le processus de restitution des biens spoliés. Sans prétendre détenir la vérité sur la question, il nous semble utile de souligner que la décision du Tribunal administratif ne constitue pas une hérésie, mais elle a certainement ses fondements et ses justifications juridiques qui pourraient être convaincantes. Pour s’en assurer, il conviendrait d’analyser les attendus développés par le juge. Reste que les accusations ou la suspicion que certains n’hésitent pas à lancer à l’encontre du Tribunal administratif nous paraissent déplacées pour ne pas dire infondées, cette juridiction ayant entretenu depuis des années, et même sous l’ancien régime, l’image d’une instance indépendante et audacieuse, qui s’est très souvent rangée aux côtés des défenseurs des libertés et des droits humains. Il nous semble, donc, qu’il faut chercher les causes de cette situation dans l’ensemble du processus mis en place à l’époque et qui n’aurait pas été bien ficelé par ceux qui l’ont mis au point. Sans entrer dans les méandres ou les finesses juridiques, le décret-loi en question ne fait aucune référence à aucun texte juridique, national ou international à l’instar de la convention internationale du 31 octobre 2003 de lutte contre la corruption, qui aurait pu permettre, par la suite, de considérer l’acquisition de biens de manière illégale ou illicite comme justifiant leur confiscation d’un point strictement légal. Les mêmes « maladresses » ont touché aussi la récupération des biens spoliés à l’étranger que notre pays a, pour l’instant, perdu, ce qui a coûté un grave préjudice à la nation. La responsabilité de cette situation incombe aussi bien ceux qui ont manqué de lucidité et de pertinence juridique au moment de l’élaboration de ces textes, et ceux, qui par la suite, n’ont pas eu la volonté de faire avaliser et ratifier les décrets lois en question par l’Assemblée Nationale Constituante, et qui remplissent aujourd’hui les rues pour exiger la transparence ! Ce qui est gênant dans toute cette histoire, c’est la campagne menée pour assurer et réaliser la réconciliation nationale afin, dit-on, de relancer le processus de développement économique et l’investissement dans le pays. Autrement dit, on veut insérer cette décision du Tribunal administratif dans un mouvement inéluctable de classement de tous les dossiers concernant quelques hommes d’affaires, encore dans le collimateur de la justice, y compris ceux appartenant à l’entourage du président déchu. Sur ce plan, certains « observateurs » nous ont sortis de leur « chapeau magique » la formule que la Tunisie d’aujourd’hui, qui est en train de construire un Etat de droit et souhaite évoluer dans le sens de l’édification d’un système où le respect de la loi devienne la règle, ne peut pas ne pas respecter la décision du juge administratif et ne peut pas, par conséquent, permettre que les autres pouvoirs, entendez le pouvoir exécutif ou le pouvoir législatif, interférent dans le domaine de la justice. Tout cela pour justifier que les « voleurs » puissent continuer à bénéficier de leurs forfaits et des richesses qu’ils ont acquis de manière illicite par l’usage de tous les moyens, y compris par la violence morale ou physique. Autrement dit, on veut actuellement faire avaler au peuple tunisien la couleuvre de le voir se réconcilier avec ceux qui l’ont pillés pendant au moins deux décennies. Sur ce plan, on peut leur opposer la légalité révolutionnaire, celle que le peuple tunisien souhaite voir s’instaurer pour assurer, non seulement la récupération des biens mal acquis, mais aussi pour voir ceux qui ont profité des libéralités de l’ancien régime assumer leurs responsabilités et se racheter une conscience qui les exonérera définitivement à l’égard de la justice de leur pays. Le législateur, le pouvoir judiciaire, les diverses instances, comités ou commissions à l’échelle nationale, doivent tous assumer leur responsabilité historique, le premier en adoptant une loi de validation qui concernera le décret-loi en question, puis se mettre au travail pour mettre à niveau l’ensemble de la législation surtout celle qui touche ce genre de questions ; les autres pour poursuivre inlassablement leur travail harassant de recherche et d’examen de tous les dossiers qui ont provoqué les injustices et ces sentiments haineux qui fleurissent dans notre pays mettant en péril son unité. Car l’unité du peuple autour de son pays ne pourrait être assuré que par une réconciliation acceptée et limpide, et non par des manœuvres sordides ou politiciennes ourdies dans l’ombre !

L.L.




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