Jabeur Mejri : "J'étais certain que je serai libre le jour où Ennahdha ne serait plus au pouvoir"

Jabeur Mejri : "J'étais certain que je serai libre le jour où Ennahdha ne serait plus au pouvoir"
National
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Depuis sa libération le 4 mars dernier, Jabeur Mejri n’avait pas encore eu l’occasion de s’exprimer. Dans une interview accordée au journal français L’Express, le "premier prisonnier d'opinion de l'après-révolution", est revenu sur les conditions de sa détention, son arrestation, les caricatures du Prophète, sa libération, le président Marzouki, les islamistes, l’exil, etc… parlant de l’hypocrisie qui gangrène le pays et de son avenir qu’il voit ailleurs, en Suède, pays qui a accepté de l’accueillir. C’est un jeune homme tranchant qui répond aux questions posées malgré une «extrême fatigue» due à deux ans de détention. Les propos de Jabeur Mejri sont teintés de beaucoup d’amertume. Condamné à 7 ans et demi de prison pour avoir publié des caricatures du Prophète, il a passé deux ans en prison avant d’être libéré. Sur ce point, Jabeur Mejri est convaincu que sa libération est en rapport avec le départ d’Ennahdha du pouvoir. «Je suis encore la cible d'imams extrémistes…» «Je ne me faisais donc pas beaucoup d'illusions sur ma libération, j'étais certain que je serai libre le jour où Ennahdha et les Frères musulmans ne seraient plus au pouvoir. C'est effectivement ce qui s'est passé : dès la chute d'Ennahdha, j'ai été libéré. Malgré cela, je suis encore la cible d'imams extrémistes qui protestent contre ma libération et estiment que la peine prononcée de 7ans et demi est insuffisante», dit-il. Il est également convaincu que malgré la grâce accordée par le président Marzouki, ce dernier ne pouvait rien faire face à la pression des islamistes. «Le président de la République Moncef Marzouki était un militant des droits de l'homme, un laïque. Mais je savais qu'il ne pourrait pas s'affranchir de la pression du parti islamiste Ennahdha, du parti ultra-islamiste Ettahrir ou encore de la Mosquée Al-Zitouna», concède Jabeur Mejri qui ne se «voit plus vivre dans ce pays qui souffre d'énormément de maux dont le plus grave est l'hypocrisie». «Ici nous vivons dans un pays où des affamés se mangent entre eux…» Aujourd’hui, il a bien l’intention de partir en Suède qui lui a proposé son accueil et où il compte poursuivre ses études. Amer, Jabeur Mejri déclare «ne plus ressentir d’appartenance à la Tunisie (…) qui ne réfléchit pas à ses enfants», dit-il. «Ici nous vivons dans un pays où des affamés se mangent entre eux. Il faudra encore beaucoup de temps aux peuples berbères pour se réveiller et s'émanciper de leurs illusions religieuses. Pour ma part, je veux enfin être réellement libre et travailler». Car Jabeur Mejri veut tirer un trait sur tout ce qui s’est passé et n’a surtout pas «l’intention de devenir un militant pour la liberté d'expression», affirme-t-il précisant au passage qu’il veut également oublier avoir connu Ghazi Béji (condamné lui aussi à 7 ans et demi de prison mais qui a pu s’enfuir avant d’être arrêté et est aujourd’hui exilé en France) le décrivant comme un ancien ami qui est en partie la cause de ses problèmes : «Ghazi a colporté la rumeur selon laquelle j'aurais volé une somme 1700 dinars dans les guichets de la SNCFT». «Je vivais dans une solitude amplifiée par les psychotropes prescrits par les médecins» Parlant de son arrestation et de sa détention, Jabeur Mejri dit avoir été maltraité pendant les premiers jours de l’enquête, avoir été torturé, pour l'obliger à signer des aveux. En prison, il dit avoir beaucoup souffert psychologiquement parce qu’il était considéré comme un détenu atypique souffrant des insultes quotidiennes, de l’isolement et «d’une solitude amplifiée par les psychotropes prescrits par les médecins.



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