Dans le royaume du chaos, la corruption est "roi"

Dans le royaume du chaos, la corruption est "roi"
National
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Jusqu’au 14 janvier 2011 au soir personne n’aurait pensé que les mouvements populaires allaient obliger Ben Ali à prendre la fuite à part les centaines de milliers de Tunisiens qui étaient descendus, ce jour- là, dans la rue pour lui exiger de «dégager». Le peu d’espoir qui lui restait après son discours de la veille lorsqu’il avait annoncé qu’il ne renouvellerait pas sa candidature et promis des réformes et des solutions, s’est évaporé avec sa fuite vers l’Arabie Saoudite. Tout le monde dans la classe politique avait été pris de court car d’aucuns ne s’attendait à un tel scénario où l’homme fort de l’Etat allait lâcher facilement. Le pire est que personne n’était préparé à ce scénario qui a risqué de plonger le pays dans le vide politique n’eut été l’initiative de dernière minute du colonel Sami Sik Salem en vertu de laquelle Mohamed Ghannouchi et Foued Mebazaa avaient pris, temporairement, la relève. Kasbah II est la désillusion de ceux qui l’ont provoqué Mais la transition ne se limite pas à la continuité des structures de l’Etat. Elle doit se traduire par la sécurité et la stabilité politique pour faciliter le processus. Ces deux conditions n’étaient pas réunies. Les contestations ne se sont pas arrêtées au motif que la révolution doit s’accompagner de la rupture totale avec les hommes de Ben Ali, son régime et les institutions qui étaient à son service. A cet effet, le sit-in de Kasbah II s’est soldé par la désignation d’un nouveau gouvernement sous la présidence de Caid Essebsi et la création d’une instance nationale pour préparer les élections d’une Assemblée Constituante en vue de la refonte de la Constitution comme le voulaient les manifestants de Kasbah II. En fait, c’était le souhait de quelques partis politiques qui cherchaient à se positionner sur l’échiquier national, s’organiser et faire connaître à une grande échelle leurs programmes politiques. Car, n’ayant pas participé directement à la révolution et n’ayant pas eu l’occasion d’entrer en contact avec les masses pour les mobiliser et les encadrer, ils ne pouvaient s’imposer qu’à travers une action politique d’envergure. Seuls quelques partis, à l’instar du PDP devenu Al Joumhouri, étaient opposés à cette démarche qui n’a profité qu’aux islamistes et leurs ramifications. Criminels, salafistes et LPR, main dans la main En même temps, le relâchement sécuritaire et la fragilisation de l’autorité de l’Etat ont favorisé l’anarchie et le chaos dans tous les domaines : blocage des activités économiques et sociales par des jeunes chômeurs, les populations démunies et des citoyens qui exigent des solutions immédiates, des manifestations salafistes dont les instigateurs, partisans du wahabisme et jihadistes irréductibles, voudraient imposer la Chariaa. Pour ces derniers, la révolution du 14 Janvier est un signe du ciel pour combattre les laïcs et les mécréants et instaurer un émirat islamique. Les ligues de protection de la révolution se sont jointes à l’ensemble pour combattre l’opposition qui dérange et le Syndicat qui a rejeté l’offre de trêve sociale. Profitant de cette atmosphère d’insécurité et de l’impuissance de l’Etat à y faire face, la contrebande et la criminalité organisée ont prospéré. Des trafics en tous genres continuent à se pratiquer au détriment de l’économie nationale et de l’intérêt des Tunisiens. Corruption, opulence, opportunisme et marge de manœuvre limitée Et le comble du malheur a été le développement de la corruption qui a gagné plusieurs secteurs ainsi que le montre la position de la Tunisie dans le classement mondial en matière de lutte anti-blanchiment. Alors que la misère sociale se propage dans la classe moyenne, le pays compte près de 6500 millionnaires et 70 milliardaires sans compter ceux dont la fortune n’est pas déclarée pour ne pas éveiller les soupçons sur son origine. Dans ce contexte, la marge de manœuvre du prochain gouvernement est très réduite. Aucune réforme ni aucun programme ne peut réussir si les données ne changent pas. Les investisseurs n’acceptent pas de prendre le risque de s’aventurer sur un marché où à tout moment la situation peut dégénérer. Les touristes commencent à bouder la Tunisie en raison de l’insécurité et des menaces terroristes qui pèsent sur le pays. Les activités économiques sont bloquées à cause des tensions sociales. Les Tunisiens à l’étranger ne sont pas en confiance et les bailleurs de fonds étrangers qui sont prédisposés à aider le pays, attendent le retour à la normale. Moralité de l’histoire : le soutien au prochain gouvernement, requis de la classe politique et de la société civile, doit se manifester par une prise de conscience de la gravité de la situation et une mobilisation pour faire face à ces fléaux qui s’enracinent de plus en plus dans notre réalité. Une stratégie de sauvetage basée sur l’éradication de ces maux est absolument nécessaire pour préparer le terrain à la réalisation des vrais objectifs de la révolution.



André Parant juge nécessaire de préserver les acquis démocratiques en Tunisie

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