«Zelzel», «rahina», braquage et autres calamités télévisuelles !

«Zelzel», «rahina», braquage et autres calamités télévisuelles !
National
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Pour beaucoup de Tunisiens, le mois de Ramadan est intiment lié aux émissions de télévision humoristiques et divertissantes. La sacro-sainte caméra cachée est devenue une tradition bien enracinée dans nos habitudes ramadanesques. Ramadan 2013 n’a pas dérogé à la règle. Toutes les chaînes de télévision ont mis au point leur propre version de la caméra cachée. Malgré la multitude de talents et de créativités que compte la Tunisie Post-14 Janvier, force est de constater que le niveau ne fût pas celui escompté. Les émissions proposées ne sont ni drôles ni divertissantes mais consacrent plutôt le mauvais goût et la bêtise télévisuelle dans toute sa splendeur. La palme d’or de la mauvaise plaisanterie revient tout de même à la Watania, où non seulement on met en scène une prise d’otage sur un bateau, mais, cerise sur le gâteau, on feint un meurtre pour faire plus vrai et convaincre la star piégée (pour ne pas dire victime) que ce qu’elle vit est réel. Afficher une telle violence, à une heure où toute la famille, petits et grands, est réunie devant la télévision, est irresponsable. Des personnes piégées, qui se retrouvent humiliées, embarrassées, apeurées devant des millions de téléspectateurs, pour amuser la galerie. Les images sont affligeantes et peuvent être, dans certains cas, choquantes pour certains téléspectateurs. Le caractère éminemment dégradant de ces émissions démontre le manque de tact et de finesse dont font preuve producteurs, concepteurs et responsables de nos chaines de télévisions. Sans parler d’une évidente paresse intellectuelle, vu que les trois plus grandes chaînes, en termes d’audience, proposent des programmes du même acabit. Pour l’instant, un seul organisme est monté au front pour demander l’arrêt d’une de ces émissions, «Rahina» de la Watania en l’occurrence, c’est la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme. Elle dénonce la violence de ces programmes, susceptible d’avoir un impact sur les enfants qui regardent. La télévision publique n’a pas encore répondu à cet appel. Il fut un temps où la camera cachée tunisienne était reconnue dans le monde arabe comme étant la plus créative, la plus osée, et la plus amusante. On a tous en mémoire les cheveux de feu Mohamed Boughnim, Clubiste dans l’âme, aux couleurs de l’EST, ou encore l’épisode de «Zlabya, mkharaq» avec Jalila Hafsia. Cette époque semble lointaine, et aujourd’hui on a le choix entre un tremblement de terre apocalyptique, une arrestation pour trafic de drogue ou une prise d’otage en mer. Des émissions indéniablement trash, qui baignent dans un sadisme affiché et revendiqué. Les catastrophes mises en scène nous emmènent dans les bas-fonds décervelant de la bêtise cathodique. Faut-t-il attendre une crise cardiaque, un pétage de plomb ou la révolte des piégés pour que l’on se rende compte de l’insanité proposée ? La peur exprimée par les victimes de ces émissions est-elle supposée nous amuser ? Cette conception du divertissement, à la vacuité éthique étonnante, met mal à l’aise. Quand la détresse s’empare du rire et le provoque, qu’est ce qui nous fera pleurer ?



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