Le billet de Hatem Bourial - Ira-t-on jusqu'à emprisonner le directeur du musée du Bardo ?

Le billet de Hatem Bourial - Ira-t-on jusqu'à emprisonner le directeur du musée du Bardo ?
Chroniques
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Le directeur du musée du Bardo risque-t-il de se retrouver en prison ? Une simple visite au musée national qu’il dirige permet de constater le nombre important de mosaïques qui représentent des femmes nues, des éphèbes ou encore des personnages mythologiques, ivres comme Silénus. Les consciences intégristes ont de quoi s’affoler devant cet étalage de seins nus et de fesses en l’air tout droit venu de la « jahiliya » de nos ancêtres sur cette terre tunisienne. Pourrions-nous un jour voir un avocat porter plainte contre le directeur du musée du Bardo et le trainer en justice au nom d’attitudes intégristes, obscurantistes et rétrogrades ? Cela relèverait du cauchemar ! Malheureusement, beaucoup de Tartuffes simulent le jeu du « Cachez donc ce sein que je ne saurais voir » tout en se gavant de sites pornographiques devant leur petit écran. Cette hypocrisie condamne aujourd’hui un journaliste à la prison. Poussée à l’extrême, elle pourrait menacer d’un autodafé décadent toutes les collections de mosaïques tunisiennes qui comporteraient une nudité ou des agapes. Car à ce jeu de la censure, de la terreur et des procès d’intention, ce sont toujours les extrémistes et les oppresseurs qui gagnent. Demain, le Tunistan qui s’annonce pourrait se retourner contre le patrimoine paléochrétien et, qui sait, dynamiter les fonts baptismaux de Sbeïtla ou d’autres reliques de notre histoire comme les mosaïques. La plus grande vigilance est de mise, car notre pays est parsemé de « Bouddhas de Bamyan » en puissance. Terrible retour aux sources des conquêtes islamiques lorsque les guerriers d’Allah avaient décapité les statues romaines et chrétiennes, au nom de l’interdit de la figuration… Le directeur du Bardo est-il responsable du contenu des mosaïques et devrait-il censurer les œuvres exposées ? Devrait-il obéir aux diktats, parfois exprimés, des héraults de l’intégrisme ? Le directeur du journal « Ettounsia » doit-il être emprisonné à cause d’une photo ? Un mannequin dénudé et son footballeur de fiancé peuvent-ils faire basculer le destin d’un Tunisien au 21ème siècle ? Disons-le par boutade : irions-nous jusqu'à emprisonner le directeur du musée du Bardo à cause des œuvres exposées dans l’institution qu’il dirige ? Tartuffe guette et veille au grain. Mais lorsque Tartuffe prend le pouvoir, toutes les dérives peuvent s’inviter au nom du double langage, de l’hypocrisie et de la duplicité. Iront-ils jusqu’à mettre des menottes aux fleurs parce qu’elles font l’amour avec le vent et les abeilles ? Sur le plan de l’actualité, les choses devraient s’accélérer aujourd’hui et déboucher soit sur un happy end pour une farce qui n’a que trop duré soit sur la poursuite de cette pantalonnade d’un autre âge… N.B. Le tribunal de première instance de Tunis a mis, aujourd'hui, en liberté provisoire Nasereddine Ben Saïda, en attendant l’audience de 8 mars prochain.



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