Bouteflika : prendre le train en marche

Bouteflika : prendre le train en marche
National
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On assiste, depuis la chute fatale et inexorable du régime de Moamar Kadhafi, et de là à la réussite de la révolution libyenne tout comme celle de la Tunisie —précurseur et inspiratrice d’autres foyers d’agitation arabes dans le but d’en finir avec le despotisme— à d’importants «rajustements» de la diplomatie algérienne. D’abord, sceptique de voir le peuple tunisien triompher, de la dictature de Ben Ali, «son copain», le président Bouteflika, a fini par se rendre à cette évidence primordiale : rien ne peut s’opposer à la volonté des peuples. Et dans la foulée, c’est un autre despote, «son copain» aussi, qui a été éliminé physiquement. Quant à l’Égypte, elle a emprisonné son «raïs». Salah du Yémen est impitoyablement malmené. Al Assad est, quotidiennement, confronté à de sanglants débordements. Si, après autant de graves événements au sein du Monde arabe annonciateurs de renouveau, les ténors du régime algérien continuent à s’entêter à ne pas réviser leurs positions, jusque-là tout à fait contraires aux principes de la liberté des peuples, alors c’en est fini de l’Algérie combattante, au million de martyrs, qui se sont sacrifiés pour arracher leur indépendance à la France coloniale. A une époque de son histoire, Alger a bel et bien ébahi le monde entier… Heureusement qu’en recevant «royalement» Cheikh Ghannouchi et en exprimant sa satisfaction de l’ouverture politique constatée chez ce leader vainqueur des élections de la Constituante et optant, chez lui, pour une coalition gouvernementale, Bouteflika vient de confirmer qu’il a recentré sa diplomatie. Il semble avoir adopté les prémices de la «Realpolitik» comme principe. Certes, on peut lui reprocher de prendre le train en marche, lui dont les troupes auraient couru, mainte fois, au secours du clan Kadhafi. Mais, en vain ! Comme le vent a bien tourné en Algérie, son ministre des A.E, Mourad Medlassi, a longuement devisé avec son homologue marocain, Al Fassi Al Fehri après un silence d’une douzaine d’années. Excusez du peu ! On épiloguera, longtemps, sur la grave dérive qu’a connue la diplomatie algérienne tout au long de l’année 2011 et même avant. Pourtant, depuis l’indépendance de ce pays, que l’on respecte autant qu’on le craint, sa diplomatie fondée par le dynamique tout jeune Bouteflika, lui-même, alors le «chouchou» du président Boumédiène, a connu un rayonnement exceptionnel, cité, souvent, en exemple. N’a-t-elle pas produit, entre autres, le talentueux diplomate Lakdar Brahimi, actuellement adjoint du secrétaire général de l’ONU. L’Algérie, d’autre part, est intervenue, au passé, avec brio pour régler un tas de contentieux internationaux, y compris entre Téhéran et Washington. Elle a même perdu, dans les cieux iraniens, un de ses brillants ministres qui faisait la navette entre les deux capitales. N’oublions pas que le Grand Maghreb est à l’image d’un grand oiseau : le corps, c’est l’Algérie, et les deux ailes sont, d’un côté, la Tunisie et, de l’autre, le Maroc. Il suffit que l’une des ailes ou une partie du corps reçoive une charge de plomb pour que ce volatile s’immobilise indéfiniment… Par ailleurs, maintenant que le parti de la Justice et du Développement (PJD) au Maroc, à tendance islamique modérée, donc à la «Nahdha», vient de remporter les législatives qui se sont déroulées dans la sérénité, c’est-à-dire à la Tunisienne, on peut avancer, sans risque de se tromper, que la boucle est bouclée. Alors accordez votre violon, M. Bouteflika ! Autrement, d’ici l’été prochain —et quelles que soient les réformettes politiques entreprises et les augmentations salariales consenties— l’Algérie que nous aimons, ou plutôt son brave et courageux peuple, fera sa propre révolution. C’est inéluctable ! Il s’agit pour plus d’un d’effacer les traces de la précédente révolution du FIS, révolution tuée dans l’œuf, dans les années 80, par l’armée. L’Algérien est trop fier pour se laisser damer le pion par qui que ce soit dans le domaine des libertés, ni par le Tunisien, ni par le Libyen, ni par l’Égyptien, ni par le Syrien, et à plus forte raison par le Yéménite. Le terme Révolution, en principe, a pour synonyme Algérie…

M’HAMED BEN YOUSSEF - Tunis-Hebdo




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